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24e édition du festival Artdanthé
Le festival Artdanthé, rendez-vous d'une danse très « à la pointe de la recherche » assume, pour sa 24eédition, un retour à ses fondamentaux.
Évidemment, entre les annulations, confinements et reports divers, la lisibilité d'une programmation ne va pas de soi. Ainsi le festival Artdanthé qui se déroule du 12 mars au 3 avril à Vanves, entre la salle du théâtre, celle de la Panopée et, petite innovation, quelques nouveaux lieux comme le Conservatoire ( l'auditorium, baptisé l'Ode, mais aussi les espaces extérieurs, par exemple pour L'Epouse de Rebecca Journo, le 2 avril) ou le Générateur de Gentilly (une vieille connaissance) qui accueille la chorégraphe grecque Iris Karayan (le 23 mars).
Avec près d'une trentaine de propositions en trois semaines, le festival permet une traversée des tendances les plus diversifiées, tout en restant concentré sur l'univers de la danse.
Véritable, quoique petite institution (au regard de ses moyens), Artdanthé qui compte déjà 24 éditions au compteur, a déjà connu quelques inflexions dans son orientation. A la fin de son mandat, son fondateur, José Alfaroba, avouait son intérêt pour le théâtre et les formes très théâtralisées ce qui pouvait se traduire par une certaine baisse du soutien aux divers courants chorégraphiques. A son arrivée à la tête du théâtre, et partant du festival (le théâtre de Vanves est l'unique opérateur de la manifestation qui n'a pas de budget spécifique), Anouchka Charbey, pourtant d’obédience plutôt musicale, annonçait qu'elle souhaitait des éditions « Plus courte(s) et recentrée(s) sur la danse ». Naturellement on ne demandait qu'à la suivre et c'est là que la situation s'est un rien grippée, en raison des vicissitudes sanitaires !
L'Epouse de Rebecca Journo
Tout cela semble dépassé et dès l'éditorial, la directrice assume et assure : « Le festival renoue avec les spectacles « grand format » peu présentés lors des précédentes éditions »… Manière de reconnaître que pendant quelques temps, la place fut belle pour les formes très expérimentales issues de la performance, au détriment, parfois, d'autres approches esthétiques. Si cette inflexion » se fait avec une certaine modération (Artdanthé est encore largement à l'abri du reproche de facilité) en revanche, le choix de la diversité des formes chorégraphiques et l'insistance sur la danse est patente. Anouchka Charbey le reconnaît sans aucune hésitation, « nous avons beaucoup travaillé en équipe et nous avons vraiment décidé de consacrer Artdanthé à la danse.. »
Mais la manifestation ne renonce pas pour autant à la recherche de nouvelles écritures, pas plus qu’au soutien d’artistes émergents ou de ceux qui seraient passés sous les radars. Ainsi le belge Michiel Vandevelde, 31 ans, danseur et chorégraphe formé à P.A.R.T.S., et qui n'a pas vraiment monopolisé les scènes hexagonales. Il vient pourtant d’être nommé co-programmateur scènes du Singel à Anvers, ambassadeur culturel de la ville de Louvain et vient d’ achever cinq ans de résidence au Kaaitheater… Outre ce brillant curriculum Vandevelde arrive avec un projet plus qu'intriguant : The Goldberg variations, soit le chef d'œuvre de Bach interprété à l'accordéon et dansé par deux danseurs très « keersmakériens » et un troisième, porteur de trisomie et d'une énergie débordante qui pousse tout le monde.
Et comme le veut le concept même du festival, il y a un second spectacle dans la même soirée. Jedeya de Sofian Jouini est programmé ce même 31 mars et il s'agit-là de la traduction d'une tout autre réalité. D'une part, le chorégraphe est un compagnon de route du Théâtre de Vanves. Souvent venu en résidence, sa programmation illustre cette volonté de donner de la visibilité aux artistes qu'accompagne le théâtre. Esthétiquement, le fossé est large d'avec Vandevelde. Jouini, comme beaucoup de jeunes chorégraphes tunisiens, vient du hip-hop tout en prenant une réelle distance avec ce style ; il est aussi tenant d'une veine proche d'une certaine danse documentaire voire sociologique. Ici, il s'appuie sur des entretiens pour une pièce dont le titre signifie « Grand-mère » en tunisien…
On trouve ainsi, mêlés dans la programmation, de véritables ovnis, comme l'inclassable et toujours intrigante Christine Armanger qui s'attaque à l'Apocalypse de Saint-Jean (Je vois, venant de la mer, une bête monte, le 26 mars et en 30 mn, excusez du peu) ou encore des artistes bien repérés quoique clairement dans le domaine de l'expérimentation comme Marie-Caroline Hominal (Sugar Danse le 15 mars, le même soir que Joachim Naudet, plus connu comme interprète et qui engage une recherche créative avec Welcome).
Et des artistes « entre les deux », comme pour Chêne Centenaire composé et interprété par Marion Carriau et Magda Kachouche (22 mars), sorte de rituel étrange servi par deux artistes connues mais encore au début de leurs recherches et qu'il faut suivre. (Lire notre critique).
Des retrouvailles avec une manifestation au ton décidément particulier et singulier.
Philippe Verrièle
Festival Artdanthé : du 12 mars au 2 avril 2022
Image de preview : "Sugar Dance" - Marie-Caroline Hominal © Lukas Beyeler
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