Montpellier Danse affirme ses liens avec Trisha Brown
Un an après sa disparition, la pionnière américaine continue de marquer le festival, avec une exposition à voir jusqu’au 7 juillet.
De festival en festival, la danse américaine a laissé ses empreintes à Montpellier. Le lien s’est tissé très fortement à travers le corps longiligne, toujours doté d’un soupçon d’élévation, de Trisha Brown. Son parcours à travers Montpellier Danse, de 1982 à 2013, reflète l’acceptation progressive de la danse contemporaine, qui devient un art populaire au meilleur sens du terme. En toute logique, Jean-Paul Montanari a impulsé la création d’une exposition spéciale, Trisha Brown - Une Américaine à Montpellier dont Agnès Izrine est la commissaire.
Le dessin grand format It’s a draw de Trisha Brown habille la Salle Béjart de l’Agora, l’ancienne chapelle du couvent des Ursulines, depuis son ouverture, en 2010, en tant que lieu de rencontres et d’expositions. Le dessin de 2.7 m x 3.4 m, chef-d’œuvre d’abstraction et d’harmonie pouvant rappeler un art du dessin préhistorique, a été réalisé par la chorégraphe américaine dans un dialogue entre le papier, le fusain et son corps. Il devient ici, sur l’idée de Jean-Paul Montanari, le point de départ de l’exposition, et est installé au cœur de l’installation conçue par Agnès Izrine, avec la collaboration de la journaliste Lise Ott et du chorégraphe Fabrice Ramalingom.
Pour la durée de l’exposition, l’original est plongé dans une lumière bleutée et veille, discrètement, sur l’espace et une installation circulaire, horizontale et verticale. Au centre de la chapelle se trouve, au sol, sa reproduction en négatif, comme dessiné en blanc sur un tapis de danse. Tout autour, comme dans un tombeau circulaire à la Stonehenge, un cercle de photos montre Trisha en pleine création de It’s a draw, au Théâtre du Hangar, le 1er juillet 2002. Au-dessus de ce making of s’élève un cercle de cadres, montrant les photos signées Laurent Philippe et Marc Ginot, des diverses pièces de Brown, crées ou montrées à Montpellier Danse. Une prouesse technique permet de montrer une photo différente de chaque côté, alors que les cadres sont illuminés de l’intérieur.
On fera ainsi, littéralement, le tour des pièces de Brown qui ont marqué le festival. Le cercle ascendant des images contient cette légèreté aérienne qu’on retrouve dans les images, qu’elles soient tirées de Set and Reset (créé à Montpellier Danse en 1982), Astral Convertible (créé à Montpellier Danse en 1989) ou autres One Story as in Falling, créé en 1992 pour et par la compagnie de Dominique Bagouet, avec Fabrice Ramalingom comme interprète.
Galerie photos © Montpellier Danse
L’installation et les projections vidéo (extraits de journaux télévisés et captations de pièces, dont bien sûr It’s a draw, mais aussi des pièces rares comme You can see us, duo de Brown et Bill T. Jones créé en 1995) sont traversés par la lecture, en voix off, de trois textes (signés Agnès Izrine, Lise Ott et Fabrice Ramalingom) retraçant trois points de vue personnels sur Trisha Brown et son lien avec Montpellier, de même qu’un « pêle-mêle » de photos et de croquis, sur un mur latéral rappelle son parcours dans la ville et le festival.
Le lien entre la danse post-moderne américaine et la ville de Montpellier semble se prolonger jusque dans Atlas / Etudes de Michèle Murray, une série de pièces brèves présentées cette année à Montpellier Danse. La Franco-Américaine qui travaille à Montpellier et s’est entre autres formée chez Merce Cunningham, emprunte au maître Newyorkais le principe de régler la chorégraphie dans une liberté totale par rapport à la musique. Celle-ci est même choisie seulement après le travail avec les danseurs.
Le principe chorégraphique d’Atlas / Etudes, notamment l’absence d’un centre, que ce soit dans l’espace ou dans le corps, précepte ouvrant sur une grande liberté formelle à l’intérieur d’une structure donnée, repose autant sur Cunningham que sur les recherches de Trisha Brown, notamment ses Early Works, recréés à Montpellier danse en 2007. Et si certaines Etudes de Murray peuvent rappeler les recherches d’Etienne Decroux, dans le fait qu’elles établissent une grammaire du corps et peuvent basculer vers des gestes concrets issus des sports ou du quotidien, ce trait les lie également à la danse post-moderne.
Thomas Hahn
38e édition de Montpellier Danse
Exposition Trisha Brown, une Américaine à Montpellier : Jusqu’au 7 juillet, Salle Béjart / Agora (entrée libre)
Commissaire Agnès Izrine, avec la collaboration de Fabrice Ramalingom et la complicité de Lise Ott.
Photos : Laurent Philippe et Marc Ginot
Coordinnation Anne-Sophie Aamodt, assistée de Lisa Faure-Joassard
Scénographieque, technique : Didier Estrade
Lire notre critique d’ Atlas / Etudes de Michèle Murray :
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