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Spectres d'Europe : Pierre-Émile Lemieux-Venne, Lucas Valente et Alba Castillo au CCN-Ballet de l’OnR

Pour la nouvelle édition de Spectres d'Europe, le CCN - Ballet de l’Opéra national du Rhin présente, de juin à juillet 2024, à Colmar, Mulhouse puis Strasbourg, trois chorégraphies signées respectivement Pierre-Émile Lemieux-Venne, Lucas Valente et Alba Castillo : deux créations, Sous les jupes et Rex et une pièce de 2020, Poussière de Terre.

L’idée de ce programme estival est de faire « dialoguer les univers de trois chorégraphes de la nouvelle génération aux styles déjà bien affirmés : la légèreté profonde et communicative de Pierre-Émile Lemieux-Venne (danseur-chorégraphe du Ballet de l’OnR), la danse spectrale de Lucas Valente, lauréat du dernier Concours de jeunes chorégraphes de Biarritz, et les circonvolutions métaphysiques de l’artiste espagnole Alba Castillo ».

Avec Sous les jupes, Pierre-Émile Lemieux-Venne a voulu tracer le « portrait d’une jeune génération décomplexée » s’adonnant à des joies simples comme celle de chanter à tue-tête sous la douche ou de danser seul, n’importe comment, sur une scie musicale. De ce fait, dix interprètes du Ballet de l’OnR évolueront sur une « trame musicale à la saveur pop nostalgique » : des tubes de Céline Dion, Andrea Bocelli, Françoise Hardy et, heureusement aussi, des morceaux des Charbonniers de l’enfer, The Vaccines, Arnaud Dumond et Joan Jett.

Pierre-Émile Lemieux-Venne a conçu lui-même les costumes de sa pièce, quatorze silhouettes différentes visant à marquer « la singularité de la personnalité de chaque interprète », autant de looks rafraîchissants « combinant des éléments du vestiaire masculin et féminin », juxtaposant différentes teintes et motifs, misant sur des effets de transparence. Le décor est modulable, pouvant suggérer un salon ou des espaces plus colorés ou festifs.

Rex, la pièce pour six danseurs de Lucas Valente, s’inspire de l’Œdipe roi de Sophocle. La tragédie grecque, fondée sur un des grands mythes européen et freudien s’il en est, produit ici une « danse avec les ombres dans un jeu de clair-obscur » soutenue par une bande-son électro-acoustique, répétitive et planante, qui alterne des thèmes musicaux d’Emptyset, Luke Atencio, Rival Consoles et de la violoncelliste Hildur Guðnadóttir.

Le chorégraphe souhaite transcender la « narration linéaire d’Œdipe » et aborder les « thèmes de l’ignorance, de l’évitement et de la peur d’affronter l’inconnu » représentés notamment par la vision d’un homme « courant dans l’obscurité, fuyant désespérément l’inexorable réalité », demeurant « insensible aux conseils extérieurs, contraint de découvrir son destin de manière autonome ».

Poussière de Terre, la chorégraphie pour quinze interprètes d’Alba Castillo que va pouvoir enfin découvrir le public de l’OnR, file la métaphore du temps qui… file et que l’on mesurait, il n’y a guère, au moyen d’un sablier – d’où le titre de l’opus. Un grain de sable, comme une goutte d’eau, démultiplié, peut produire de la grandeur ou de l’infini : montagne, plage ou désert. Cette image est illustrée de compositions de Goldmund, Lawrence English, Karin Borg, Bryce Dessner, Brian Eno, Nils Frahm, Jóhann Jóhannsson et Bruno Sanfilippo.

L’idée de l’écoulement, celle de la durée en général ou de cette pièce d’une quarantaine de minutes plus particulièrement, doit en l’occurrence être associée à l’expression en solitaire qui vire tantôt au pas deux, tantôt au travail d’ensemble. L’union faisant la force, celle-ci permet de mettre en évidence la valeur du danseur ou de la danseuse. D’estimer, par conséquent, de la qualité d’un ballet et de jauger de la puissance de son corps.

Nicolas Villodre

Spectres d'Europe  au Théâtre de Colmar : le 7 juin 2024 à 20h et le 9 juin à 17h ; à La Sinne de Mulhouse : les 18 et 19 juin à 20h ; à l’Opéra de Strasbourg : le 30 juin à 17h et du 2 au 4 juillet à 20h.

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