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Festival June Events #10

June Events fête ses 10 ans ! Le festival créé par Carolyn Carlson œuvre pour la construction de liens intelligents entre musique et danse, dans une curiosité mutuelle. Pour cette édition anniversaire, Anne Sauvage, la directrice du festival et de l’Atelier de Paris, présente de nouveau une programmation très internationale, dans un bel équilibre entre découvertes et retrouvailles.

Les rapports actuels entre chorégraphes et compositeurs, entre danseurs et musiciens, sont débarrassés de toute hiérarchie. Chaque langage est à l’écoute de l’autre. Des chorégraphes comme Maud Le Pladec ou Alban Richard font de ces échanges la raison d’être de leurs créations. Et certains ensembles musicaux réservent une belle part de leur activité à la collaboration avec des compagnies chorégraphiques.

Un bon exemple : L’ensemble Ictus, très lié à Rosas et Anne Teresa de Keersmaeker, ici dans une collaboration avec Maud Le Pladec qui crée Concrete, pièce pour cinq danseurs et neuf musiciens, annoncée comme  « une forme hybride entre chorégraphie, lightshow et opéra contemporain. » Ce signifie que le champ de l’écoute mutuelle s’élargit davantage et intègre les éclairages comme troisième élément actif.

 

A Paris on vient de voir des membres d’Ictus avec les danseurs de Rosas au Centre Pompidou et puis, très récemment, aux Rencontres Chorégraphiques, dans Meyoucycle d’Eleanor Bauer (chorégraphe) et Chris Peck (compositeur). Mais Concrete est la première création dans laquelle ils seront en surnombre par rapport aux danseurs.

Alban Richard aussi fait du lien aux musiciens le point de départ de sa création. Nombrer les étoiles est sa deuxième pièce, après Et mon cœur a vu à foison, à se pencher sur l’art médiéval. Les musiciens appartiennent ici à l’ensemble Alla Francesca, et la chorégraphie prend appui sur l’écriture musicale. Les notes entrent dans les corps, par deux voies en même temps.


 

La danse est à l’écoute

Bien sûr, la danse a toujours été à l’écoute de la musique. Trop peut-être, soumise même, jusque dans le ballet romantique. Les révolutions stylistiques des années 1960/70 l’ont définitivement émancipée de cette tutelle. Si aujourd’hui la danse se met à l’écoute des sons, elle le fait en toute indépendance et réinvente son lien avec la musique.

Par cette nouvelle manière d’écouter, elle a ouvert ses récepteurs sur d’autres disciplines et renforcé  son attention pour toutes les sphères des arts et de la vie. La programmation de June Events révèle donc à quel point la danse est à l’écoute du monde.

A l’écoute de l’espace. « Prendre la dimension d’un espace, et en éprouver corporellement le cadre et l’architecture » : 55 est un solo dans lequel Radouan Mriziga, danseur, chorégraphe et performeur issu de P.A.R.T.S. et installé à Bruxelles, fait de son corps l’instrument de mesure et de lui-même l’arpenteur.

 

Et de deux : Thomas Hauert, actuellement en résidence à Charleroi Danses, fait appel à l’IRCAM pour travailler sur les musiques de George Gershwin et Mauro Lanza dans Inaudible, création pour six interprètes qui se mettent à l’écoute du temps et de l’espace pour donner aux danseurs une expérience comparable à celle des musiciens.
 

A l’écoute du temps. Dans Jamais Assez, Fabrice Lambert explore les profondeurs, celles du temps par exemple : 100.000 ans, prévus pour l’enfouissement de nos déchets nucléaires dans une grotte en Finlande. Comment faire résonner un tel espace-temps dans nos corps? Ils sont dix sur le plateau à le ressentir : Lire notre critique

A l’écoute de la danse. Ah oui ? Parfaitement ! Et cela n’a rien de naturel. Du moins dans L’Aveuglement de Mylène Benoît, qui a invité ses trois interprètes à « écouter la danse » plus encore, par une contrainte particulière et contre nature. Depuis les répétitions, les danseurs ont les yeux bandés ! C’est dans la construction d’un noir total qu’ils construisent l’échange avec la musique (en live par deux musiciens) et la création lumières. Et les oreilles se mettent à voir...

A l’écoute de la nature. De plus en plus, les chorégraphes s’identifient à la fonte des glaces et autres dérèglements climatiques. Nous avons déjà dit ici tout le bien que nous pensons de Seeds (retour à la terre) de Carolyn Carlson, fable écologique pleine de poésie, déclaration d’amour aux arbres et à l’avenir, merveilleux spectacle pour tous les âges. Lire notre critique

 

A l’écoute de l’autre. Après avoir dansé dans les compagnies de Nathalie Pernette et Tomeo Vergès, Sébastien Laurent fonde sa compagnie dont il présente ici la première pièce : Contagion, une enquête chorégraphique sur la communication entre les êtres, l’empathie et le processus qui fait passer une émotion d’une personne à une autre ainsi que sur les comportements associés à ce processus.

 

A l’écoute de la géopolitique. Kat Válastur, chorégraphe-performeuse grecque travaillant à Berlin, se penche sur le roman Pétrole de Pier-Paolo Pasolini. Le but n’est pas une adaptation chorégraphique, mais une métaphore de l’état d’un Occident dépendant de l’or noir, déclencheur sous-jacent des conflits financiers et militaires. Oilinity, c’est la fureur du rap et l’énergie guerrière.

A l’écoute de l’identité. Avec la Montréalaise Dana Michel, June Events invite la shooting star de la danse contemporaine outre-atlantique.  Elle vient avec son solo Mercurial George et son concept d’improvisation intuitive, à partir de tout ce qui constitue l’identité d’un individu, de ses origines à son vécu.

 

Focus Québec/USA : Une création mondiale de Benoît Lachambre
Ce festival dans le festival se présente sous le titre de Transatlantique, et il va de soi que Dana Michel fait partie de ce line-up montréalais qui inclut la première mondiale d’un nouveau solo de Benoît Lachambre. C’est la raison pour laquelle on n’en sait rien, sauf ce qu’il en dit lui-même : Lifeguard, performance intimiste et déambulatoire est le premier volet d’un triptyque décortiquant la notion de présence et la résonance du mouvement. Pièce dédiée à créer un espace intime dans lequel le spectateur occupe une place à part entière, Lifeguard s’adresse à des espaces permettant un contact rapproché entre le public et le performeur. »

A noter aussi la présence de Frédérick Gravel, qui présente pour la première fois en France This duet that we’ve already done (so many times), un duo à la fois sensible et puissant, qui laisse voir une facette inattendue du chorégraphe. Lire notre critique

Côté USA, on retrouve DD Dorvillier, dont on a pu apprécier la passion et la rigueur, à June Events et aux Rencontres Chorégraphiques. Elle décrit ses Extra Shapes comme un concert pour haut-parleurs et un lightshow, qui s’articulent autour des danseurs. Et on apprend par The Kitchen, lieu new-yorkais de la première mondiale, que cette pièce est faite de trois boucles, l’une musicale, l’autre lumineuse et la troisième chorégraphique, sachant qu’elles sont répétées trois fois, et que c’est le public qui change de place pour chaque activation.

 

Dix ans, et de nouvelles idées : Premières Parties
La nouveauté de June Events 2016 réside dans l’ouverture aux projets en cours. Avec la Japonaise Anan Atoyama, la Grecque Katerina Andreou et les Françaises Aurélie Bertrand et Elodie Sicard, quatre chorégraphes pleines de promesses invitent le public à réagir aux ébauches d’œuvres en devenir. Un temps d’échanges est prévu après les représentations.
Et puis, June Events se balade, dans le 12e arrondissement et au-delà, avec des spectacles à Vincennes, au Musée Picasso, au Jardin de Reuilly, à Bercy Village, au Musée de la Chasse et de la Nature et plus encore.

Thomas Hahn

Festival JUNE EVENTS, du 8 au 13 juin 2016.
CDC-Atelier de Paris-Carolyn Carlson, 2, route du Champ de Manœuvres, 75012, Paris. Tél. : 01 417 417 07

Programme complet : http://atelierdeparis.org/junevents/programme/
 

 

 

 

 

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