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« Bienheureux sont ceux qui rêvent debout sans marcher sur leurs vies » de Boris Gibé et Florent Hamon

À Extradanse, les circassiens Gibé et Hamon ont présenté une pièce poétique et tourmentée.

Acrobates et danseurs, artistes multidisciplinaires, Boris Gibé, fondateur de la Cie les Choses de rien, et Florent Hamon ont créé avec leur pièce « Bienheureux sont ceux qui rêvent debout sans marcher sur leurs vies » un univers aux puissants effets visuels et sonores qui flirte avec le cinéma.
Effets de toiles qui montent et descendent, délimitant l’espace pour mieux amener le spectateur à zoomer, arrêts sur images, flashs, ralentis. La lumière est extrêmement travaillée, découpée et contrastée, projetant et étirant l'ombre des corps.

Côté bande son, dialogues de film, bruissements d’ailes, roucoulements, roulements de train, grésillements, aboiements …, une imagerie sonore forte et expressive qui emmène là aussi dans un univers cinématographique affirmé.

Cette représentation cinématographique, visuelle et sonore n’est pas de tout repos. On en prend plein la vue et les oreilles : néons qui clignotent et éblouissent, scènes de guerre et de bombardement, de désordre et de chaos où l’Opéra vient en contrepoint adoucir le propos, tempête « symphonique » faisant s’envoler une multitude de papiers … évoquant la dernière scène de L’Ultime razzia.

Soudain tout s’arrête, et l’espace scénique est totalement plongé dans le vert, justement celui qui sert à « incruster » au cinéma ou à la télévision. Des « petits hommes verts » (eux aussi) très « Burtonniens », font leur entrée pour débarrasser le plateau…

Tout aussi spectaculaire que ce soit, la pièce ne se limite pas à une experte transposition sur scène de procédés cinématographiques. Elle se montre aussi étrange qu’un rêve. Elle bouscule nos perceptions, passe d'un état à un autre sans crier gare, surprend, déploie une multitude d’images à la fois dramatiques et burlesques, violentes et poétiques au travers desquelles les deux hommes, (Boris Gibé et Tiziano Lavoratornovi), développent un récit où tout s’exprime à travers le corps, par une acrobatie dansante souple et coulée, de lentes roulades imbriquées, des contorsions.

Soumis à la fureur des éléments scénographiques, les hommes se tendent, résistent, puis vacillent et chutent, emportés et vaincus, ensevelis. Étreintes, portés, malaxages et rejets pointent l’ambivalence de leur rapport, entre affrontement et complicité.

A la fin, nus, ils traversent l’espace secoué, l’espace devenu silencieux et figé.

Dans ce grand tumulte scénique, ces deux Buster Keaton ont suffisamment d’éloquence pour ne pas être écrasés ou avalés par une machinerie offensive et une scénographie abondante. Ils maintiennent résolument le cap poétique qui permet aux « choses de rien » de prendre vie et de se raconter, et parviennent ainsi à tenir le spectateur en haleine tout du long …

Marjolaine Zurfluh

Vu au festival Extradanse à POLE-SUD le 11 mai 2017

POLE-SUD CDC

Du 8 au 19 juin 2017 Festival Extrapole

Conception : Boris Gibé, Florent Hamon
Interprétation : Boris Gibé, Tiziano Lavoratornovi
Régie son, lumière : Nicolas Gastard
Régie plateau : Clément Delage, Jorn Roesing
Regard dramaturgique : Elsa Dourdet
Regard chorégraphique : Piergiorgio Milano

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