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Spectacle de l’École de Danse : Les petits rats retrouvent l’Opéra

On ne pouvait que se réjouir d’assister à l’une des représentations du spectacle donné du 12 au 16 avril par les élèves de l’École de danse de l’Opéra de Paris.

Tout d’abord parce que, pandémie et confinements obligent, la dernière occasion de ce type remontait à trois ans. Ensuite, parce que prendre le pouls de l’école où sont formés les futurs danseurs du ballet est toujours profitable, en ce qu’il donne à voir le visage de la compagnie à venir. Enfin, parce qu’on boude rarement son plaisir devant des ballets impeccablement montés, répétés avec le concours des étoiles de l’Opéra enseignant à l’École (Yann Saïz, Carole Arbo, Wilfried Romoli), et qui de surcroît donnent à certains, que l’on aura désormais envie de suivre, l’occasion de se distinguer. Ajoutons que la jeunesse était aussi à l’honneur dans la fosse puisque l’orchestre, dirigé par le chef Yannis Pouspourikas, était composé des lauréats du Conservatoire. 

Pour toutes ces raisons, la soirée du 14 avril au Palais Garnier scellait des retrouvailles attendues et appréciées. Ouverte avec La Somnambule de Balanchine, un ballet théâtral et néoclassique apte à mettre en valeur les qualités d’interprétation des jeunes danseurs, poursuivie avec les Variations de Violette Verdy, bel exercice d’école, et conclue avec une Symphonie en trois mouvements, du Néerlandais Nils Christe, dont l’énergie contemporaine était pleinement restituée, elle illustrait à merveille la palette des compétences techniques et artistiques développées au sein de l’École. 

Entré au répertoire en 1994, le premier ballet était présenté dans la version donnée en 1960 par le New York City Ballet (et non dans celle de sa création en 1946 par les Ballets Russes de Monte-Carlo au City Center de New York). Il conte, sur des airs de l’opéra éponyme de Bellini arrangés par Vittorio Rieti, l’histoire d’un poète courtisant une coquette lors d’un bal, puis se laissant séduire par une mystérieuse Somnambule, ce qui causera sa perte. On y remarquait notamment un Arlequin (Niels Morlot) ayant non seulement le physique dégingandé de l’emploi mais le ballon et l’expressivité qui transforment une courte variation en véritable moment de plaisir. De même, la danseuse orientale Chiara Chapelet faisait preuve d’une vraie présence, tandis que la Somnambule d’Anastasia Gallon avait la légèreté fluide du rôle.

Galerie photo © Svetlana Loboff OnP

Si la pièce centrale, suite de duos, trios, quatuors et ensembles sur des extraits des « Variations sur un thème de Paganini » de Brahms, interprétées au piano par Ellina Akimova, réclamait pour être pleinement appréciée une maturité stylistique et expressive que ne possédaient pas encore - et c’est normal - les jeunes élèves, on y notait toutefois les prestations de Nicolas Doaré et Vincent Vivet, deux danseurs que l’on retrouvait ensuite aux côtés de leurs condisciples dans le troisième et dernier ballet.

Pièce de groupe résolument contemporaine, créée en 1983 sur la partition d’Igor Stravinsky, celui-ci présentait une résonance sensible avec les bruits du monde puisque, comme l’avait rappelé la directrice de l’École de danse Elisabeth Platel, « c’est une symphonie de guerre ». Avec engagement et précision, les jeunes danseuses et danseurs donnaient vie à un enchaînement de compositions gestuelles évoquant les conflits et leurs victimes. Jamais, sans doute, depuis son entrée en 2008 au répertoire de l’École, cette Symphonie n’avait paru aussi actuelle. Belle démonstration de l’ancrage dans le présent d’une École qui perpétue une tradition vieille de plus de trois siècles, et point d’orgue réussi à un programme équilibré, stimulant, prometteur.

Isabelle Calabre

Vu le 14 avril 2022 à l’Opéra Garnier à Paris.

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