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Compagnie Sous X au Festival d’Aurillac

Mettez vos casques... prêts... partez ! « Allo Jeanne? C'est maman... » Mais Jeanne ne rappelle pas. Les messages que ses parents, ses amis ou des inconnus laissent sur son répondeur nous poursuivent, de rue en rue, pendant que nous suivons Jeanne (ou bien son fantôme, sa possibilité, sa fiction) dans les rues d'Aurillac, portés par une musique pop très soignée et romantique.

Photos : Thomas Hahn

Jeanne est venue au Festival d'Aurillac pour se fondre dans la ville. La capitale du parapluie et des arts de la rue lui offre une panoplie de paysages urbains ou ruraux, où quelques pas seulement séparent des espaces urbains intensément exploités de terrains abandonnés.

Jeanne avance, une valise à la main. Son jean, son long manteau en cuir, son chapeau de cowboy et les cheveux roux rendent sa présence flamboyante et énigmatique, alors qu’elle a l’air de pouvoir disparaître à tout moment.

Photos : Thomas Hahn

En marchant, en courant après elle, on suit ses traces plus qu’on ne suit une personne réelle. Jeanne peut traverser son « public » comme si elle évoluait dans une sphère parallèle. Mais au milieu des chercheurs de Jeanne, munis de leurs casques, Jeanne est peut-être la seule personne connectée à la réalité de l’instant.

Cette Jeanne peut soudainement avoir beaucoup de visages, beaucoup de corps, et même changer de sexe. Tout commence à une croisée des chemins. Soudain, deux chapeaux, deux manteaux, deux valises. Séparation. Qui suivre ? Barabra Sarreau ou Sandrine Julien, la blonde ? Et soudain, les chapeaux de cowboy surgissent de partout. Jeanne se multiplie, se meut en Hydre. Mais quand Jeanne est partout, on ne sait pas non plus comment la ramener au bercail.

NO VISA FOR THIS COUNTRY from mathieu delalle on Vimeo.

Disparaître et se dédoubler en même temps, atteindre l’ubiquité par la dissolution, voilà un paradoxe dont l’exégèse reste à faire. Jeanne est épuisante, Jeanne est libre. Elle vit son road-movie de rêve, à l'image d'un pays où les routes sont infinies. Jeanne peut disparaître ou presque, entre deux bus, dans un supermarché, sur le bitume d’une route de campagne, dans un terrain vague, ou bien parmi les autres Jeanne, dans une chorégraphie urbaine qui s'écrit dans les corps et sur dans les rues.

Photos : Thomas Hahn

Et puis, on arrive malgré tout à l'identifier, du moins en tant qu'interprète. Car la première Jeanne, celle aux cheveux roux qu’on suit dès le départ, c'est bien Sarreau, celle qu'on a vu revenir vers la compagnie de Preljocaj, pour Retour à Berratham. L'errance n'a donc pas de quoi la dérouter. Perturbée mais imperturbable, elle avance dans un état de corps incarnant à la fois  l'incertitude, la quête, la détermination...

Si aucun petit ami ne laisse des messages sur le répondeur de Jeanne, elle en a pourtant un : le rêve américain. Et c'est la seule piste qui puisse nous expliquer le titre de ce road movie où fiction et réalité se mélangent: No visa for this country. Jeanne n’a pas besoin de visa. On ne cesse de l'entendre, elle est un enfant de ce pays et de deux parents, eux aussi très d'ici. Ce pays pour lequel Jeanne aimerait posséder un visa, c'est peut-être l'Amérique. Ou bien c'est sa propre vie, dans un pays qui se trouve bien ici mais ressemblerait à un autre rêve.

Photos : Thomas Hahn

À la fin du parcours, la recherche terminée, les Jeanne sont prêt(e)s à dialoguer avec leur public (leurs chercheurs ?). Mais sans doute feraient-elles mieux de conserver le mystère et disparaître comme elles ont surgi ? La poésie est la seule dimension qui justifie vraiment cette course-poursuite. Il manque finalement une dimension à ce « travelling fictionnel » pour ouvrir une dimension au-delà de la course-poursuite et des messages en boucle, au-delà des images. La démultiplication des Jeanne serait une bonne piste, à exploiter davantage.

Thomas Hahn

18 au 21 août - Festival d'Aurillac 2015

No Visa for this Country 
Conceptrice, autrice et metteuse en scène : Alix Denambride
Assistant à la mise en scène et prises de vues : Olivier Villanove
Créateur sonore et faiseur d’images : Christophe Modica
Compositeur : Jean-Christophe Scottis
Régisseur Général : Gildas Masse
Accompagnement artistique : Jonathan Sutton
Artistes chorégraphiques : Sandrine Julien et Barbara Sarreau

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