Soraya Thomas amène son « Souffle » à La Manufacture

A Bordeaux, au CDCN, la chorégraphe réunionnaise a présenté sa dernière création et en prépare une autre.

Depuis le début de cette année, Soraya Thomas, artiste soutenue par La Manufacture CDCN, fait la navette entre la Nouvelle Aquitaine et l’île de La Réunion, où elle vit et travaille avec sa compagnie, Morphose. Ni ana-, ni méta- ni autre. Juste Morphose, pour laisser advenir la forme, à partir du corps qui se plie et qui résiste. Arrivée d’Annecy à La Réunion en 2002, elle porte un regard à la fois complice et distancié sur le territoire et le quotidien de l’île. 

Les actions de territoire prennent une place importante dans les activités de Morphose, créant un lien fort avec l’extérieur, la rue, les espaces dits non-dédiés et bien sûr avec la population. Car Soraya Thomas pratique une danse qui crée du lien, et part d’expériences concrètes, de la vie et du quotidien, proposant à La Réunion non seulement ses pièces mais aussi des événements participatifs. Toujours en faisant la navette, elle travaille sur sa nouvelle création, Les Jupes, laquelle sera, contrairement à ce que son titre semble indiquer, une pièce qui parle des hommes. Ce quatuor masculin « interroge les modèles et symboles entourant la masculinité, le corps et l'autorité » dans un« défilé chorégraphique punk-rock pour questionner le corps masculin et ses modèles persistants, avec pour inspiration les marches, qu'elles soient militaires ou processionnelles ». 

Si la création de Les Jupes  est prévue les 8, 9 et 10 mai au Leu Tempo Festival, Saint-Leu (La Réunion), une sortie de résidence a lieu à L’Odyssée, scène conventionnée de Périgueux, où la chorégraphe présente également Et mon cœur dans tout cela, « solo-manifeste » volet central d’un triptyque qui fait se croiser « la révolte et l’intime » et qui avait débuté par La Révolte des papillons, quatuor pour l’espace public, et s’achève par Souffle, un sextuor par lequel elle souhaite « explorer l’intime et les liens du clan quand tout se déchaîne autour ». Et c’est par ce volet final qu’elle s’est présentée pour la première fois au public de La Manufacture CDCN. 

Souffle majeur  

La démarche de Souffle  prend tout son sens par la double vocation de cette pièce, pour la scène et l’espace public. Tout s’y joue dans la relation entre les personnages, les échanges de contacts, de forces, de gestes et d’objets. Cette danse-là est concrète, elle est cash, elle embarque. C’est parfait pour la rue, c’est un bol d’air frais en salle. C’est une pièce sur l’air qui bouge et qui se prête aux espaces exposés au vent autant qu’aux salles qui offrent leur protection en cas de déchainement des éléments. 

On n’aborde pas la tempête de la même façon, selon si on se situe dans une zone à cyclones ou sur les rives de la Garonne. Souffle retient le sien, comme dans l’œil du cyclone, en attente d’un déferlement ou d’une dévastation. On redoute, on se solidarise, on joue en équipe. Lors de la rencontre avec le public qui suivit la représentation, la chorégraphe dit s’être inspirée d’une équipe de handball. Equipe mixte et, comme en sports, faite de corps engagés mais non érotisés. Là aussi, cette danse est cash, sans arrière-pensées et donc parfaite pour tous âges et toutes situations.  

Galerie photo © Marie Julie Gascon