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Montpellier Danse : Mémoire et création Nadia Beugré
Tous les jours, les artistes de Montpellier Danse répondent à nos questions sur Mémoire et création.
Danser Canal Historique : Quelle est la création qui vous a le plus marqué dans votre parcours ?
Nadia Beugré : Toute mes pièces m’ont marquée, elles constituent chacune un jalon d’un même chemin, chaque création porte en elle son expérience propre, ses rencontres.
DCH : Quelle(s) pièce(s) chorégraphique(s) gardez-vous en mémoire ? Et pourquoi ?
Nadia Beugré : Para que O Ceu Nao Caia (Pour que le ciel ne tombe pas) de Lia Rodrigues au Corum à Montpellier. Je crois que la pièce m’a prise au dépourvu, brouillant les espaces, les frontières entre publics, artistes, aires de jeu… Avec cette question des territoires qu’on occupe, qui sont donnés ou qu’on doit prendre, des questions qui sont au centre de mon travail et cette odeur de café dont je me souviens si nettement. Je me suis reconnue aussi dans ces jeunes danseurs formés à Maré.
DCH : Avez-vous des pièces fétiches ? Des chorégraphes fétiches ?
Nadia Beugré : Alain Buffard bien sûr, avec Good Boy. Lorsqu’Alain a vu Quartiers Libres, il a dit que c’était ma version de Good Boy ! J’étais très sensible à la façon dont Alain se saisissait des petites choses pour en faire des grandes, donnait de la valeur à ce qui paraît de prime abord insignifiant et puis sa générosité de laisser tant d’espaces à ses interprètes.
J’ai envie de parler de Robyn Orlin aussi, de cette profondeur qui me touche et m’apaise en même temps. Mathilde Monnier également dont je respecte infiniment l’œil et l’oreille ! Comment elle a su créer des espaces pour accueillir, les méthodes qu’elle a mises en place pour transmettre.
Enfin, bien sûr Béatrice Kombé, ma « best » qui lorsque je me débattais avec mon corps, ma corpulence, disait à ceux qui riaient : « Vous savez, demain vous allez la respecter ici ! ». Elle voyait en moi un pivot, et j’espère être devenue en quelque sorte ce pivot à même d’ouvrir des chemins, des possibles à d’autres danseuses, d’autres jeunes.
DCH : Pour vous, est-il important de conserver la mémoire d’une pièce ? Et pourquoi ?
Nadia Beugré : Oui, je crois que l’on n’écrit pas sur des pages vierges, mais on continue des histoires, on rature, on reprend, on réécrit ses propres histoires, mais aussi les histoires des autres…En venant à Montpellier, il a été important pour moi de comprendre ce que Bagouet avait apporté, quelle avait été sa démarche. C’est ce dont manquent souvent les danseurs en Côte d’Ivoire, un accès à d’autres histoires, d’autres références, d’autres mémoires sur lesquelles écrire, contre lesquelles réagir.
DCH : Comment (à partir de quoi) vous lancez-vous dans vos propres créations ?
Nadia Beugré : Une image, un geste, un fait, ce qui nous entoure, les périphéries, ce que l’on ne voit pas. Comme une tentative de faire contrepoint, de rééquilibrer. C’est celui qui porte sa chaussure qui sait où il a mal. Alors non pas réparer, mais juste donner un peu d’air, un peu d’oxygène pour dire où l’on a mal, et retrouver ce que le regard des autres parfois nous a arraché, l’estime de soi…
Propos recueillis par Agnès Izrine
Prophétique - Nadia Beugré : 21 et 22 juin 2023 au festival Montpellier Danse
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