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« Poetry Events » de Carolyn Carlson au musée de l’Orangerie

Dans le cadre du cycle chorégraphique « Danse dans les Nymphéas » instauré par Isabelle Danto à l’Orangerie depuis maintenant cinq ans, il a été possible d’assister à la pièce de Carolyn Carlson, Poetry Events, qui accorde musique, danse et poésie. Cela, sur fond de toile panoramique de Claude Monet.

L’événement étant avant tout de revoir Carolyn Carlson sur scène lire elle-même les poèmes qu’elle a écrits en anglais, danser et animer le comédien Rémi Bichet déclame, cette fois en français, plusieurs textes extrêmement lyriques, le violoncelliste Pierre Le Bourgeois ainsi que les danseuses de sa compagnie, Céline Maufroid et Sara Orselli. La chorégraphe nous a gratifié de plusieurs variations de son cru valant à elles seules le voyage à la Concorde.

La Blue Lady, vêtue de noir, fait son entrée, portant beau un costume-veston masculin à pattes d’eph ; elle se dirige vers le côté cour, marchant à un mètre de distance d’une toile édénique de Monet vouée à la clarté aurorale. Elle oscillera de côté et d’autre du plateau à ras de terre arrangé pour les artistes entre son pupitre portable pour partition et la chaise réservée à son musicien, côté jardin. Durant cinquante minutes environ, la danseuse- chorégraphe ne tient pas vraiment en place.

Elle lit pour l’instant un de ses textes. D’une voix claire, musicale par elle-même, d’un ton sûr, agréable à entendre indépendamment de tout signifié, avec une élocution impeccable et un accent venu d’outre-Atlantique, sur un tempo modéré. À l’oral, Carolyn Carlson est secondée, dédoublée, complétée par les interventions du comédien Rémi Bichet qui lit et dit par cœur des textes poétiques en français. Carolyn danse et récite simultanément.

Le violoncelliste alterne motifs répétitifs semblables à ceux d’un Phil Glass et phrases postromantiques ; il varie les attaques de sa lirone, plaque une série d’accords qui détourne l’instrument à cordes frottées en guitare ou en luth ; le cas échéant, il en use comme d’un tambourin ; il passe, à l’aise Blaise, de la musique écrite au chorus impromptu ; il fait se succéder quelque air déjà entendu et musiquette à danser.

Les deux danseuses sont élégamment parées d’une robe longue noire ; elles évoluent pieds nus, telles des prêtresses de la danse libre isadorienne. L’une et l’autre s’expriment en solo avant d’offrir un pas de deux doux, fait de gestes simples d’apparence mais subtilement exécutés. De courtes phrases préméditées ou improvisées de toutes pièces sur le champ. Ces graciles mouvements se brisent par endroits.

La dernière partie de soirée, comme il se doit, est festive – sans parler du rappel, pur divertissement. Tout l’esprit de sérieux disparaît d’un coup. On s’autorise la simagrée, la grimace, la caricature. Carlson paraît se rire d’elle-même, prendre sa danse à distance en s’autoparodiant. Les autres artistes ne sont pas en reste. Le violoncelle se met à swinguer, à jazzer ses syntagmes ; il les dédouble ou surligne en les jouant des mains tout en les sifflant. Pour la plus grande joie du public.

Nicolas Villodre

Vu le 30 septembre 2024 au Musée de l’Orangerie.

 

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