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« Ochres » par le Bangarra Dance Theatre

Le Musée du Quai Branly - Jacques Chirac invite la troupe australienne, engagée pour la cause des Aborigènes.

Le Bangarra Dance Theatre est à Paris, avec sa pièce fondatrice Ochres, jusqu’au samedi 8 octobre 2016. La troupe de Melbourne remonte ce ballet aux couleurs ethniques, plus de vingt ans après sa création. Pourquoi ?

Au début des années 1990 le gouvernement australien revoit sa copie et reconnaît officiellement les souffrances infligées aux Aborigènes, dans le passé et au présent. Il crée le concept de Creative Nation, qui vise une société inclusive où les Aborigènes sont des citoyens de plein droit.

C’est dans ce contexte que Steven Page fonde la Bangarra Dance Theatre, constitué de danseurs aborigènes et autres peuples originels d’Australie. En 1995, la compagnie crée Ochres, et la pièce devient un étendard de la lutte des Aborigènes pour l’égalité.

Depuis, le Bangarra Dance Theatre a constitué un joli répertoire de pièces dans un esprit de fusion entre cultures traditionnelles et création contemporaine, ce qu’elle avait prouvé à Paris il y a un an, lors d’une présentation d’extraits de plusieurs œuvres. Mais avec les vingt-cinq ans de la compagnie, est né le désir de remonter Ochres. Cela se comprend, mais le contexte n’est plus le même. Le discours politique et artistique en faveur des Aborigènes est devenu si consensuel qu’il est vidé de son sens. Et le monde de la danse a connu une forte évolution, en Europe comme en Australie. 

Aujourd’hui Ochres ne surprend plus et derrière le manifeste chorégraphique apparaît une idée de la danse qui n’évoque plus une avancée mais au mieux, du surplace. En quatre tableaux, cette pièce part, dans sa construction, ses unissons, ses portés, ses duos etc., du ballet occidental pour créer une sorte de théâtre de danse.

Ce n’est pas pour rien si le premier tableau, dansé par les femmes de Bangarra, évoque, par son lien à la terre et par ses costumes, le Sacre du Printemps vu par Pina Bausch. Sauf que ce Sacre a su garder toute sa force. Ochres, non. Pourtant, les enjeux pour les peuples du Pacifique ne sont aujourd’hui pas moindres qu’il y a vingt ans.

La forme sous laquelle le message, le cri en faveur des peuples originels de la région, devient audible aujourd’hui est à trouver chez Lemi Ponifasio. Le chef Samoan s’est installé à Auckland, en Nouvelle Zélande, d’où il croise sa culture traditionnelle avec la scène contemporaine d’une manière autrement efficace.

Cette reprise d’Ochres du Bangarra Dance Theatre est certes d’intérêt historique. Mais pas plus. Par contre, leur point de chute est bien choisi. S’il existe à Paris un lieu où ce spectacle peut faire sens, c’est bien ce musée situé Quai Branly, où les cultures traditionnelles trouvent refuge et encouragement.

A priori, Ochres a tout pour entrer en résonance avec la vague de créations européennes en danse contemporaine qui revisitent les danses traditionnelles et sociales. En vérité cependant, Ochres se situe aux antipodes de ces recherches. La pièce part de la danse américaine qui voue un véritable culte au corps, au mouvement incessant et à l’élégance, ici revus à travers des forces très telluriques.

Ensuite, on applique à cette charpente une coloration musicale et visuelle renvoyant aux cultures aborigènes. Mais une culture vieille de quarante millénaires, représentée sur scène par la dernière génération de ses descendants, aurait aujourd’hui la possibilité de s’affirmer avec plus d’audace artistique qu’à travers ce ballet ethnique qui vise finalement un goût esthétique très américanisé.

Thomas Hahn

Jusqu'au 8 octobre
http://bangarra.com.au
Musée du Quai Branly

 

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