Pôle-Sud : Une saison européenne
A Strasbourg, Joëlle Smajda présente une saison 2018/19 avec une nouvelle génération d’artistes et de nouvelles façons d’aborder l’art et le monde.
Pour la saison 2018/19, Pôle-Sud à Strasbourg annonce « La danse à deux pas de chez vous », et affirme en même temps que ce « n’est pas qu’un slogan ». Car, et c’est nous qui l’ajoutons, les slogans sont ailleurs. Et pourtant si proches : Quand le Ministère de la Culture lance « La culture près de chez vous », par exemple. Comme pour faire croire qu’il fallait réinventer la décentralisation parce qu’elle aurait été un échec. Alors que l’existence de pôles culturels comme Pôle Sud prouve le contraire. Pour le Ministère, il s’agit de faire tourner les productions parisiennes en régions. A Pôle-Sud, on propose un principe inverse, où Strasbourg accueille les artistes venant d’ailleurs et devient un centre à sa façon, situé à la périphérie strasbourgeoise.
Une vocation européenne
Joëlle Smadja, la directrice de ce CDCN situé dans l’est mais nommé Pôle-Sud, parle d’une « nouvelle génération d’artistes, essentiellement européenne, [qui] nous invite à la dérision, la distanciation, l’irrévérence » et affirme: « Pour cette nouvelle saison, nous avons voulu jouer avec les codes et les représentations, inviter des artistes pour la première fois, déplacer le curseur pour nous ouvrir à d’autres démarches, d’autres manières d’écrire, d’autres façons d’être sur les plateaux. »
Il suffit en effet d’ajouter une virgule, pour transformer « La danse à deux pas de chez vous », qui devient alors: « La danse à deux, pas de chez vous. » Et c’est tout dire d’une saison où Pôle-Sud accueille de nombreux duos internationaux comme Igor & Moreno, Damien Briançon & Étienne Fanteguzzi, Alessandro Bernardeschi & Mauro Paccagnella, Joke Laureyns & Kwint Manshoven, Giuseppe Chico & Barbara Matijevic...
A Pôle-Sud, la vocation européenne de Strasbourg est en pleine santé... Mais l’ouverture de saison, le 14 septembre, souligne aussi les alliances locales, quand l’Opéra du Rhin présente à Pôle-Sud Bless - ainsi soit-IL de son directeur Bruno Bouché.
Questions de générations
Mais ce n’est pas le duo qui est le thème de la saison. Pas le pas de deux, mais la rencontre avec une nouvelle génération. Sans exclure les Fattoumi Lamoureux avec leur Oscyl Variation, qui participe d’un élan à porter la danse dans les musées.
On y trouve aussi Mark Tompkins qui fait appel à soixante amateurs pour évoquer la transe collective qui s’empara des Strasbourgeois en 1518. Le premier flash-mob de France ? Tompkins invite danseurs et musiciens au Musée de l’œuvre Notre-Dame pour revivre cet accès de folie.
Cette nouvelle génération est celle du Catalan Père Faura, du Congolais Andréya Ouamba, de la Capverdienne Marlene Monteiro Freitas, du Suisse Martin Schick, du Portugais Marco da Silva Ferreira, des Belges Jan Martens et Arno Schuitemaker, de l’Israélienne Meytal Blanaru, du duo Anglo-Italien Igor & Moreno, de la Croate Barbara Matijevic ou du Français Vidal Bini.
Une nouvelle génération donc, et également dans la salle, quand le duo belge Joke Laureyns & Kwint Manshoven propose Horses, une pièce pour cinq danseurs et cinq enfants, quand Revoir Lascaux de Gaële Bourges s’accompagne d’ateliers parent/enfant, quand les créations de Robyn Orlin et Emmanuel Eggermont s’adressent aux spectateurs à partir de huit ans.
Mais d’autres pièces leur sont déconseillées, comme Requiem pour L. d’Alain Platel, Les Rois de la Piste de Thomas Lebrun [lire notre critique] ou Bacchantes - Prélude pour une Purge de Marlene Monteiro Freitas. Et Fanny de Chaillé d’explorer, dans Les grands, les difficiles relations entre les âges de l’existence. Comme pour résumer ou extrapoler, à partir de ces questionnements autour de l’âge des spectateurs.
Artiste associé et festivals
Quant à Amala Dianor, il reste bien sûr l’Artiste associé de Pôle Sud. Présent avec des représentations de ses pièces tout au cours de la saison, il créera en janvier 2019 The Falling Stardust, une pièce pour neuf interprètes et donc sa plus grande production à ce jour, sa première vraie pièce de groupe.
Du 19 mars au 5 avril, le festival Extradanse offre comme un condensé de cette saison, que Joëlle Smajda place sous le signe de « la dérision, la distanciation, l’irrévérence »… On y retrouve donc Père Faura, avec Sweet Tyranny et son « classique », le solo Striptease , entouré de toute cette nouvelle génération européenne, à laquelle s’ajoute le hip hop français de Fouad Boussouf avec Näss (Les gens) [lire notre critique].
Egalement important : Treize chorégraphes seront soutenus dans leurs démarches de création en leur ouvrant l’Accueil Studio. Dont Ole Kamchanla, Franck Micheletti, Oona Doherty, Radhouane El Meddeb, Vania Vanneau et même Catherine Diverrès…
Thomas Hahn
Photo Preview : Père Faura © Bernhard Mueller
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