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Monnier-Figarella :"Soapera"

Dominique Figarella & Mathilde Monnnier : « Soapéra, une installation »

Une apaisante magie émane de l’énorme nuage de mousse blanche. L’effet ressemble à celui d’un paysage d’hiver, où la neige enrobe un silence éblouissant. Devenu installation, « Soapéra », créé comme spectacle frontal en 2010, est désormais lavé de tout soupçon de ne pas être un chef-d’œuvre.

Ultra-légère et d’une texture mystérieuse, une énorme soucoupe volante a atterri sur le plateau. Entourés des spectateurs, trois explorateurs vêtus de combinaisons noires plongent dans ses entrailles. Comment arrivent-ils à dégager de cette masse, aussi légère que compacte et qui pourtant se décompose au toucher, des nappes qu’ils portent en couvertures comme des sculptures ? Jamais le spectateur ne perce tout à fait l’énigme matérielle posée par Dominique Figarella. En ce sens, on peut penser à la « masse non-newtonienne » qui coule dans Curtain, collaboration entre le chorégraphe Jonah Bokaer et le plasticien Daniel Arsham.

Dans Soapéra, les danseurs font corps avec cette masse intouchable qu’on pourrait qualifier de « non pascalienne ». En faisant corps avec elle, émergent des formes phantasmagoriques en constante évolution, créatures hybrides et monstrueuses. La lenteur extrême de leurs pas confère à nos plongeurs une belle apesanteur. Vue de près, cette mousse est aussi finement tissée, aussi joliment brodée et apparemment aussi stable que la gaze des tutus !

À l’époque actuelle qui favorise, jusque dans la création chorégraphique, une surenchère de décibels et de violence cinétique, Soapéra oppose une résistance passive par la lenteur, comparable à celle revendiquée par Raimund Hoghe. On freine les élans sauvages, pour atterrir comme sur un tapis amortisseur. Aussi, cette installation exerce une force quasiment thérapeutique où l’empathie est immédiate. Pour le spectateur commence  alors un voyage intérieur, en chemin vers une sorte de yoga sensoriel. Ce manifeste anti-accélération se démarque d’autant plus des temps qui courent, qu’il émerge en pleins jeux olympiques d’hiver.

À la fin, les bulles ont presque toutes disparues. Reste une sorte de paysage lunaire, blanc comme un champs de neige et de glace, surface de projection idéale pour une création vidéo. Car il est vrai, la sortie de scène des trois danseurs nous ramène un peu trop vite vers le réel.  Soapéra a encore du potentiel pour une dimension supplémentaire.

Thomas Hahn

« Soapéra , une installation », création au Centre Pompidou, les 14 et 15 février 2014.

http://www.mathildemonnier.com

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