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« FIQ (réveille-toi !) » par le Groupe Acrobatique de Tanger

La nouvelle revue marocaine entre danse et acrobatie en met plein les yeux.  Où l’envie de liberté emporte tout. 

Ce spectacle est un manifeste joyeux et assez irrésistible. Disons même que son effervescence libératrice est telle que l’injonction faite dans le titre ne sonne pas creuse. La sensation d’assister à un réveil est réelle. Dans Fiq (Réveille-toi !),  la liberté s’exprime par le corps, par les mots et par les couleurs, chauffés par le DJ Key de Casablanca, une vedette en son pays. Venant de disciplines aussi diverses que l’acrobatie au sol, la danse break, le taekwondo et le foot freestyle, les acrobates spécialement recrutés pour cette création tournent désormais partout en France, et ont fait halte à Paris fin juillet, dans le cadre du festival Paris l’été. C’est là que nous avons découvert leur show époustouflant.

Circographie

Dans Fiq (Réveille-toi !), la danse est si présente que la troupe pourrait tout aussi bien s’appeler Groupe Chorégraphique de Tanger. Ils font pourtant du cirque, créant des pyramides, en virevoltant à moto en jouant au ballon, en manipulant tapis ou agrès et en poussant les plafonds symboliques. Et font irruption dans un univers placé sous le terme de circographie, avec une référence claire à la danse, néologisme inventé par la circassienne Maroussia Diaz Verbèke, cofondatrice historique du collectif Ivan Mosjoukine. C’est elle qui met en piste le spectacle. 

Le reportage de FR 3 sur Fiq ! 

Dans l’univers du cirque chorégraphique, le Groupe Acrobatique de Tanger, sous l’égide de la vaillante Sanae El Kamouni, est devenu une référence internationale. En 2016 ils avaient impressionné avec Halka, une création collective qui les sortait de la sphère d’influence des chorégraphes européens (Aurélien Bory pour Taoub en 2003 et Azimut en 2013, Zimmermann De Perrot pour Chouf Ouchouf en 2009) – pour y retourner en 2020 avec une équipe auditionnée spécialement pour la création d’un spectacle où toutes les disciplines chorégraphiques et acrobatiques se mélangent et créent un tout, en incluant la musique live et la scénographie de manière particulièrement organique. C’est donc ça, la circographie…

Plafond de verre? Pas ici. 

Réveille-toi ! – L’injonction est à entendre de multiples manières. Bien sûr que l’énergie de troupe réveillerait le plus somnolant. Mais l’appel est aussi adressé à un pays, à ses femmes, à toute personne encore en mesure de se révolter face aux injustices sociales. Car Fiq  passe aussi par un débat au second degré, sur le respect des ressources naturelles, le droit à l’avortement et les inégalités sociales. « Le plafond n’existe pas », disent-elles. Car Fiq est un spectacle formidablement optimiste, où l’énergie de la jeunesse donne effectivement l’impression de pouvoir soulever des montagnes. Pour le moins, ils – ou plutôt elles – font sauter le plafond de verre. Les quatre filles de la troupe – douze acrobates au total – prennent le devant et en imposent, donnant l’impression de compter au moins pour la moitié de la distribution. 

Galerie photo © Hassan Hajja

Aux présences scéniques fortes s’ajoutent les prouesses, dont bien sûr les traditionnelles pyramides humaines à la marocaine, des unissons sobres et pleins d’entrain, jonglage, moto et danses urbaines, pendant de DJ Key mixe tous les styles, de l’oriental au symphonique. Mais c’est aussi la présence du quotidien qui donne sa couleur à ce spectacle et le rend si particulier. Car Fiq  compose avec le réel, grâce à la scénographie de Hassan Hajjaj. Plasticien et artiste visuel, il intègre tissus marocains et une centaine de caisses de boissons rouges qui servent même d’agrès aux acrobates. Des caisses authentiques, usées, ayant servi pour le transport d’une limonade noire américaine au goût de père noël. Et on les retrouve dans les photos de Hajjaj, où cette fois les circassiens amènent leur propre réalité à l’intérieur d’une œuvre visuelle ludique, créant une autofiction photographique. Ici, le cirque traverse aussi l’écran de verre.  

Thomas Hahn

Festival Paris l’été, le 28 juillet 2021

Mise en scène/circographie : Maroussia Diaz Verbèke

Avec : Najwa Aarras (porteuse, contorsion), Mohamed Takel (acrobate au sol), Samir Lâaroussi (porteur), Hamza Naceri (acrobate au sol), Hammad Benjkiri (porteur), Manon Rouillard (voltigeuse, équilibre, acrobate au sol), Youssef El Machkouri (porteur, acrobate au sol), Tarik Hassani (taekwendo, voltigeur, acrobate au sol), Hassan Taher (acrobate au sol, équilibre), Bouchra El Kayouri (acrobate aérienne), Ayoub Maani (breakdanseur, acrobate au sol, équilibre), Zhor al Amine Demnati (danseuse hip-hop), Ilyas Bouchtaoui (footfreestyle, danseur), Achraf El Kati (acrobate au sol), Nora Bouhlala chacón (acrobate aérienne) et Dj Key

En tournée : https://groupeacrobatiquedetanger.fr/agenda/agenda

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