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« Still Life » : Le Cirque Bang Bang jongle à Mimos

Entre le jonglage et la performance, si lien il y a, il passe par les arts plastiques. Entre le corps et les arts plastiques, le courant passe par le geste. À la racine du jonglage, on trouve la balle. À son extrémité contemporaine, on rencontre Elsa Guérin et Martin Palisse, duo formant le Cirque Bang Bang. Si les deux appellent Still Life leur performance de jonglage gestuel sur un tapis roulant, le paradoxe peut perturber.

Un Still Life, c'est une Nature Morte. A priori le jonglage en est le contraire, à savoir une incursion de la vie dans le monde des objets, une course vers le zénith pour un instant fugace arraché à l'éternité, sitôt conquis, sitôt perdu. Et justement, Guérin et Palisse jonglent avec les idées reçues. Forts d'un parcours international en arts de la piste auprès de Jérôme Thomas, Maksim Komaro ou autres Martin Schwietzke, ils ont développé une approche sous forte influence de la formation d'Elsa Guérin à l'École des Beaux-Arts de Clermont-Ferrand.

Galerie photo : Thomas Hahn

Jongler telle une œuvre d'art plastique et chorégraphique en même temps ! Il faut donc remplacer la quête de la surenchère spectaculaire par une conscience méticuleuse de chaque mouvement, de chaque position, de chaque articulation. Il faut réduire le nombre de balles au lieu de chercher le maximum. Il faut chercher la régularité au lieu des bravos, car le flux constant fait presque oublier la présence des balles.

Tout bascule. Spectacle frontal au lieu du rond de cirque traditionnel. Jongleurs défilant en profil, sur un tapis roulant au lieu de sourire au public. Comme sortis des pages d'un magazine de mode ils ressemblent à des mannequins qui s'animent. Le tapis roulant leur permet des effets instantanés d'accélération ou d'arrêt apparent. Ils doivent intégrer dans leur jonglage soit le déplacement automatique, soit la vitesse de marche nécessaire pour rester en position. Et soudainement, ils se montrent en position frontale, de dos ou à l’horizontale.

Galerie photo : Thomas Hahn

Sur le tapis en mouvement, ils avancent en unisson, se croisent ou s'éloignent, ni tout à fait en Moonwalk, ni tout à fait dans la précision exigée par un Bob Wilson. Mais ils en donnent une idée et proposent un lien entre les deux, à travers la balle de jonglage qui impose sa loi, malgré tout. Quand ils avancent ou reculent comme par magie, leur tracé est celui de la caméra en traveling. Sauf qu'ils sont eux-mêmes l'objet visé, par un millier d'yeux.

Still Life revisite l'idée du déplacement latéral incessant, expérimentée par Aurélien Bory dans Plus ou moins l'infini, Guilherme Botelho (CIe Alias) dans Sideways Rain ou encore Anne Nguyen dans Promenade obligatoire. Mais jamais la gestuelle n'a été aussi épurée que dans Still Life qui représente une recherche formelle et une réflexion sur le rapport au temps et au couple, loin du divertissement circassien classique. Et cette nature pas si morte devrait peut-être durer une heure au lieu des vingt minutes actuelles, puisque les recherches répétitives et minimalistes ne déploient tout leur potentiel captivant qu'au bout d'un certain temps, quand le spectateur finit par oublier le temps. Vingt minutes ne suffisent pas pour convaincre un public venu trouver le divertissement spectaculaire du cirque. Peu leur importe l’avancée que représente une création gestuelle de recherche à travers le cirque contemporain. À suivre…

Thomas Hahn

www.mimos.fr

http://www.cirquebangbang.fr/

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