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« Les Jupes » de Soraya Thomas à la Nuit Blanche

« Les Jupes » en cuir noir de Soraya Thomas à la Nuit Blanche : Un « défilé de punk rock déconstruit » pour quatre danseurs revendiquant une masculinité sensuelle et non normative.

Artiste associée à La Manufacture CDCN, Soraya Thomas, chorégraphe établie à Saint-Denis de la Réunion et très engagée dans la création pour l’espace public, était venue jusqu’à Paris pour présenter une version sur mesure de sa création 2024, Les Jupes. Version pour un moment précis et un lieu précis, dans les jardins du Palais Galliera, pour la Nuit Blanche parisienne. Et certains ont pu être surpris de découvrir sous ce titre un quatuor 100% masculin. Mais aussi de voir à quel point les jupes noires de ces garçons renvoyaient la balle au Musée de la Mode de la Ville de Paris dont ils squattaient la terrasse, offrant au public le jardin et une vue imprenable sur le bâtiment.

Galerie photo : Thomas Hahn

Et sous les jupes ? De longs pantalons moulants tout aussi noirs avec des touches de couleur plutôt diffuses ou bien des effets de filets dévoilant des carrés de chair. La couturière Juliette Adam a créé pour la Compagnie Morphose une collection digne du meilleur du clubbing comme du Musée de la Mode si ce n’est du Centre National du Costume de Scène. Pas étonnant donc que la pièce commence à la manière d’un défilé de mode. Seulement, les mannequins marchent ici sur des palettes et vont ensuite déconstruire leur piste au profit de jeux de construction assez improbables.

Galerie photo : Thomas Hahn

Soraya Thomas n’est pas réfractaire à la transgression. D’où cette danse en mode haute-couture, ascendant punk, dans un paysage de cubes argentés et réfléchissants, confectionnés pour l’occasion, scénographie mobile dont les interprètes s’emparent avec bonheur. Si la connotation féminine de la jupe n’est pas de mise dans toutes les cultures, le mainstream européen en matière de mode reste, quant à lui, attaché aux modèles de rôles. Mais Soraya Thomas détourne tout et les quatre hommes – Pierre Dubosc, Adrien Martins, Gwendal Raymond et Jules  Martin – ressemblent, par leurs coiffures indomptées, autant à une troupe de cirque. Mais dans toute son individualité libératoire, le quatuor reste parfaitement uni et solidaire, affichant un individualisme qui se fond dans une expérience collective vécue et revendiquée.

Galerie photo : Thomas Hahn

Ensemble ils défient la gravité autant que la masculinité normative, sous l’œil d’une chorégraphe qui aime autant créer en lien avec la population et pour les espaces non dédiés à l’activité artistique. Un par un, ils calligraphient leurs gestes et mettent en relation la sensualité d’un corps ciselé, avec l’architecture néoclassique. Sous la peau, il leur reste peut-être quelques réminiscences de la gente combattante, et ils pourraient constituer un ordre spirituel autant qu’un escadron prêt à la bataille. Mais leur lutte est ludique et renvoie la silhouette du guerrier à son reflet déformé, larmes artificielles et tour de chant inclus. Car l’homme tel que le voit Soraya Thomas dévoile un don majeur, non seulement pour la liberté de corps et d’esprit, mais aussi pour l’autodérision des rites et émotions.

Thomas Hahn

Vu le 1er juin jardin du Palais Galliera, Paris, dans le cadre de la Nuit Blanche

Distribution

Chorégraphie : Soraya  Thomas
Assistante chorégraphique : Maëva Curco-Llovera
Danse : Piero Dubosc, Adrien Martins, Gwendal Raymond, Jules Martin
Collaboration musicale : Erick Lebeau
Création lumière : Christophe Bruyas
Costumes : Juliette Adam
Scénographie : Camille Constant et Soraya Thomas

 

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