« I-3 • être habitant » d’Hamid Ben Mahi
La touchante nouvelle pièce du chorégraphe démontre sa sensibilité face aux quotidiens des populations.
Au théâtre Louis Aragon de Tremblay-en-France, la salle se remplit de nombreux adolescents et d’adultes accompagnés (ou non) par leurs jeunes enfants.
Sur le plateau côté jardin, s’élève une tour d’échafaudage de chantier alors qu’au centre un grand écran permet tout au long de la pièce de découvrir différents lieux de vie ainsi que des témoignages d’habitants de tous les âges. Avec cinq danseurs dont deux femmes, I-3 • être habitant dessine avec raffinement, subtilité, émotion et humour, le quotidien et les souvenirs d’une vie dans leurs logements. Qu’il s’agisse d’un quartier, d’une tour, de voisins, d’amis ou non, Hamid démontre que chaque appartement laisse une empreinte ineffaçable.
Galerie photo © Jean-Michel Ducasse, Pierre Planchenault, Christelle et Eric Simon
Alors fleurissent une foison de mouvements basés sur le hip hop entre solos, portés ou en groupes, extrêmement bien interprétés par les artistes qui démontrent une parfaite maitrise de la danse. Accompagnée par des musiques variées entre un concerto pour piano de Bach, Debussy et des sonorités urbaines, cette partition culturelle et citadine met en exergue le côté social d’une localité grâce à des dépositions filmées ou exprimées en direct par les danseurs et Hamid, qui dévoilent leurs bons, mauvais relents où attachements à leurs domiciles.
Ces récits divulguent leurs rapports au monde alors que l’individualisme, la jalousie, le manque de respect et les dégradations incompréhensibles de nos jours, pullulent alors que le vivre ensemble devrait être un atout majeur pour évoluer, s’écouter, se soutenir et engendrer de puissantes amitiés. Pour autant, d’autres déclarations dévoilent à quel point il fut difficile à certains de quitter leur logis en évoquant la naissance d’enfants, la nostalgie de bonheurs et d’amour fou. Une fois partis, les ados regrettent l’amitié qui les soudait dans la cour du bâtiment où ils jouaient le soir et les week-ends…
Hamid Ben Mahi ne signe pas cette pièce pour juger, mais tout simplement pour prôner de dignes leçons de vie grâce à des souvenirs souvent drôles et attendrissants mixés avec des images splendides.
Entre danse, architecture et arts visuels, ce puissant rapport à l’habitat et aux histoires qui se construisent, est très rarement traité par le biais du hip hop. Il engendre de subtiles et poétiques interrogations sur le vivre ensemble.
Sophie Lesort
Spectacle vu le 20 décembre 2024 au théâtre Louis Aragon dans le cadre du Festival Kalypso
I-3 • être habitant
Chorégraphie, mise en scène et dramaturgie : Hamid Ben Mahi
Interprètes : Hamid Ben Mahi, Frédéric Faula, Anthony Mezence, Elsa Morineaux et Marine Wroniszewski
Création vidéo : Christophe Waksmann
Environnement sonore : Sébastien Lamy
Mise en lumière : Antoine Auger
Construction éléments de décor : Jean-Luc Petit
Images : Christophe Waksmann et Irvin Anneix
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