Entretien avec Eric Wurtz
A l'occasion de la reprise de Record of ancient things (2017) de Petter Jacobsson et Thomas Caley dans le cadre du programme Plus Plus à l'Opéra de Nancy, nous avons demandé à Eric Wurtz, créateur de la lumière de la pièce, de nous parler de son travail avec le duo de chorégraphes.
Danser Canal Historique : Vous avez créé la lumière du ballet de Petter Jacobsson et Thomas Caley Record of ancient things (2017).
Eric Wurtz : Je collabore avec Petter Jacobsson et Thomas Caley depuis quelques pièces. Nous avons commencé à travailler sur la question de la transparence avec un dispositif mis en place pour Plaisirs inconnus (2016) : un rideau de filtres de couleur en avant-scène. Pour Record of ancient things, Petter et Tom ont imaginé une scénographie à base de filtres transparents. Et nous avons décidé d’utiliser des filtres gris neutre.
DCH : Comment a été conçu cet éclairage ?
Eric Wurtz : Les filtres gris permettent non seulement la transparence mais surtout, des effets de réflexion très particuliers. Leur matière permet d’obtenir une série d’éclats de lumière qui se multiplient comme dans un écrin baroque. En quelque sorte, c’est aussi un travail sur le baroque.
DCH : Ce résultat est obtenu avec deux petites lampes, ce qui est une prouesse !
Eric Wurtz : Oui. Par pur effet géométrique des lois de la réflexion.
DCH : Et avec quel type de lampes ?
Eric Wurtz : Ce sont simplement deux lampes à incandescence qui sont parfaitement disposées. Il n’y a pas que ça, naturellement ! Ces deux lampes sont positionnées au niveau du manteau. On a des pendrillons en filtres neutres, un grand fond dans la même matière et, en plaçant ces deux lampes à l’avant-scène, derrière le cadre, on ne les voit pas depuis la salle mais leur image est réfléchie dans tous les plans successifs. C’est ce qui crée cet effet de miroir, de galerie des glaces, en quelque sorte.
Galerie photo © Laurent Philippe - Eric Wurtz
DCH : Le système a été mis au point avant ou après la chorégraphie ?
Eric Wurtz : Nous avons d’abord expérimenté le dispositif, pas entièrement mais, en tous les cas, avant la chorégraphie. Après, ils ont écrit la chorégraphie et cela a été à moi de faire correspondre des états de lumière à des états de danse.
DCH : La musique est-elle venue avant ou après la lumière ?
Eric Wurtz : En même temps. Peter Rehberg l’a composée au fur et à mesure et a livré à Petter Jacobsson et à Thomas Caley des sections.
DCH : La musique est-elle déclenchée en même temps que la lumière ?
Eric Wurtz : Non. Il n’y a pas de lien automatique.
Galerie photo © Eric Wurtz
DCH : Evidemment, il y a d’autres effets lumineux. Par exemple, par moments, on voit les corps en transparence, éclairés en plongée. Il n’y a donc pas uniquement deux lampes...
Eric Wurtz : Oui, bien sûr. Mais le dispositif reste relativement simple et joue sur ces deux facteurs : transparence et réflexion.
DCH : Réflexion dans la tête, aussi !
Eric Wurtz : Aussi, bien entendu !
DCH : Les reflets de lumière produisent un mirage, un peu comme dans le numéro de Busby Berkeley pour le film Wonder Bar (1934) qui démultiplie à l’infini des danseurs encerclés de miroirs, sans que le spectateur ne voie le reflet de la caméra.
Eric Wurtz : Oui, il y a une forme de continuité dans le travail de Petter Jacobsson et Thomas Caley autour de la réflexion spéculaire. Dans la prochaine pièce il sera question de miroirs opaques.
Propos recueillis le 16 novembre 2018 par Nicolas Villodre
Record of ancient things, présenté dans le cadre du programme Plus plus les 14, 15, 16 et 18 novembre à l’Opéra national de Lorraine, à Nancy.
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