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« Transversari » de Vincent Thomasset
Une création magistrale ! Entre danse et théâtre de geste, Lorenzo De Angelis incarne magnifiquement la figure d’un homme à l’arrêt.
À la croisée des codes du théâtre et de la danse, Vincent Thomasset observe, notre rapport souvent inconscient et parfois additif à l’image et d’autre part, la difficulté d’exister en tant que sujet alors que nos corps, gestes et comportements sont informés par les codes et normes des sociétés auxquelles ils appartiennent.
DansTransversari, soit la forme passive du verbe traverser en latin : « être traversé par », il confie à son complice danseur Lorenzo De Angelis le soin d’incarner la figure d’un homme à l’arrêt. Un homme dont le corps n’est plus capable de vivre dans le monde tel qu’il l’était et traversé par des questionnements sur les masculinités.
Placé devant un écran lumineux blanc, Lorenzo brosse comme une ombre noire les différents actes de sa vie. Ainsi mis en valeur, chaque geste de son quotidien est dessiné avec une rare méticulosité.
La tête recouverte d’un masque, ce personnage évoque un homme seul cloitré dans son univers traversé par de multiples situations qui paraissent anodines. Et pourtant, par le bais de la pantomime, il décrit des états d’âme et de corps qui interrogent.
Bien évidemment, on songe immédiatement au confinement, mais l’évolution des splendides images d’une infinie délicatesse démontrent un cloisonnement moral et physique volontaire. Seul, il traverse des états pluriels et évoque les Hikikomori, ces personnes qui vivent recluses dans leurs chambres. Pourquoi cette terrible solitude, ce retrait de la société et de l’autre, l’exploration sur son ordinateur d’un monde virtuel et désincarné ?
Qui plus est, le raffinement de certains de ses gestes pose la question du genre. Surtout lorsqu’il lave consciencieusement ses longues et fines mains avec une application déroutante. Rien ne prouve qu’il soit éprouvé par sa possible « différence » et ce quotidien singulier. Il se suffit à lui-même dans son monde où tout doit être précis, ordonné, calculé.
Accompagné par l’intelligente création sonore de Pierre Boscheron, le sens du langage des signes s’adresse à toutes et tous. Que cet être soit continuellement devant son écran, qu’il prenne le métro, cuisine des œufs, fume une cigarette, danse… il transporte ce personnage hors norme dans un univers décalé.
Exceptionnel, délicat, raffiné, captivant, tellement gracieux, Lorenzo De Angelis narre sa vie jusqu’au bout de l’intrigue avec une virtuosité presque indécente tant chaque comportement est parlant et magnifique.
Entre danse et théâtre visuel de geste, il est impossible de donner une étiquette à cette œuvre splendide magistralement bien pensée et dont le sens et la dramaturgie sont le reflet du monde du XXIème siècle.
Sophie Lesort
Spectacle vu le 11 novembre 2021 à L’atelier de Paris, dans le cadre du Festival d’Automne.
Conception, mise en scène, texte : Vincent Thomasset
Créé en collaboration avec, et interprété par Lorenzo De Angelis
Création sonore, musiques originales : Pierre Boscheron
Création lumière : Vincent Loubière
Regard extérieur : Ilanit Illouz
Scénographie : Marine Brosse
Création masque : Etienne Bideau-Rey
Création vidéo : Baptiste Klein & Yann Philippe
Costumes : Colombe Lauriot-Prévost
Régie générale, régie lumière : Lucas Baccini
Assistant mise en scène : Glenn Kerbiquet
En tournée : du 6 au 14/01/2022 au Carreau du Temple, dans le cadre du Festival d’Automne
9/03 au Cndc d’Anger
25/03 au Théâtre Brétigny scène conventionnée arts & humanités, Bretigny-sur-Orge
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