« Re:Incarnation » de Qudus Onikeku : Création mondiale au Centre Pompidou
Dix danseurs nigérians en grande pompe… à voir sur vos écrans le 27 janvier 2021 à 19h sur le site du Centre Pompidou !
Un chorégraphe et dix interprètes venus de Lagos, la capitale du Nigéria, pour donner une création mondiale au Centre Pompidou : C’est ce que nous devions vivre, du14 au 16 janvier. Un véritable événement. Ce n’était évidemment pas « jouable », et pourtant ils ont joué (pour les caméras), puisque tout le monde a joué le jeu. Ce qui est particulièrement essentiel, tant que le virus fait rage.
Qudus Onikeku et sa Qdance Company de Lagos, miraculeusement arrivés à Paris au grand complet, ont pu terminer leur création en résidence sur le plateau du temple de l’art contemporain. Leur unique représentation de Re:Incarnation était donc réservée aux professionnels, mais elle fut filmée et sera diffusée le mercredi 27 janvier à 19h, sur la page Facebook du Centre Pompidou.
Les images promettent d’être spectaculaires, même à l’écran, et de vous mettre l’eau à la bouche pour voir la troupe en salle, lors de sa tournée, prévue pour les mois de mai et juin, entre autres à l’Espace des Arts de Châlon-sur Saône, au Centre des Arts d’Enghien-les-Bains, au Théâtre Paul Eluard de Bezons et à la Biennale de Lyon, pour finalement revenir au Centre Pompidou.
Galerie photo © Laurent Philippe
La révolution viendra par les Orishas
Un feu d’artifice de couleurs, des cérémonies funèbres ou festives sous l’égide des Orishas de la culture yoruba, des voyages dans les limbes et dans l’effervescence rebelle de la jeunesse urbaine : Re:Incarnation balaye le plateau d’une énergie qui relie la nuit des temps à l’actualité. Où l’on meurt en guerre, en bagarre ou bien parce que la vie est trop épuisante.
Mais c’est aussi une façon de se transformer en Orisha, pour renaître par des bouches comme creusées dans les corps, bouches rouges comme les portes de l’enfer ou les entrailles de la terre. Se succèdent états de possession, batailles, unissons jubilatoires, animalité de corps poudrés, esprits sombres ou solaires, dans une pièce qui ne fait aucune concession.
« We are here because we have always been » (1) affirme l’un des écriteaux qui marquent le début de chaque acte (naissance – mort – re-naissance). Un autre, en guise de conclusion, boucle la boucle et réussit la quadrature du cercle (rituel) en liant la croyance immémoriale au vécu des interprètes: « La révolution viendra par les Orishas. »
Belle façon de déclarer qu’avec ce panorama très back-to-the-roots Onikeku n’a aucune intention de se soumettre à un diktat politique, ni au normes occidentales de la déconstruction d’un vocabulaire cinétique ancestral. Re:Incarnation se rebelle contre toute tentative institutionnelle de redéfinir la manière dont un artiste du continent africain doit détourner son inspiration pour pouvoir tourner en Europe.
Galerie photo © Laurent Philippe
Ni folklorisation, ni déconstruction : un manifeste
Au contraire, la forme et le langage de Re:Incarnation sont authentiques et semblent s’adresser avant tout au public nigérian. Et pourtant (et justement!), avec cette troupe à la fois homogène et hétérogène – par leurs gabarits tellement différents des corps, où aucun ne ressemble à un autre – on est loin de toute idée de ballet folklorique. Les interprètes – dont beaucoup sont également chorégraphes, directeurs de compagnies, graphistes ou cinéastes – infusent le travail chorégraphique de leur vécu urbain et de leurs personnalités, libérant les strates diverses de leur mémoire corporelle.
Galerie photo © Jean Couturier
De la danse à la musique et aux costumes, Onikeku redéfinit les flux gestuels, figuratifs et mythologiques originels à partir d’une sensibilité contemporaine, mais d’un point de vue pleinement africain. C’est justement par la renaissance des langages authentiques que ce spectacle de rites, de combats, de mort et de naissance parle aux publics de tous les continents. Un manifeste même, car la première partie est introduite par un appel à aborder sainement et joyeusement nos différences culturelles, à ne pas les considérer comme des barrières infranchissables ni comme inexistantes. Avec quoi ils nous disent que ce genre d’extrêmes, émanant de positionnements politiques, sont des impasses. Re:Incarnation ouvre la voie de la sagesse, dans la joie comme dans le deuil.
Thomas Hahn
Vu le 15 janvier 2021, Paris, Centre Pompidou
(1) Nous sommes là puisque nous l’avons toujours été.
A voir le 27 janvier 2021 à 19h sur le site du Centre Pompidou
Direction artistique : Qudus Onikeku
Danseurs / collaborateurs : Adila Omotosho, Ambrose Tjark, Angela Okolo, Bukunmi Olukitibi, Busayo Olowu, Faith Okoh, Joshua, Gabriel, Patience Ebute, Sunday Ozegbe, Yemi Osokoya
Musique : Olatunde Obajeun
Lumières : Matthew Yusuf
En tournée :
4 mai - Espace des arts - Châlon sur Saône
11 mai - Centre des arts - Enghien les Bains
18 mai - Théâtre Paul Eluard - Bezons
22 mai - Théâtre Molière - Scène Nationale de Sète
25 mai - La Rampe - Echirolles
4 juin - Les Halles de Scharbeeck - Bruxelles
8 et 9 juin - Biennale de la danse - Lyon
Report des mois de janvier et février 21 :
15 juin - Espace Sarah Berhnardt- Goussainville
17 juin - centre culturel l’Imprévu - St Ouen l’Aumône
20 juin - Festival Afrolution - Berlin
30 juin - Centre Pompidou - Paris
2 juillet - Théâtre Rive Gauche - St Etienne du Rouvray
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