« Di Grazia » D 'Alexandre Roccoli
Créé le 12 novembre, en ouverture du festival Instances à Chalon-sur-Saône, Di Grazia, d’Alexandre Roccoli, est une pièce où le corps dans tous ses états tient une place centrale. Réparti en trois « actes » : « Il mondo antico », « Incubo et purgatorio », « Il mondo futuro », Roberta Lidia De Stefano, seule en scène, s’affiche icône de la femme italienne.
Di Grazia, une locution lourde de sens, de l’état au coup, en passant par le recours ou l’action, de grâce s’il vous plaît ! Mais, pour Alexandre Roccoli, cette grâce est plutôt celle des saints et surtout des saintes, qu’incarne mieux que quiconque Roberta Lidia De Stefano, une performeuse, actrice, chanteuse tout autant que musicienne. Elle est l’une de ces femmes à la puissance dévorante, à la sensualité crue de l’Italie du Sud, Calabre, Pouilles ou Sicile. Ces femmes des terres rudes, ces vierges farouches et ces mater dolorosa, qui portent en elles la vie et la mort, Perséphone et la Méduse, capables de vous pétrifier ou de réveiller les morts.
Galerie photo © Julien Piffaut
C’est tout cela que raconte Di Grazia, avec la voix du ventre inexorable de Roberta Lidia De Stefano, sa voix de terre, ni tout à fait femme, ni vraiment homme, plongée dans une antre éclairée de bougie, soufflant dans une outre en forme de cornemuse appelée zampogna, fait d’un corps de chèvre retourné muni d’anches et d’un bourdon. C’est tout dire !
Alexandre Roccoli, qui vit aujourd’hui à Naples, a fait de ce spectacle, une sorte de précipité de l’Italie profonde, avec ses rites funéraires aux allures de grand macabre et son odeur de sainteté. Loupiotes et lumignons baignent le plateau de lueurs changeantes et incertaines qui magnifient le corps de Roberta. Elle, chante en ouvrant grand la bouche, un peu trop sans doute, et joue la femme fatale, torse nu et voile de mariée sur la tête, laissant entendre les soupirs de la sainte et les cris des femmes bafouées ou des tarentulées.
Galerie photo © A Short Term Effect
Les éclairages magnifiques de Séverine Rième ajoutent au mystère de cette représentation envoûtante et entêtante, comme un parfum un peu trop capiteux.
Agnès Izrine
12 novembre 2019, Espace des Arts, Scène nationale de Chalon-sur-Saône dans le cadre du Festival Instances.
En tournée
17 et 18 décembre Bonlieu Scène nationale d’Annecy
mars 2020 La Ménagerie de Verre
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