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Sylvain Prunenec à propos de « Zugunruhe »

A l'Atelier de Paris et dans le cadre de Faits d’Hiver 2017, Sylvain Prunenec crée le duo Zugunruhe, où il partage le plateau avec Tatiana Julien. Il en donne ici les premières clés.

Danser Canal Historique : Le mot de Zugunruhe est poétique et porte en sa prosodie l’état même de l’agitation intérieure qu’il désigne. Mais il est assez peu connu en Allemagne même. Comment êtes-vous tombé sur ce terme et pourquoi en avez-vous fait le titre de votre pièce ?

Sylvain Prunenec : J’ai eu la chance d’écouter, à l’église Saint-Merry, une très belle œuvre musicale du compositeur Stephen O’Malley, intitulée Gruidés. Je suis allé sur internet pour en savoir plus à propos de ces oiseaux migrateurs. En même temps, la crise des migrants était plus en plus présente dans la politique et les médias. En cherchant plus d’informations sur les migrants humains et les oiseaux migrateurs en même temps, je suis tombé sur ce mot que je trouve très beau. Ça parle d’inquiétude, de stress et de voyage en même temps. C’est ainsi que le titre est devenu l’objet même des recherches pour cette pièce. Mais attention, je n’ai pas travaillé avec la composition d’O’Malley, elle était juste l’un des éléments déclencheurs du spectacle.

DCH : Pour ce duo avec Tatiana Julien, vous élargissez au maximum le champ des phénomènes liés à la migration…

Sylvain Prunenec : Il y a bien sûr la migration géographique et le changement de lieu de vie. Mais nous nous intéressons ici plutôt au trajet qu’aux lieux de départ et d’arrivée. La migration entraîne une perte de repères et d’appui, et on espère pouvoir trouver d’autres appuis et repères. Il y a une reconfiguration psychique et mentale qui est ouverte au cours du trajet. Ensuite, il y a des moments dans la vie où, sans changer d’endroit, on est confronté à des crises qui obligent à changer sa manière de concevoir le monde et sa propre place dans le monde, à reconfigurer sa propre constellation de repères. Là aussi, on part sur des trajets, des trajets intérieurs. Il peut s’agir de la disparition de quelqu’un de très proche ou d’un licenciement qu’on subit après avoir travaillé toute sa vie dans une même entreprise...

DCH : Parlons maintenant de la manière dont vous avez abordé la recherche chorégraphique à partir de ces pensées au sujet de la migration.

Sylvain Prunenec : Nous avons fait un travail sur la marche, une marche longue, où malgré un certain allant, on avance assez lentement dans l’espace. Nous l’avons enrichie d’éléments chorégraphiques, dont des études de rythme, des mouvements de bras, des regards. Et puis nous sommes passés à un travail sur le glissé qui m’a beaucoup intéressé. Comment pouvons-nous avoir l’impression que le sol est glissant, que les appuis se dérobent sous nos pieds et que nous n’arrivons plus à nous diriger dans la bonne direction ? Comment transmettre cette impression au spectateur? Voilà qui amène une gestuelle et un corps assez bruts que nous introduisons plus tard, en seconde partie, dans une danse plus élaborée, plus vive et fluide. La pièce raconte donc comment on passe d’un corps contraint et brut à un corps plus déployé qui trouve un plaisir premier de la danse.

DCH : Tout ça fait évidemment penser au fait qu’aujourd’hui le monde lui-même semble perdre pied et ne plus savoir où il habite.

Sylvain Prunenec : J’essaye d’être à l’écoute du brouhaha de ce monde. Beaucoup de spécialistes nous annoncent que le déplacement des populations va encore s’amplifier dans les décennies à venir. Et les politiciens s’y intéressent bien trop peu, alors qu’il va falloir prendre ce problème à bras le corps.

DCH : Comment s’est fait la rencontre avec Tatiana Julien pour cette pièce? Aviez-vous déjà travaillé ensemble ?

Sylvain Prunenec : C’est notre première collaboration. Mais j’avais vu une de ses pièces antérieures et elle a vu ma dernière pièce de groupe. Et je l’ai vu travailler dans la dernière création d’Olivia Grandville, Combat de Carnaval et Carême (lire notre critique) pour laquelle j’ai apporté mon regard extérieur. J’ai été très marqué par la présence de Tatiana et sa façon de danser. J’apprécie aussi le fait qu’elle est déjà une chorégraphe avec une identité artistique affirmée.

Propos recueillis par Thomas Hahn

Zugunruhe, état d’agitation avant la migration

Création

CDC Atelier de Paris

20 & 21 janvier 2017 à 20h30

Samedi 21 à 16h
Autour de la création Zugunruhe de Sylvain Prunenec
En savoir plus
 

Zugunruhe à l'Atelier de Paris

http://www.atelierdeparis.org/fr

http://www.faitsdhiver.com/sylvain-prunenec/

 

 

 

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