Festival Kalypso : Croisements urbains à La Petite Fabrique
De Relais chorégraphiques aux rencontres avec des chorégraphes, une complicité secrète se construit entre Paris et Créteil.
La Petite Fabrique, studio de danse du 20e arrondissement de Paris, a ouvert ses portes au festival Kalypso. Orianne Vilmer, co-fondatrice et directrice générale de La Fabrique de la Danse – structure porteuse de La Petite Fabrique proposant formations, produisant des spectacles et accompagnant les chorégraphes dans leur professionnalisation – explique dans la brochure accompagnant les dix ans de Kalypso : « Nous aimons la diversité des esthétiques. Lorsque nous accompagnons des chorégraphes issus du hip hop, très souvent autodidactes, nous pouvons vraiment observer le potentiel transformatif de notre programme et c’est très réjouissant. » Les points de touche avec Kalypso et les initiatives de Mourad Merzouki en général sont évidentes et illustrent le fonctionnement d’un maillage précieux entre Paris et la Région parisienne, le hip hop et les autres cultures chorégraphiques.
Comment ça marche ? A La Petite Fabrique, dans ce studio à l’allure historique, la chorégraphe contemporaine Christine Bastin, grande figure de la danse contemporaine et directrice artistique de La Petite Fabrique, a chapoté une initiative appelée Relais chorégraphique. Relais, parce que trois compagnies ont disposé chacune d’une journée de travail dans le studio, avant de présenter une ébauche de travail au public. L’une d’entre elles était la compagnie Sentabou dirigée par Jasmine Remadna, non seulement présente dans la programmation avec son spectacle Qui est le malade, mais aussi lauréate 2022 du concours Dialogues, initié par Mourad Merzouki. Remadna se définit comme « danseuse hip hop et contemporaine, à quoi s’ajoutent le jazz et la salsa » et dit de son spectacle Qui est le malade, précédemment présenté au Théâtre des Champs-Elysées lors du concours Dialogues (avec le mécénat de la Caisse des Dépôts) : « Cette pièce n’est pas une création hip hop, je n’ai même pas mis de mots sur le style parce que le but était de créer un registre gestuel répondant à notre propos. »
Deux autres chorégraphes étaient également « relayés » par La Fabrique de la Danse : D’une part, Nawel Bounar (Cie Géâmétrie) et d’autre part, Théophile Bensusan, fondateur de la jeune compagnie Benthé qui a participé à Kalypso 2022 en présentant Voilà, un quatuor interrogeant le rapport de l’homme à la violence. Mais à La Petite Fabrique, il a débuté un travail en duo, tout en fluidité, légèreté et poésie, aussi libre et mobile que la façon de penser la danse dans cette structure partenaire qui ajoute une facette très libre à Kalypso, les chorégraphes bénéficiant de regard extérieur de Christine Bastin, sans être soumis à une obligation de résultat.
Sur les derniers jours de l’édition 2022, La Petite Fabrique était même devenue une sorte de plaque tournante du festival, inscrivant dans ses propositions en partenariat avec Merzouki entre autres une rencontre avec Rémi Esterle. Le fondateur de la compagnie Tres Esquinas et passé par le Cirque Archaos, le hip hop et surtout, le tango. Dans Beauté Batarde, il avait cherché et créé des résonances entre culture hip hop – le rap, pas la danse – et le tango argentin. Mais ce n’est pas tant de ses créations qu’il était venu parler. En compagnie de Téa Vaulerin-Lacroutz, chargée de projets au sein de la Direction Culture de la Ville de Créteil, il témoignait de son expérience de résidence à Créteil en 2018, en lien avec le CCN dirigé à l’époque par Mourad Merzouki (et depuis peu par Mehdi Kerkouche).
Entièrement dédié à la rencontre avec la population sur le terrain, ce concept particulier fut réalisé avec la ville de Créteil au cours de la saison 2017-2018 était placée sous Contrat Local d’Education Artistique (CLEA) en travaillant avec diverses catégories de la population, des écoles élémentaires aux EHPAD. Les interprètes chorégraphiques de Beauté Bâtarde ont alors animé des ateliers de danse tango et un rappeur a animé, en compagnie d’Esterle, des ateliers d’écriture en rap, et ce pour tous les âges ! Mais cette résidence de 200 heures d’animation d’ateliers ne contenait aucun volet de création ! Par contre, Esterle a pu par la suite bénéficier d’une résidence de création au CCN Créteil. Inversement, les ateliers animés par Tres Esquinas ont ouvert certains enseignants dans les écoles à la danse et des collaborations annuelles avec le CCN ont suivi.
A La Petite Fabrique, la série de rencontres avec des chorégraphes avait député avant le croisement avec Kalypso et continuera par la suite. Pendant ce temps la compagnie Tres Esquinas prend son envol. Après avoir présenté en 2021 Beauté Bâtarde dans le cadre d’une soirée liée au concours Danse élargie, le voici programmé par le Théâtre de la Ville avec sa prochaine création, Hug, un duo féminin dansé en tango sur un tapis roulant, qui sera présentée au Théâtre des Abbesses en septembre 2023.
Thomas Hahn
La Petite Fabrique avec le festival Kalypso 2022 : Relais chorégraphiques du 5 au 10 décembre 2022
Matinée Racontez-nous (Rémi Esterle) et soirée Portrait (David Llari) le 15 décembre 2022
Image de preview Nawel Bounar © Emmanuelle Stäuble / Soirée des Chorégraphes #7
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