« Data » de Manuel Roque
Jeune chorégraphe québécois, Manuel Roque est paradoxalement allé chercher son inspiration dans les déserts américains pour construire Data, une pièce au nom résolument ancré dans le réel d'aujourd'hui. Une pause dans la trépidation des villes qui ressemble à une méditation sur les rapports du corps et de son environnement.
Une pièce qui explore les données anatomiques, comment se rattache tel muscle à telle articulation, comment tournent les têtes de fémur dans le bassin, comment la peau se distend, comment le souffle circule dans le corps (la pièce s'ouvre sur un étonnant exercice de respiration ventrale).
Sorte de cartographie d'un corps non pas disloqué mais disséqué, Data fait apparaître d'incroyables images qui se déploient au fil des transformations qu'opère son interprète. Créature échappée d'un tableau de Jheronimus Bosch, figure christique du retable d'Issenheim, Sisyphe moderne, ou insecte mutant, Manuel Roque est tout ça à la fois et bien d'autres choses encore.
Manuel Roque - "Data" © Marilène Batien
Pétri de ses influences -il a travaillé pour Marie Chouinard et les distorsions qu'il fait subir à ses muscles en portent la trace, tout comme celles de Daniel Léveillé dans une certaine exposition du corps, il décortique ses sensations tel un entomologiste.
Il contraint son corps, parfois même jusqu'au malaise dans une exploration quasi systématique. C'est sans doute le reproche qu'on pourrait faire à cette pièce, la première d'envergure, qui a mûri doucement pendant trois ans, que de prendre parfois l'apparence d'un exercice sans véritable souci d'écriture. Toutefois elle témoigne d'une belle sincérité et ne craint pas la mise à nu.
Gallia Valette-Pilenko
Le 14 janvier au subsistances
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