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La Belle Seine-Saint-Denis à Avignon

À la Parenthèse, une belle cour d’un hôtel du 19e siècle, se tient depuis cinq ans « La Belle Seine-Saint Denis » soit la promotion des artistes en résidence sur les scènes du 93. Cette année, on pouvait y retrouver, entre autres, Michèle Noiret, Fabrice Lambert et Gaëlle Obiégly et Mickaël Phelippeau avec trois jolies propositions pour les festivaliers matinaux, puisque les spectacles ont lieu à 10h.

Michèle Noiret : Palimpseste #1. Interprète de Karlheinz Stockhausen (elle a interprété durant près de quinze ans un système de notation des mouvements intégré à ses compositions musicales), Michèle Noiret conçoit en 1997 une pièce en son hommage, Solo Stockhausen. Avec une parfaite maîtrise du geste et une présence fascinante, elle livre alors une danse inoubliable. Inspiré par cette pièce, le cinéaste belge Thierry Knauff compose Solo (2004), un film radical sublimé par une somptueuse photographie en noir et blanc.

C’est à partir de ce film, que Michèle Noiret décide de reécrire sa chorégraphie. D’où ce titre de Palimpseste cette technique du Moyen-Âge qui consistait à gratter un parchemin pour le réutiliser.

Dans Tierkreis (Zodiaque), partition pour clarinette et piano, Michèle Noiret dessine une chorégraphie diaphane, tissée dans les détails, qui semble s’écrire dans l’instant de son apparition. Petits pas serrés, chuchotis, semblent des échos lointains, des traces de mémoire qui passent par son corps comme pour le rassurer. Dans la plénitude de son art, chaque ligne qu’elle ébauche est d’une force, d’une clarté, qui éclaire les méandres du langage chorégraphique. Elle danse comme elle respire, au point que l’on finit par oublier que ces courbes délicates et fugaces n’appartiennent pas à des gestes quotidiens.

Photos : Sergine Laloux

Elle donne à sa gestuelle une signification ue le temps ne peut épuiser. Comme ces parchemins qui portent sous leurs phrases d’autres discours, effacés mais présents, elle est cet être passager d’une infinie légèreté, mais aussi cette femme élégante qui déploie dans une chorégraphie fascinante des fragments stylisés mais intelligibles. Rejointe à la fin par David Drouard qui doit reprendre le solo, se distille alors un duo plus nerveux, mais néanmoins dans la tonalité subtile de cette poésie musicale que Michèle Noiret assemble sous nos yeux.

L’incognito de Fabrice Lambert et de l’écrivaine Gaëlle Obiégly nous fait à coup sûr changer de registre. Réunis pour Condordan(s)e ce tandem construit une histoire à deux voix. Il y est question du corps. Face à Gaëlle Obiégly, installée dans un fauteil, surgit un homme sans visage, énigmatique et presque absent. Comme pour le fameux Spectre de la rose, on ne sait s’il est réel ou rêvé. Il ne laissera de sa présence que le mirage de ses gestes enfuis. Les mots peuvent-ils cerner tout ce que peut un corps ? Peuvent-ils s’y inscrire ?

Photos : Théâtre Louis Aragon

La gestuelle de Fabrice Lambert se prête à merveille à ce trouble poétique, avec ses ondulations, ses gestes esquissés, ses disparitions impromptues.

On se laisse facilement porter par ces présences silencieuses, cette dissipation du corps dans l’éther des mots.

Enfin, Avec Anastasia de Mickael Phelippeau raconte la singularité d’une lycéenne, Anastasia,  qui replonge dans son enfance. Au centre de sa (courte) vie, ses tresses qu’elle fait danser pour se calmer, et pour dire l’insu d’une violence vécue. Elle a dû fuir la Guinée en proie à un coup d’état. Mais elle se focalise plutôt sur les concours de « mini-miss » qu’elle a passés quand elle était enfant. Et que, manifestement, elle a gagnés !

photos : Théâtre Louis Aragon

Au départ, le scénario, pourtant bien réel, nous a paru plutôt plat. Mais peu à peu, on se laisse totalement happer par cette histoire racontée en creux, par cette personnalité rayonnante, énergique, courageuse. On finit bel et bien par être « avec Anastasia » cette jeune fille de 16 ans drôle et percutante.

Agnès Izrine

16 au 19 juillet 2025 La Belle Seine-Saint-Denis à La Parenthèse, Festival Avignon OFF

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