Spectacle de l'Ecole de Danse de l'Opéra de Paris
Elisabeth Platel a imaginé un programme tout en résonances et ramifications pour célébrer 40 ans de spectacles de l’Ecole de Danse et 30 ans d’installation à Nanterre.
Avec ce programme qui réunit Balanchine, Forsythe et Petipa revu et corrigé par Noureev, la directrice de l’Ecole de danse de l’Opéra de Paris a eu une idée aussi lumineuse que pédagogique. Le spectateur peut suivre facilement l’évolution du ballet de Balanchine à Forsythe, avec ses déhanchements et ses lignes étirées que le premier initia et le deuxième poussa à l’extrême, mais aussi voir d’où tout ce vocabulaire provient. Le choix de Raymonda en la matière n’est pas neutre, car on retrouve dans les épaulements et dans les allongements de certains mouvements, notamment dans la variation d’Abderam, mais aussi dans les variations de Raymonda et d’Henriette, à partir de quelle base de nos deux chorégraphes du XXe siècle vont travailler.
Photos : Francette Levieux /OnP
Le Divertimento N°15, chorégraphié par George Balanchine sur l’œuvre de Mozart, est apparemment seulement d’un classicisme à toute épreuve. Mais la célérité des enchaînements, les accentuations d’épaulement, le raccourcissement de certains pas, les étirements de certains autres, et bien sûr, les légers basculements du bassin sont du pur Balanchine. Pour des élèves, le style n’est pas si facile à attraper et interpréter de manière juste : il faut savoir s’éloigner du pas d’école tout en y revenant à temps !
Ceux de l’Ecole de Danse de l’Opéra de Paris, coachés par Nanette Glushak, sont parvenus à maintenir ce subtil équilibre avec brio. On a pu distinguer des personnalités, et même des caractères, dans cette œuvre qui ménage avec habilité les rapports entre les ensembles et les solistes.
Photos : Francette Levieux /OnP
Il aurait semblé impensable, il y a seulement quelques années, de faire interpréter The Vertiginous Thrill of Exactitude par l’Ecole de Danse. Vrai défi, la pièce périlleuse de William Forsythe est un festival de difficultés techniques mais demande tout autant de musicalité, de fine compréhension des différents styles auxquels Forsythe fait référence, bref, une intelligence du texte. Les élèves de l’Ecole de Danse nous ont littéralement époustouflés dans leur interprétation enlevée et leur prise de risque. Ils ont su se lancer sans retenue dans les séquences les plus virtuoses et surtout s’affirmer en tant qu’artistes le tout avec une joie à le danser manifeste.
Photos : Francette Levieux /OnP
Même constatation dans Raymonda. Un vrai challenge aussi pour une école, même si certains pas tricotés à la Noureev ont été un peu simplifiés. N’empêche. Il faut bien du courage quand on est tout.e jeune pour affronter seuls la scène de Garnier comme l’ont fait les solistes qui interprétaient Raymonda et Abderam, ainsi que Jean de Brienne, Henriette et Clémence. Mais la complication tient aussi dans le réglage des ensembles, dans l’homogénéité du Corps de ballet, le tout avec l’orchestre dans la fosse, et, en ce sens, c’est une vraie réussite. Outre la Czardas, les Pas de quatre ou de trois sont tirés au cordeau. Mais rappelons-nous qu’Elisabeth Platel a été la superbe créatrice du rôle de Raymonda à Paris, et que huit professeurs de l’école, qui ont tous dansé le ballet se sont fédérés pour le remonter.
Au-delà de son intelligence, de son audace, ce programme est un succès qui met particulièrement bien en valeur l’excellence de ses jeunes danseurs appelés à intégrer le Ballet de l’Opéra de Paris prochainement.
Agnès Izrine
Le 1er avril 2017. Opéra Garnier.
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