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Soirées singulières : George et Schumacher

Aux Rencontres Chorégraphiques, deux solos masculins où la nudité est vecteur d’interrogations.

Dans Boy oh Boy 2: God's First Creature, Connor Schumacher crée un dialogue avec l’érotisme à travers une formalisation très efficace. Avec des poses très sculpturales, il évoque les statues antiques parfois très athlétisantes. Entre pénombre et contre-jour, l'Américain qui s'est installé aux Pays-Bas s'habille d'une nudité qui fait le plein de références.

Photos : Rios Zertuche

Il y a dans ce studio un côté laboratoire de création, d’humain en devenir, oscillant entre état naturel et silhouette noire, et nous sommes doucement éblouis par les flashs du stroboscope. Mais la simplicité règne, on est loin de la puissance déployée dans certains spectacles de Romeo Castellucci, par exemple. Ici, les images s’évaporent telle une  fumée douce. God's First Creature offre une fusion d’Adam et de la lumière, les deux pouvant réclamer le titre de « première créature de dieu ». Le chant guttural de Schumacher, premier acte de don face au public, ressemble d’abord au son de l’univers (« aauuuummm ») pour traverser le temps et trouver des résonances contemporaines. Avec ces images répétitives, le manège tourne, mais la pièce aussi tourne en rond.

 

Autre solo dévêtu, Erotic Dance de Luke George. Ici aussi, la valse avec le regard du spectateur fait tourner la tête. Cet Australien surfe sur nos fantasmes et nos connaissances en histoire de l'art. Sa nudité arbore le naturel de Laban, la peur du Sida, les ambivalences entre plaisir et effort ou le voile et la sensualité qu'il peut cacher. Dans les tremblements de l'interprète et son univers sonore on pourrait voir une métaphore du fameux "s'envoyer en l'air", mais les images de corps qu'il nous renvoie parfois sont plus subtiles que ça. Entre les deux options face à la nudité, à savoir la banaliser ou l'érotiser, il préfère ne pas choisir pour tisser des renvois permanents.

D'un corps nu, chaque partie peut ainsi devenir soliste chorégraphique. La fente du dos, par exemple... Mais dans sa dramaturgie qui transfigure un orgasme, George est pris au piège. L'imagination et la fantaisie le quittent pour des vibrations de plus en plus mécaniques. Logique, en quelque sorte, mais une pièce de danse, fut-elle appelée Erotic Danse, serait bien avisée de perpétuer le suspense du spectateur jusqu'au bout. La créativité gestuelle et la subtilité du début étant balayée de façon précoce, on a l'impression que George a manqué de temps de création pour développer davantage la seconde partie de son solo.

Aussi, il n'a pas plus su tirer son épingle du jeu qu'avant lui, Schumacher. Mais il restait une troisième proposition au cours de cette Soirée singulière , Farid Fairuz.

Thomas Hahn

Le 26 mai 2015, Le Colombier, Bagnolet, Rencontres chorégraphiques internationales de Seine-Saint-Denis,

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