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« Le Moulin du Diable » de Fouad Boussouf

Non, le « moulin du diable », ce n’est pas le petit symbole qui s’affiche à l’écran quand votre ordinateur n’avance plus. Le titre choisi par Fouad Boussouf vise le temps, et surtout le temps qui manque parce qu’il court trop vite, parce que les horloges sonnent etc. (voir l’interview)

Le Moulin du Diable est un essai chorégraphique (dans le sens d’un essai littéraire) placé sous l’enseigne de cinq gongs suspendus, symboles stellaires, solaires ou lunaires, en fonction des lumières qui éclairent cette nuit des temps. Et parfois, la roue du temps s’invite aussi au sol, dans une marche circulaire des cinq interprètes.

Photos : Karo Cottier

les danseurs dégèlent, l’articulation s’affine, le mouvement prend le dessus. L’individuation se met en marche, mais elle n’aboutit pas. Chacun se fond dans le moule  d’un schéma corporel contraint, du mannequin à l’athlète. Il n’y a pas que le temps qui nous impose ses règles...

Le chorégraphe aussi a inventé une contrainte pour ses danseurs, une façon de détourner les danseurs de leurs chemins habituels. Le buste creusé, les bras suivant sa courbe vers le bas, il y a un zeste de Popeye dans cette attitude qui frôle le burlesque, dans cette étrange position de marche. Pas vraiment une seconde peau pour ces danseurs qui viennent du hip hop. Le débat de chacun avec cette attitude se voit d’autant plus que les costumes leur collent au corps comme  des maillots d’athlètes qui partent à la chasse aux millièmes de secondes. Mais leurs parties en bleu foncé nous renvoient aussi à la condition ouvrière.

Photos : Karo Cottier

Le temps, visiblement, a manqué aux danseurs pour mener à bon port cette recherche gestuelle, évidemment pensée comme un enrichissement et une façon d’éviter les stéréotypes. Il leur faudra une rallonge pour trouver un rythme plus percutant, mais aussi une dramaturgie pouvant fournir au burlesque un tremplin pour rebondir. Pour rentrer dans la peau de cette pièce encore adolescente (et donc mal dans sa peau), il leur faudra de la pratique, et encore de la pratique, devant le public si possible, pour s‘approprier la gestuelle et la marquer du sceau de leurs personnalités.

Cette pièce doit encore vivre sa crise, sa révolte pour que chacun puisse se révéler pleinement. Car le burlesque ne peut concerner que des individus et que c’est toujours l’individu qui subit le règne du temps. Boussouf nous montre un ensemble, et l’empathie du spectateur reste en berne. Il faut attendre le tableau final pour que les personnalités puissent s’affirmer et nous faire rire, mais quand ça arrive, le résultat est tout aussi balbutiant. Chacun a ici « trouvé son clown » mais le regarde encore comme un étranger, s’il n’est pas en train de se disputer avec cette part de soi, fraîchement découverte.

Photos : Karo Cottier

Mais une chose devrait les aider, à savoir ce ciel joliment mis en valeur par Juliette Deschamps. La présence des gongs pourra les guider grâce au calme, à la paix et à la sagesse incarnées par ce très beau geste plasticien. Magnifiques, les effets lumineux  créant des illusions de mouvement  circulaire, à l’inverse de l’impression d’immobilité de la terre. Moulins divins plutôt que diaboliques, qu’on pourrait contempler infiniment.

Thomas Hahn

Théâtre Jean-Vilar de Vitry-sur-Seine

 Le Moulin du Diable

Chorégraphie : Fouad Boussouf
Assistante chorégraphe : Dalila Cortes
Interprétation : Soukaina Alami, Guillaume Chan Ton, Salomon Mpondo-Dicka, Jorane Rest, Teddy Verardo
Scénographie : Juliette Deschamps
Création lumière : Rodolphe Villevieille et Juliette Deschamps
Création musique & arrangements : Marion Castor
Costumes : Nadia Rémond

Durée : 60 minutes

Tournée :

le 19 novembre à 19h00 : Festival Kalypso, MAC, Créteil
le 21 novembre à 20H00 : Concours [re]connaissance, L'Hexagone, Meylan
le 26 Novembre à 20H30 : Salle Jacques Brel, Fontenay-sous-Bois
le 11 décembre à 20H30 : Théâtre de Chevilly Larue
le 22 Janvier à 21H00 : Le Prisme, Elancourt

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