Suresnes Cités Danse : Amala Dianor, à la « Une »
En voilà « une » qui revient de loin. Lorsque l’an passé, Amala Dianor propose à Olivier Meyer de créer un duo malicieusement intitulé Une pour Cités danse connexions - tête chercheuse de Suresnes cités danse -, il imagine alors le portrait dansé de deux interprètes venues de mondes chorégraphiques différents.
« J’avais choisi la hip hopeuse Sandrine Lescourant (ex interprète de Standards de Pierre Rigal et Elles de Sylvain Groud, deux créations du festival) et la danseuse de formation contemporaine Marion Alzieu (elle a participé à la compagnie de Salia Sanou et est l’une des performeuse du récent Kalakuta Républik de Serge Aimé Coulibaly). Le projet initial se nourrissait de leurs contrastes. Au dernier moment et pour des raisons personnelles, la première n’a plus été disponible.
J’ai proposé à Sarah Cerneaux, avec qui j’avais dansé pour Abou Lagraa et dont j’avais admiré le talent dans les pièces de Vincent Mantsoé, Maryse Delente et Akram Khan - de la remplacer. Mais pour Marion Alzieu, dont le profil était très proche, le projet perdait son sens. Du coup, j’ai complètement changé d’orientation. »
Artiste associé au CDCN-Pôle Sud, Amala a animé au cours de l’année précédente des ateliers participatifs à Strasbourg avec le calligraphe Julien Lebreton aka Kaalam. Ce magicien de la lumière est passé maître dans l’art du light graff, ces installations spectaculaires de lettres lumineuses. Ses réalisations, sur des sites du monde entier, sont à la frontière de plusieurs univers : le dessin, la musique, la danse, les cultures arabe et latine. Elles font preuve d’une incroyable inventivité visuelle, qu’Amala décide de croiser avec l’énergie tonique de Sarah Cerneaux. « Je ne voulais pas repartir sur un autre duo dansé. J’avais envie de garder l’idée d’une confrontation mais en l’ouvrant à d’autres formes d’expression. J’ai donc invité Julien à mettre en valeur, par la calligraphie, les mouvements de Sarah. Pour lui aussi c’est un challenge, car il opère sur un terrain plus abstrait qu’habituellement. Il sera présent sur scène et créera en direct des vidéos projetées sur le plateau. La danse sera le trait d’union, d’où le titre de la pièce. »
Conçue pour le duo initial, la musique commandée au compositeur Awir Léon devrait, selon Amala Dianor, convenir à ce nouveau dispositif : « Elle est suffisamment libre et ouverte pour offrir plusieurs espaces créatifs ». Quant à la chorégraphie, elle conjuguera l’énergie du hip hop et la gestuelle contemporaine dans une écriture à la fois libre et stylisée.
Restait à convaincre de ce changement de pied inopiné le directeur du festival, Olivier Meyer : « Au début, lorsque je lui ai parlé de calligraphie, il était un peu sceptique. Mais dès qu’il a vu le site de Julien Lebreton, il a été conquis et a dit banco », se réjouit Amala. Lequel, en raison de tous ces imprévus, ne dispose plus que de deux semaines pour mener à bien ce projet ambitieux. Une avant-première est prévue le 25 janvier à Angers, ville qui - avec la DRAC et la région Pays de la Loire - soutient sa compagnie. Il restera ensuite quelques jours pour les ultimes finitions, avant les représentations des 10 et 11 février dans la salle Aéroplane du théâtre Jean Vilar. Les mêmes soirs, Amala présentera également son solo Man Rec, créé en 2014.
Un beau programme pour un artiste désormais reconnu, associé également au Centquatre à Paris et à Scènes de pays dans les Mauges jusqu’à la fin de la saison. 2018 sera d’ailleurs pour lui particulièrement fructueuse, puisqu’il préparera sa prochaine grande création.
Intitulée The Forgiven Stardust, elle est prévue pour janvier 2019 et co-produite par la Maison de la danse de Lyon, le Théâtre de la Ville, la Grande Halle de La Villette et Pole-Sud. « Ce sera encore une histoire de rencontre », explique-t-il avec gourmandise. « Cette fois entre des interprètes classiques, qui excellent dans leur discipline, et ce que j’appelle des danseurs hybrides, dont moi-même. Je voudrais emmener les premiers sur un terrain plus fragile que celui de la virtuosité afin de les révéler autrement ». De quoi attendre avec impatience l’année prochaine !
Isabelle Calabre
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