Emanuela Nelli : « Banshees »
Les Banshees ou bean sí sont des créatures surnaturelles féminines dans la mythologie celte irlandaise, considérées comme des magiciennes ou des messagères de l’autre monde, ou même messagères de mort se mettant à gémir ou à crier quand une personne est au seuil de passer de vie à trépas.
Galerie photo Laurent Philippe
Ici, elles sont trois. Emanuella Nelli, la chorégraphe, la danseuse Anne-Sophie Lancelin et Emmanuelle Tat, pianiste aussi douée qu’inventive qui joue tout autant du piano préparé, en pincant ses cordes, que du piano jouet au son métallique et percussif qui fait penser au celesta.
Galerie photo Laurent Philippe
La pièce, découpée en sept tableaux, fait apparaître ces trois femmes dans un environnement surprenant qui mêle à la danse des œuvres plastiques de Michel Caron, le piano donc et la musique électroacoustique d’Alain Mahé. Cela crée un univers étrange et incertain, comme si l’on convoquait effectivement sur le plateau des âmes disparues en faisant apparaître quelques fragments qui les rappellent.
La danse, fortement teintée de butô (Emanuella Nelli a été danseuse et assistante de Carlotta Ikeda pendant dix ans) est à la fois lente et concentrée, non sans quelques traits un peu facétieux. Certes, Banshees fait surgir des fantômes, mais ne se confit pas dans le solennel pour autant.
Galerie photo Laurent Philippe
Dédié à Carlotta Ikeda, danseuse et chorégraphe récemment décédée, Banshees, tout en laissant transparaître sa présence tutélaire (notamment dans la musique d’Alain Mahé), reste pourtant énigmatique, sa chorégraphie très personnelle et originale, étant construite à partir d’un « je-ne-sais-quoi » et d’un « presque-rien » très jankelevitchiens. Seule évocation un peu plus précise, l’apparation d’une sculpture en pâte de verre, que les danseuses redressent comme une stèle dans le sable et qui fait irrésistiblement à ces « kamis » esprits japonais dont on trouve parfois quelque effigie posée dans la nature, mais qui est, en fait, inspirée d’une statue roumaine qui date de 5000 ans.
Galerie photo : Laurent Philippe
Toujours est-il qu’en la voyant, on pense à la chorégraphe qui émerge de l’ombre traversée par la lumière. Est-ce celle d’un autre monde ? Peut-être.
Agnès Izrine
Le 31 mars 2015 - Atelier de Paris Carolyn Carlson dans le cadre de la Biennale de danse du Val-de-Marne
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