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« À propos de Martha Graham » entretien avec Janet Eilber

Nous avons profité de la présence au Festival de danse Cannes de Janet Eilber, directrice de la Martha Graham Dance Company, venue présenter le film A Dancer’s World (1957) de Peter Glushanok et participer à une rencontre animée par Laura Cappelle sur « les femmes chorégraphes pionnières » pour lui poser des questions sur ces deux sujets.

Danser Canal Historique : Connaissez-vous les Duets de Benjamin Millepied inspirés par le film A Dancer’s World et la musique de Cameron McCosh, véritable hommage à Martha Graham ?

Janet Eilber : Oui, nous avons vu ce ballet. Et notre compagnie avait d’ailleurs aidé Benjamin Millepied à réaliser ce projet.

DCH : Et qu’aviez-vous pensé de cette pièce?

Janet Eilber : Formidable !

DCH : À une époque, Madonna a fait beaucoup pour la compagnie, du temps de Martha Graham…

Janet Eilber : Madonna avait été une de ses élèves.

DCH : Je crois savoir qu’elle a soutenu financièrement Martha Graham.

Janet Eilber : Oui, c’est exact. Elle ne nous aide plus à présent mais elle se réfère toujours beaucoup à Martha Graham.

DCH : Vous avez au cours de la discussion mentionné Katherine Dunham. Y a-t-il eu un lien entre elle et Graham ?

Janet Eilber : Je ne le pense pas. Katherine Dunham et Martha Graham étaient contemporaines, mais je ne pense pas qu’elles se soient fréquentées.

DCH : Dans les années vingt, peut-être ? Il existe des photographies de Dunham en tenue de danseuse moderne…

Janet Eilber : Des photos où elles sont ensemble ?

DCH : Non. Mais nous avons cru remarquer une certaine influence de Graham sur elle, dans sa formule à base de néo-classique et de jazz.

Janet Eilber : C’était alors une tendance de toute la modern dance américaine.

DCH : Tout à l’heure, vous avez fait un rapprochement à la Lautréamont entre la « machine à coudre » et Isadora Duncan.

Janet Eilber : Parce que, historiquement, avant l’époque d’Isadora, les femmes devaient s’en tenir à l’économie domestique. Elles cuisinaient et elles réalisaient beaucoup de choses de leurs mains. Est venue l’ère des machines, et des machines à coudre en particulier. Il y a eu aussi des façons plus rapides de faire la cuisine. Les femmes ont disposé de plus de temps libre. Elles ont pu faire de la danse, s’organiser en clubs féminins, se réunir pour mette en scène des « tableaux » dansés. Elles ont pu avoir une vie sociale.
 

DCH : Je pensais en l’occurrence à Paris Singer, un des enfants d’Isaac Singer, l’inventeur de la machine à coudre. Paris Singer, qui fut l’amant d’Isadora.

Janet Eilber : C’était son mécène ? Il lui a donné de l’argent ? Je ne le savais pas.
 

DCH : Un des deux enfants d’Isadora, Patrick, était aussi le sien !

Janet Eilber :Je n’avais pas fait ce rapprochement.

DCH : Isadora est morte dans une machine…

Janet Eilber : Une machine à coudre ?

DCH : Non, une automobile.

Janet Eilber : Eh oui.

Propos recueillis par Nicolas Villodre

Le 27 novembre 2021 au Festival de Danse Cannes.

 

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