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« Le fantôme de Montpellier rencontre le Samouraï » de Trajal Harrell

Un spectacle fantômatique de Trajal Harrell autour de deux samouraïs de la danse

Il y a un an, le mouvement des intermittents et précaires occupa le plateau du Théâtre de l'Agora et empêcha la 34e édition de Montpellier Danse d'ouvrir comme prévu. Angelin Preljocaj prononça son célèbre "on ne peut pas danser sur eux." En 2015, le premier spectacle prévu sur le même plateau y résonna drôlement, Trajal Harrell himself prenant la parole pour fustiger, au 1er, 2ème et 3ème dégré en même temps, la baisse des dépenses étatiques pour la culture.

Galerie photo Laurent Philippe

Arborant une veste rouge (plutôt chic que choc), il se présenta cependant comme étant la rédactrice en chef du magazine Vogue. Les intermittents et précaires s'étant réunis le jour même pour débattre de leur situation, un an après les grèves, on pouvait d'abord croire que Harrell lisait un communiqué, en guise de suite à donnner au mouvement de 2014  (que le communiqué de presse des artistes en lutte ait été adressé à Vogue ou pas). Mais il mêla à la revendication (à l'américaine en parodiant Sarkozy: "Nous méritons plus, et nous aurons plus!") un discours très business et capitaliste. Aussi, les masques tombèrent vite.

Galerie photo Laurent Philippe

Samouraï rencontre lapins

Le fantôme de Montpellier rencontre le Samouraï ne sera sans doute plus jamais représenté tel qu'à sa première, à laquelle nous avons assisté. Pour la deuxième déjà, une partie conséquente de l'inénarrable épopée a été renvoyée au royaume des fantômes, entend-on. Et elle changera sans doute encore, cette parodie de talk-show télévisuel, consacrée à une improbable rencontre entre Dominique Bagouet et Tatsumi Hijikata et aux deux pièces de danse qui auraient pu naître à partir de là, sous l'influence d'une beuverie partagée. Il est donc moins intéressant ici de pointer les longueurs et errances de ce premier jet. Espérons avant tout que Harrell supprimera la séance finale d'explication de texte adressée au public qui n'aurait pas "compris" ses intentions qui se perdaient dans les facéties de ce poseur de lapins de spectacle. Espérons aussi que face à toutes les fausses affirmations de "Je suis Trajal Harrell" qui émanent des autres acteurs sur le plateau, ils n'auront pas, au Centre Pompidou à Paris (qui accueillera le spectacle en octobre), la visite de Jérôme Bel  pour rappeler qu'un Trajal ne fait pas un Jérôme[1]. Un esprit perturbateur et parisien est bel et bien présent autour du Fantôme de Montpellier.

Galerie photo Laurent Philippe


[1] Référence au  « Dernier spectacle » de Jérôme Bel : http://www.jeromebel.fr/film/videos?spectacle=Le%20dernier%20spectacle

 

De quels fantômes Montpellier est-elle la somme ?

Le fantôme montpelliérain en question, c'est bien sûr Dominique Bagouet, et en même temps les artistes en lutte. Ou bien serait-ce notre confrère montpelliéro-parisien Gérard Mayen qui œuvre à la dramaturgie ? Mais il pourrait aussi bien s'agir du spectacle lui-même. Car pour faire suite à l'occupation d'il y a un an qui empêcha la danse d'avoir lieu, Harrell a trouvé la réplique. Il intègre l'occupation dans sa tentative artistique et empêche le spectacle de se créer, en occupant le plateau avec des spectacles-fantômes faits de voguing et autres actions pré-chorégraphiques. À travers cet auto-empêchement, il met en scène la mécanique capitaliste qui consiste à intégrer toute contestation au cœur du système. Une manoeuvre très en vogue, qui fonctionne même (ou surtout) là où la scène danse voguing récupère les gestes du fashion business pour les transformer en culture underground. Mais tout ça est aussi vieux que les « je (ne) suis (pas)... »  d'un Jérome Bel...

Thomas Hahn

24 juin 2015, Montpeller Danse, Théâtre de l'Agora

Le fantôme de Montpellier rencontre le Samouraï

Chorégraphie : Trajal Harrell
Avec : Trajal Harrell, Thibault Lac, Wei Ming Pak, Perle Palombe, Stephen Thompson, Christina Vassiliou, Ondrej Vidlar, et des invités surprise
Lumière : Stefane Perraud
Scénographie : Erik Flatmo
Son : Trajal Harrell
Costumes : Trajal Harrell et les interprètes
Dramaturgie : Gérard Mayen

http://betatrajal.org/

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