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Hip Hop Games Exhibition : Spécial Cie Käfig
Pour l'anniversaire des dix ans de Kalypso le 18 novembre, la soirée prend un tournant spectaculaire en conviant les danseurs de la compagnie Käfig à s’affronter dans des épreuves inspirées de spectacles de Mourad Merzouki. Nous avons voulu en savoir plus sur ce concept des HHG en interrogeant son créateur, Romuald Brizolier.
Danser Canal Historique : Comment vous est venue l’idée de ce concept des Hip Hop Games ?
Romuald Brizolier : Je danse depuis que j’ai 14 ans, j’ai eu un beau parcours d’interprète, j’ai beaucoup travaillé avec Farid Berki jusqu’à devenir son assistant. Je suis parti m’installer à Paris, et là j’ai eu l’opportunité de travailler avec Franck II Louise, puis avec le Cirque du Soleil, ou Pietragalla entre autres. Parallèlement, j’ai toujours gardé un pied dans l’undreground, les battles, avec mon groupe R.A.F Crew avec Grichka Caruge (Monsta Madness), Marvin Gofin (Mar20), Francis Quessary (6-franc), nous avons été champions du monde en 2009, et produits par Chaillot sur notre première création. Nous avons fait le tour du monde.
Pour ma génération, il était très difficile d’avoir un pied sur la scène chorégraphique et un dans les battles. Ce ne sont ni les mêmes codes, ni les mêmes projets, ni le même public, ni les mêmes danseurs. J’ai eu la chance d’être accepté par mes pairs des deux « camps » ! J’ai vite eu envie de faire le pont entre Paris et Lille, en matière de transmission, d’informations… A l’époque il n’existait pas autant de choses sur Internet, il y avait peu de vidéos, d’écoles de danse, donc ceux qui voyageaient ramenaient les infos. J’ai commencé par organiser des stages avec des grands noms parisiens dans le Nord. Petit à petit, Bruce Ykanji, le créateur du Juste Debout, voyant que je travaillais beaucoup entre Paris et Lille, m’a confié une qualification du Juste Debout Lille pendant six ans. Mais comme j’étais toujours impliqué dans la création avec ma compagnie Art-Track, les codes du battle, et surtout cette charte du JD, le règlement rigide a commencé à m’ennuyer. C’est alors que m’est venue l’idée de créer mon propre événement : les Hip Hop Games. J’ai vraiment essayé de les construire comme un spectacle et non comme un battle en faisant le trait d’union entre l’underground et la scène chorégraphique. C’était mon objectif de base, et surtout je souhaitais créer un événement pour les compagnies, les groupes. Nous en étions arrivés à un stade, où il y avait de moins en moins de groupes, et de plus en plus d’individualités et de binômes, car les battles privilégiaient ces formats, et toute une génération se formait dans cette perspective. Or pour moi le hip-hop c’est le crew, c’est le monde, c’est le collectif. C’est pourquoi les Hip Hop Games se situent entre l’underground et la scène chorégraphique mais en direction des groupes et des compagnies.
DCH : Quand les avez-vous lancés ?
Romuald Brizolier :Je les ai lancés en 2010 à Lille. A l’époque, pour ceux qui venaient des battles et ne connaissaient pas du tout le spectacle, dès qu’on sortait de la technique stricto sensu, dès qu’on commençait à danser avec une contrainte que ce soit un accessoire, une scénographie, ça devenait contemporain. Au bout de la première année qui m’a servi de test grandeur nature, j’avais toutes sortes d’idées de challenges à tester avec les danseurs du Nord. Dès la deuxième année d’autres régions ou villes qui trouvaient l’outil intéressant dans le sens où il force à la créativité, m’ont sollicité. Avec ces partenaires nous avons mis en place une mini tournée avec une qualification de chorégraphes émergents, c’est-à-dire présentant leur première pièce qu’ils testaient à travers les HHG.
DCH : Quelle est la différence par rapport à un concours classique ?
Romuald Brizolier : Contrairement à un concours où le jury doit juger une compagnie ou un chorégraphe en ne voyant que cinq à dix minutes d’une pièce, sans pouvoir cerner le projet ni surtout l’intelligence artistique du chorégraphe et des interprètes, les HHG les défient pendant 2h30 les concurrents sur de la créativité. Il s’agit d’apprécier leur potentiel. C’estun spectacle mis en scène lors duquel des compagnies viennent défendre un projet de création. Les danseurs et les danseuses doivent traverser des épreuves d’improvisation.
L’objectif est de soutenir les artistes émergent·e·s pour rendre visible la diversité de la création dans le champ des cultures urbaines. En dernière épreuve ils ont « le joker », c’est-à-dire leur carte blanche, un morceau de création, un moment bien à eux. Du coup, le jury peut préférer un projet moins abouti mais avec une marge de progression importante plutôt qu’un autre où ils sont au bout de leur créativité.
Au fur et à mesure ça s’est affiné. Désormais, les HHG tournent autour des cinq piliers de la création. Mon idée c’était de mettre en avant l’improvisation pure. Du coup, le public comprend la démarche, si le danseur fait juste un salto, il l’applaudira un peu, mais s’il voit un danseur en train de se chercher et que d’un coup, il y a juste un contact qui est magique, tout le monde se lève.
DCH : Qu’est-ce que la « troupe HHG », partie intégrante de votre compagnie Art-Track, mais dédiée aux HHG ?
Romuald Brizolier : Ce que nous appelons la troupe HHG défie les candidats. Toutes les branches du hip-hop sont représentées. C’est pourquoi j’ai appelé ce concours Hip Hop Games et non Dance Games. Le MC n’est pas seulement un speaker c’est un MC triple champion de France d’improvisation verbale, on a un DJ, Philémon, un DJ compositeur, Tismé, un beatboxeur, Mystraw qui est dans le top 4, un graphiste Andry Charles, VJ, qui vient du street art et fait de la BD, de l’animation 2D,3D et moi qui suis danseur et chorégraphe mais joue un rôle d’arbitre. Du coup, toutes les branches du hip-hop bornent l’événement. Nous nous connaissons depuis 12 ans, il y a vraiment une connexion sur scène entre nous, même si nos parties sont plus ou moins écrites pour donner un cadre, et un déroulé précis, mais il reste une grande partie d’improvisation surtout maintenant, qu’il existe une interaction avec le public.
DCH : Quels sont les prix de ce concours-spectacle ?
Romuald Brizolier : Nous avons créé un réseau français et international. Cette année le lauréat HHG France remporte une bourse de 6000 € et trois dates de diffusion, et s’il gagne la finale internationale, il décroche un apport de 8000 € de plus et nous rajoutons des dates chez tous nos partenaires internationaux. De plus, je mets ma compagnie Art Track et mon bureau de production à leur disposition : nous organisons une production déléguée avec eux et nous les chapeautons en termes d’administration, comptabilité, communication, nous les accompagnons parfois jusqu’à la DRAC pour les demandes de subvention. Comme les HHG sont un label, nous nous portons garants du résultat, non pas artistiquement, je ne vais jamais à l’encontre de la direction artistique, même si je peux donner des conseils, notamment sur les formats trop importants. Tous ceux qui ont gagné les HHG sont désormais des chorégraphes repérés et qui tournent : comme Mellina Boubetra ou Saïdo Lehlouh et Joanna Faye qui ont monté leur compagnie Black Sheep grâce aux HHG et sont maintenant directeurs du CCN de Rennes...
DCH : Que sont les HHG EXHIBITION que vous allez présenter lors de ce festival Kalypso, dans un format tout à fait original ?
Romuald Brizolier : Les HHG EXHIBITION correspondent à un format spectacle. Ils ressemblent au HHG TOUR mais sansprix en jeu : une équipe de All Stars et des équipes guest locales viennent traverser l’expérience Hip Hop Games. Pour le plaisir et rien que pour le plaisir.C’est la troisième édition des HHG à Kalypso.Mais,pour cet anniversaire des dix ans, la compagnie Art Track a créé un événement insolite à la frontière de l’improvisation et de la création dans des épreuves qui ont toutes pour dénominateur commun les spectacles de Mourad Merzouki. Quatre équipes de danseurs vont relever les défis autour des musiques, décors, accessoires et invités mystère de Folia, Pixel, Vertikal ou Zéphyr, le tout appuyé par l’expertise de la troupe des HHG qui coordonne le tout. Une soirée électrique en perspective !
Propos recueillis par Agnès Izrine
Le 18 novembre à 21h à la MAC Créteil. Avant le spectacle ne ratez pas la Soirée Internationale avec la compagnie néerlandaise Zero Dance Theatre à 19h30.