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“Naked Lunch” de Guy Weizman et Roni Haver
Lors d’une fête en 1951 à Mexico, l’écrivain américain William Burroughs tue par accident son amour Joan Vollmer d’une balle dans la tête. Suite au traumatisme causé par ce drame, l’auteur publie, avec l’aide de ses amis Kerouac et Ginsberg, le roman Naked Lunch (Le Festin nu), censuré aux USA mais paru en 1959 en France.
Écrit largement sous l'influence de drogues hallucinogènes, d’héroïne et de cocaïne, Burroughs mêle drogue, politique, homosexualité, hallucinations, délire paranoïaque dans une danse de mots et de verbigérations déchaînés et puissants. Cette forme délirante se voyant scandée par une sorte de satire sociale nébuleuse.
Le Festin nu se veut une descente cauchemardesque dans l'esprit d'un junkie, transcendant la forme classique du roman en le déstructurant, maltraitant la forme et le fond, donnant chair à ses divagations morphinisées dans des allégories oscillant de la science-fiction à la tragédie, parlant de modifications corporelles, d'orgies, de complots et de créatures angoissantes, dans un pays étrange, lieu de toutes les folies, nommé Interzone.
Sur une partition de Yannis Kyriakidis et un texte d’Oscar van Woensel – membre du collectif théâtral néerlandais Dood Paard –, Guy Weizman et Roni Haver ont mis en scène une véritable orgie, une polyphonie de voix difformes et une chorégraphie de corps acrobates.
Entre danseurs, musiciens et chanteurs, on assiste à une impressionnante mise à mort extrêmement bien réglée et parfaitement bien exécutée. Avec des panneaux mobiles qui créent des situations de plus en plus étranges, sordides et malsaines, une multitude de séquences se succèdent dans un rythme effréné avec pour fil conducteur : comment va se dérouler le passage de la vie à trépas.
Il s’agit ici d’un spectacle total et ce, sous toutes ces formes. La puissante et excellente musique avec de nombreuses percussions et mixages qui créent l’ambiance si noire, les superbes chants angoissants, la danse très ardue et stricte qui oscille entre néo-classique et style très contemporain avec des arrêts brutaux qui donnent le sentiment qu’effectivement, tout, soit la vie, peut s’arrêter d’un coup.
Le texte sur-titré conte cette horrible et immorale histoire avec des phrases courtes et percutantes.
Entre mariachis, tequila et héroïne, Guy Weizman et Roni Haver ont composé une pièce choc où rien n’est laissé au hasard et où tout est crûment dit et pensé sur la folie, les fantasmes, la drogue, la déchéance morale, le sexe, la violence et la peur avec, aussi, de nombreuses notes d’humour.
Sophie Lesort
Vu à Chaillot le 6 avril
Chorégraphie : Guy Weizman, Roni Haver
Musique : Yannis Kyriakide
Texte : Oscar van Woensel (Dood Paard)
Percussions : Slagwerk Den Haag
Voix : Silbersee
Costumes : Slavna Martinovic
Décor : Ascon de Nijs
Lumières : Wil Frikken
Danse : Dunja Jocic, Roni Haver, Angela Herenda, Camilo Chapela, Sofiko Nachkebiya, Adam Peterson, Igor Podsiadly
Actrice, dramaturgie : Veerle van Overloop
Percussionistes : Pepe Garcia, Enric Monfort, Frank Wienk
Chanteurs : Steven van Gils, Tiemo Wang, Maciej Straburzynski
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