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« 11e Séquence Danse Paris » au #104 Paris
Riche et éclectique que l’édition 2023 du festival Séquence Danse Paris ! Elle se déroulera intramuros, au 104 Paris, 5 de la rue Curial dans le 19e, et extramuros : au Théâtre Louis Aragon de Tremblay-en-France et à l’Espace 1789 de Saint-Ouen.
Ce sera l’occasion de voir ou, dans certains cas, de revoir – ne serait-ce que pour vérifier si elles tiennent la route – nombre de pièces d’auteurs de renommée internationale et d’autres, moins connus, voire inconnus au bataillon. Des chorégraphies, quelquefois au sens large du mot – pouvant combiner théâtre et danse –, de divers types, genres ou « formats », comme on dit aujourd’hui. Des œuvres interprétées par les créateurs des rôles ou des recréateurs de ceux-ci. Plusieurs inédites, qu’il convient de souligner, la plupart de fraîche date, et quelques titres que ce site a déjà eu l’occasion de chroniquer. Mais également deux œuvres du répertoire, des « classiques » ou « postclassiques » signés William Forsythe, remontés par le Ballet de l’Opéra de Lyon.
Résumons le contenu du programme, ici classé par ordre d’apparition : Faintings de Nina Traub (création), Bouffées (2022) et C’est toi qu’on adore (2022) de Leïla Ka, Suzanne (2021), d’Emanuel Gat, Fantasie Minore Marco da Silva Ferreira (création), Hope Hunt and the Ascension into Lazarus (2016) d’Oona Doherty et Sandrine Lescourant, If You Could See Me Now (2017) d’Arno Schuitemaker, Elenit (2019) d’Euripides Laskaridis, N.N.N.N.et One Flat Thing, reproduced de William Forsythe, BEASTS POEM de Pierre Pontvianne, STORM (2021) d’Emilio Calcagno, en son lieu de Christian Rizzo, Tragédie, new edit (2012-2022) d’Olivier Dubois. Selon nous, deux thèmes dominent cette édition 2023, l’un étant plus particulièrement lié à la nature, l’autre, comme de bien entendu, au corps – outil de la danse s’il en est.
Seconde nature
Ainsi, Faintings, évanouissements en français, superpose interprètes et toile de fond de couleur verte, tentant par la même occasion de faire fusionner nature et représentation, immobilité et mouvement, murmure et silence. STORM tendrait à montrer que si l’air ne fait pas la chanson, il peut du moins faire la danse. La tempête, sujet traité de façon burlesque par Buster Keaton dans Steamboat Bill Jr. (1928) et de manière fantastique par Judy Garland dans The Wizard of Oz (1939), est ici simulée au moyen de puissants ventilateurs. Ce phénomène météorologique devient contrainte poétique et redoutable partenaire de danse. Bouffées est un pas de cinq féminin tout simple d’apparence, qui ne manque pas d’air tout en en jouant, sans artifice, sans enfumage, sans fumigène. Avec C’est toi qu’on adore, on reprend les même et on recommence. Ou tout comme. en son lieu situe le danseur à sa vraie place, qui n’a plus rien de naturel dans le huis clos de la boîte noire.
Corps flottants
Il y a aussi au programme de la rumba dans l’air : Suzanne rend hommage à l’auteur de la chanson, Leonard Cohen, et à Nina Simone, une des interprètes les plus profondes de ce standard auquel a été récemment consacré un beau documentaire. Fantasie Minor applique le hip hop, en principe terre-à-terre, non plus au baroque comme c’était devenu systématique chez les contemporains, mais à la musique de Schubert, une des plus spirituelles ou élevées qui soient. Hope Hunt and the Ascension into Lazarus, parabole catholique, se veut aussi une « danse documentaire » et, de ce fait, un peu démonstrative sur les bords.
If You Could See Me Now s’inscrit dans la tendance revivaliste récente qui légitime les danses pop d’autrefois comme le jerk, la disco, la house, la techno. Le dancing, le night-club, le ballroom sont censés nous distraire du réel quotidien. Elenit nous est annoncé comme un entre-deux : mi-théâtre mi-danse (ou performance). BEASTS POEM explore non plus les rapports entre le théâtre, la musique et la danse mais les relations entre le texte et le geste. N.N.N.N. et One Flat Thing, reproduced demandent une dépense énergétique considérable de la part des interprètes. La deuxième pièce use de tables d’écolier comme d’un nouveau type de plateau.
Tragédie, new edit se focalise sur le corps au sens propre – du corps humain, masculin, féminin, dénudé – et du corps de ballet : le corps collectif n’en faisant qu’un.
Nicolas Villodre
Image de preview : Faintings de Nina Traub © Sara Siegel.
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