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« Mémoire d’un vieux Tzigane » : Reprise parisienne
Fresque haute en couleurs, dramatique et joyeuse, le dernier spectacle de la compagnie Romano Atmo est à l’affiche au Théâtre de Ménilmontant du 31 mars au 4 avril.
Cette Mémoire d’un vieux Tzigane ouvre sur des trésors de joie, de musicalité, de désarroi, de mélancolie et d’énergie. Pendant une heure et demie, danse, chant et théâtre déversent un véritable déluge d’émotions. Les robes virevoltent, les talons frappent, l’officier nazi humilie et tue. L’histoire tragique des Roms au XXe siècle s’incarne avec une force rare.
Pétia Iourtchenko, auteur et metteur en scène, mémoire vivante de la danse de son peuple, entre dans la peau d’un personnage émouvant. Acteur, danseur et mime, il évoque autant les écoles de théâtre et de clowns de l’Est, dans leur façon de rappeler le côté absurde de notre traversée de la vie. Absurde, certes. Mais pas triste, puisqu’on danse, on chante, on boit…
Né en Ukraine en 1957, Iourtchenko porte autant la culture tzigane que celle d’Europe de l’est. Il est poète dans chacune de ses expressions, de la danse au théâtre, en passant par la musique et la haute couture. Car il crée sur mesure la robe tzigane de chacune des danseuses de sa troupe. Dans son approche chorégraphique se reflètent les danses tziganes de toute l’Europe de l’Est, de la Russie à la Roumanie ainsi que le flamenco.
En particulier, les liens entre le flamenco et les danses tziganes, dont Pétia a lui-même développé la méthode de codification universelle et d’enseignement, sautent aux yeux, dans le zapateado autant que par les robes des femmes, d’une richesse chromatique et plastique extraordinaires.
Iourtchenko n’est pas un inconnu. Dans sa balade entre tradition et création contemporaine, il a accompagné Julien Derouault dans Ivresse, chorégraphié et mis en scène par Marie-Claude Pietragalla. C’était en 2006.
La démarche d’Iourtchenko, pour éviter que les danses tziganes ne soient oubliées, est de disséminer. Aussi, les interprètes de la compagnie Romano Atmo (L’Ame tzigane), qui répète dans les studios de la compagnie Théâtre du Corps (Pietragalla/Derouault), sont des gadjés, des non-tziganes donc. Mais ils donnent l’impression d’adopter assez facilement le regard tzigane sur le monde et forment une unité sur le plateau. Rien d’artificiel, mais une démonstration du caractère universel d’une danse qui peut tout aussi bien renvoyer au Schuhplattler alpin qu’aux danses orientales.
Mémoire d’un vieux Tzigane ne contourne pas les épisodes douloureux. Le tableau qui se déroule à Auschwitz est brutal et tragique, mais sobre. Et on se pose des questions face à la schizophrénie d’un pays qui expulse les Rroms et s’enthousiasme pour leurs danses…
On pardonne facilement à cette proposition ses quelques maladresses dans l’écriture et la théâtralisation, car on ne peut qu’adhérer à la profondeur et la rigueur du travail sur la danse et la culture tziganes. Parole de gadjé…
Thomas Hahn
Mémoire d’un vieux Tzigane
mise en scene : Petia Iourtchenko
Chant : Matrena IANKOVSKAYA
Musicien : Sacha VALLAYES
Danseurs : Alissa DOUBROVITSKAIA, Ania SEROVA, Anne BASALDELLA, Cécile BERNARD, Frédéric FORESTIER, Gaelle TRIMARDEAU, Julien WOLF, Roman BERBARD, Kevin SOUTERRE, Sani MARCOVICI, Simon RENOU, Youlia SERMIAGYNA
http://www.dansetzigane.com/#!mmoire-dun-vieux-tzigane/c4s2
du 31 mars au 4 avril
Théâtre de Ménilmontant
15, rue du Retrait, 75020 Paris
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