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« Mountains » et « Islands » à Montpellier Danse : Entretien avec Jefta von Dinther

Un diptyque qui interroge l’avenir de la vie et de l’humanité dans deux créations avec le Ballet Cullberg de Stockholm. 

Danser Canal Historique : Vous avez étudié à Amsterdam et vous êtes aujourd’hui l’un des trois « chorégraphes maison » du Ballet Cullberg de Stockholm. Comment s’est passée votre rencontre avec la troupe et quelle est votre histoire avec elle ? 

Jefta van Dinther Islands  est ma cinquième création avec le Ballet Cullberg en dix ans. Au début, la directrice de l’époque, Anna Grip est venue voir un de mes spectacles à Stockholm. Je suis de nationalité suédoise, mais j’ai quitté la Suède pour mes études et j’avais perdu tout lien avec mon pays natal. Vers 2010 on m’a invité à revenir en Suède pour donner des cours à l’université. Et j’y ai aussi créé une pièce. C’est celle-là que la directrice du Cullberg est venue voir. Le lendemain elle m’a appelé pour me proposer d’animer un atelier avec la compagnie. Et j’ai recréé cette pièce avec le Cullberg.

DCH : Vous avez donc probablement une relation de longue date avec les interprètes ? 

Jefta van Dinther : Aujourd’hui, il n’y a dans la compagnie plus aucun danseur de l’époque de mes débuts avec elle. Quand j’ai créé On Earth I’m done : Mountains, Agnieszka Sjökvist Dlugoszewska, qui interprète aujourd’hui ce solo, était l’interprète la plus ancienne de la compagnie. Et elle a quitté la compagnie il y a quelques mois. 

DCH : Vous présentez à Montpellier Danse le solo Mountains et la pièce de groupe Islands, sous le chapô de On Earth I’m done. Il s’agit donc d’un diptyque ? 

Jefta van Dinther : C’est un dytique, même si à l’origine ce n’était pas prévu. Mais il y a eu beaucoup de reports à cause de la pandémie. A l’origine, je devais créer une pièce de groupe et je sentais que je n’avais pas encore épuisé le sujet. J’ai donc proposé à la compagnie de lier les thèmes des deux pièces qui peuvent maintenant être montrées séparément ou ensemble. Islands  est une pièce pour treize danseurs qui fait écho  au solo. 

DCH : Quelle relation se forme entre les deux pièces que vous montrez à Montpellier dans un même programme ? Quels en sont les questionnements ? 

Jefta van Dinther : La question centrale  est celle de la possibilité de vivre dans le  monde actuel. Comment pouvons-nous encore aimer ce monde et faire partie de lui ? De plus en plus de personnes ressentent une vraie aliénation. Mountains  aborde la relation entre nature et  culture. D’où venons-nous ? Cela est sans doute aussi dû à l’interprète avec laquelle j‘ai développé ce solo, car elle est Brésilienne, et un solo est forcément traversé par l’histoire de l‘interprète qui venait du hip hop et du voguing. Islands  interroge plutôt l’avenir et les scénarios possibles. Un nouveau départ à partir de zéro  est-il possible ? De quoi l’intelligence est-elle faite et comment se forme-t-elle ? 

DCH : Pourquoi ces figures de la montagne et des îles ? Que représentent-elles dans ce diptyque ? 

Jefta van Dinther : Notre relation à la montagne a quelque chose de très stable, d’intemporel, depuis les premières histoires que nous connaissons dans notre enfance. La montagne représente les origines, une dimension qui dépasse l’humanité. Il y a une dimension spirituelle. Les îles peuvent nous permettre de nous échapper. On y va après que quelque chose s’est produit. Ce sont des lieux de sécurité où on peut commencer une nouvelle vie mais ce sont aussi des lieux dangereux. L’île nous interroge sur ce qu’est la vie. 

DCH : Comment représentez-vous la  montagne et les îles sur scène ? Avez-vous recours à des moyens scénographiques ? 

Jefta van Dinther : Dans Mountains, il y a un grand tissu qui forme un paysage qui s’élève petit à petit dans les airs, comme une cascade d’eau inversée. Tout disparaît et on ne sait pas où ça va. C’est une métaphore de nos ressources naturelles que nous épuisons et du  temps qui nous file entre les doigts. A la fin, la scène se transforme en montagne. Dans Islands, il n’y a pas de scénographie en dehors des projecteurs. On est dans une sorte de non-lieu, dans un temps d’après la vie. Les danseurs peuvent se fondre en un seul organisme et créer une entité quelque peu abstraite, si on compare cette pièce avec le solo. Entre les deux j’ai beaucoup travaillé en inversion. Islands traite donc beaucoup de la façon dont des corps se connectent entre eux. 

Propos recueillis par Thomas Hahn

On Earth I’m Done : Mountains / Islands de Jefta von Dinther avec le Ballet Cullberg : 

Les 1er et 2 juillet à Montpellier Danse, Théâtre Jean-Claude Carrière

 

 

 

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