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« La Grotte » de Pol Pi : l’Appel des entrailles

Une visite guidée dans les rites et métaphores de la fertilité, entre gravures pariétales et poésie du désir.

Une grotte, un guide et huit cent gravures: figures humaines, organes génitaux féminins et masculins, animaux de toutes espèces, et avant tout des chevaux ... En 2022, Pol Pi a entamé son exploration de la Grotte des Combarelles dans la Vallée de la Vézère, guidé par Monique Veyret, l'experte absolue de cet endroit magique. Dans La Grotte, solo multi-facettes, il partage avec nous ses découvertes, et traverse tous les états de son aventure. Il est le guide et la grotte, le visiteur et ses fantasmes, les dessins et leurs motifs. Il se transforme en cheval par son corps et forme les organes et leur accouplement, en argile et par des images projetées sur son ventre.

L'homme-orchestre, aussi présent que préhistorique, se confond avec les lignes de dos, les crinières, les bouches… gravées dans la pierre il y a treize mille ans. Il s’adresse à son amant imaginaire par des lettres d'amour, vers composés pour séduire, et joue avec la transe amoureuse. « Tu restes gravé en moi » et « nous avons inventé nos propres rites de fertilité » ne sont que deux citations, et pas les plus explicites, dans lesquelles la visite des peintures rupestres se confond avec un voyage à travers le corps et les désirs, sous influence des gravures représentant les animaux : « Mon cœur est parti en galop ».

Lorsque l’on explore une grotte, avancer ne signifie pas s'approcher d'un horizon, mais pénétrer des entrailles. Aussi Pol Pi propose une balade métaphorique qui finit par prendre une forme concrète et plastique, où le public est invité à se rassembler autour du protagoniste pour mieux suivre les images qui explorent une vulve imaginaire et voir le ventre nu produire l'illusion d'une grossesse. Par cette réalité corporelle augmentée, le voyageur n'explore pas le corps de Pol Pi (anciennement Paul/a), mais ses désirs les plus secrets: tomber enceint.e pour ne plus vivre un exil corporel mais juste un exil intérieur. La grotte devient le lieu où l’on se recentre pour renouer avec son intimité.

Aussi La Grotte de Pol Pi n'est pas ce qu'on appellerait spontanément un « spectacle de danse ». Plutôt une performance, une évocation, la recherche d'une forme pour creuser l'individuel au plus profond pour atteindre l'universel en ses zones les plus obscures et les éclairer en douceur. Casque, lampe, corde et combinaison sont l'équipement qui permet d'embarquer le spectateur sur ce voyage en sphères intérieures. Pour ensuite se débarrasser de tous ses ustensiles, épouser la condition de cheval et évoquer par-là sa transe auto-induite, vécue lors de ses visites aux Combarelles. Mais pas sur scène, ça va de soi.

Le guide comme son groupe de visiteurs ont besoin d'imagination contrôlée pour suivre les pas du guide sans se perdre dans l’imaginaire. Pol Pi l’a déjà fait, au cours de ses recherches, en se laissant aller vers des moments de transe et de transformation. Nous nous contentons volontiers d’assister à ses galopades, de corps et de cœur. Où la grotte devient un lieu d’accueil et de chaleur, invitant chacune et chacun à inventer ses propres rites de fertilité. La Grotte est un acte de poésie préhistorique pour fertiliser l’avenir.

Thomas Hahn

Vu le 3 octobre 2024, La Briqueterie CDCN, festival Les Excentriques

Conception, interprétation : Pol Pi

Regard extérieur : Tamar Shelef

Création sonore : Gilles Amalvi

Création lumière : Rima Ben Brahim

Création costumes : La Bourette

Recherches plastiques : Alicia Zaton

Images : Tomas Cali

Transmission/accompagnement en transe cognitive auto-induite : Corine Sombrun/TransScience Research Institute

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