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Dromesko célèbre « Le Jour du Grand Jour »

A la nuit tombée, la baraque en bois des Dromesko se fait le théâtre de bien étranges cérémonies. Lieu de partage et de poésie, de rencontres, de création, l'isba urbaine, posée à quelques pas du Monfort, accueille pour son Jour du Grand Jour un public nombreux qui se masse de chaque côté d'un espace allongé, pour assister à une suite de rites, de l'enterrement au mariage, en passant par le repas de famille, le bal ou l'inauguration municipale.


Le théâtre Dromesko a été fondé en 1990 par Igor et Lily. Leur premier spectacle, ils le jouent dans une volière coiffée d'un dôme transparent, construite au départ pour abriter leurs oiseaux.
Une nouvelle forme parmi les nouvelles formes de cirque en émergence depuis les années 70, inclassable, magique. On se souvient de la lumière crépusculaire, de l'ombre des oiseaux, du cheval ailé ou du majordome volant. A l'époque, la « Volière », compte plus de 200 oiseaux et une volée d'artistes ultra inventifs comme Pierre Meunier ou encore Antoine et Agathe qui fonderont « Les Colporteurs » (pour ne citer qu'eux). Et Igor, Lily et les oiseaux.

Des oiseaux de la Volière, subsiste Monsieur Charles, 26 ans, un impressionnant et indomptable marabout aux ailes puissantes qui se prête pourtant avec délicatesse à un étonnant trio, passant du dos de Lily à celui d'Igor. Dans une quasi pénombre, sur les sons graves et frottés du violoncelle, les dos se courbent et s'enroulent lentement l'un autour de l'autre pour faire une passerelle à l'oiseau.  Le moment est sublime.

S'il se dénomme théâtre forain, Dromesko est avant tout un théâtre d'images, poétique, sans harangue, tour de force ou esbroufe. Un théâtre où le corps est toujours présent même dans l'immobilité ou l'attitude. La danse a une véritable place, elle fait preuve de sa propre écriture,  généreuse, sans fioritures, et les parties dansées ne sont pas plaquées pour étoffer la dramaturgie ou lui servir de faire-valoir. En 2012, lors d'un entretien avec Rosita Boisseau, Igor confiait avoir toujours souhaité travailler avec des chorégraphes, il semble que ce désir se soit pleinement réalisé avec l'arrivée de la danseuse catalane Violeta Todò-Gonzalez, qui a rejoint la compagnie en 2009 pour Arrêtez le monde, je voudrais descendre.

 

Les images de cet « impromptu nuptial et turlututu funèbre » sont fortes et oniriques, parfois un brin macabres, toujours d'une puissante beauté. Clara, la truie déroule le tapis rouge, les marié-ées, qui ne cessent de croître, ressemblent à des centaures, leurs froufrous en guise d'assise, le port de tête majestueux, la marche assurée. La première a le corps compressé de tulle qu'elle déleste en tourbillonnant comme une toupie, le deuxième fait une apparition surréaliste, quatre pieds joliment cambrés surgissant de sa traîne. Dromesko s'y entend pour passer les symboles à la moulinette et s'amuser avec le solennel.

Retour au coutumier, un repas de famille où les invités sortent de dessous la table, tiens, encore des mariés, on règle ses comptes, on s'interroge, on boit et on joue de la musique. On troque le clair obscur pour les loupiotes de fête. Voilà la vie, le temps qui passe …

"Le Jour du Grand Jour" - Dromesko © Fanny Gonin

Certaines scènes sont drôles, menées par le texte aux allures de discours écrit par Guillaume Durieux, tour à tour brillant maître de cérémonie, maire cynique, marié castrat. Pince sans rire à souhait il endosse les rôles avec une verve communicative. D'autres sont plus nostalgiques, plus sombres pour terminer en apothéose avec une une procession nuptiale, aussi fastueuse que kitsch, et qui finira, noce oblige, en banquet.
On trinquera donc à nos morts, nos mariés, nos parents, nos enfants, à la santé du rêve et de l'imaginaire .

Marjolaine Zurfluh

Vu le 16 janvier au Théâtre Monfort

Le Jour du Grand Jour - Théâtre Dromesko
Conception, mise en scène : Igor et Lily
Jeu, danse, musique : Florent Hamon, Lily, Guillaume Durieux, Zina Gonin-Lavina, Igor, Violeta, Revaz Matchabeli, Mannuel Perraudin, Valérie Perraudin.
Lumières : Fanny Gonin, Son : Philippe Tivillier, Décor : Philippe Cottais, Costumes : Cissou Winling

Théâtre Monfort : jusqu'au 30 janvier  www.lemonfort.fr
Le Centquatre-Paris : du 9 au 20 février   www.104.fr

Théâtre Forum de Meyrin- Genève : 15 au 19 mars
Les Salins Scène nationale de Martigues : 14 au 18 juin
 

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