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Montpellier Danse : « Frérocité » de Fabrice Ramalingom

Une danse furieusement accumulative et joyeusement délétère.

A l’origine de Frérocité, création de Fabrice Ramalingom pour le festival Montpellier Danse, il y a le néologisme attribué à Lacan, certes, qui mêle à la fraternité sa dose de violence (mais ça on le sait depuis Caïn !), mais surtout, un film d’animation qui date de 1981 et obsède depuis le chorégraphe montpelliérain :Tango de Zbigniew Rybczynski. Dans ce court-métrage de huit minutes, il s’agit d’occuper au maximum l’écran par un procédé d’accumulation des personnages. Ils entrent tour à tour dans la pièce de façon répétitive, s’ajoutant aux autres par une situation ou un geste jusqu’à saturer le cadre, puis le déserter peu à peu. C’est exactement ce même processus qu’uilise Fabrice Ramalingom, traduisant chorégraphiquement cette saturation de l’espace grâce à sept danseurs professionnels et quinze danseurs amateurs de Montpellier. 

Galerie photo © Laurent Philippe 

Après une (trop) longue introduction où deux danseurs amorcent la chorégraphie en répétant chacun un enchaînement dans une sorte de « canon » obligé par le procédé sus mentionné, la vie arrive enfin sous forme de danse, chacun entrant avec sa phrase chorégraphique et son accessoire (matelas, chaussette, escabeaux, sacs poubelles, cubes, bidons, ballons, tissus, radiocassettes, lampes etc.) et le déposant, créant une accumulation hétéroclite et joyeuse, mais qui relève aussi de l’inanité de toutes ces choses amassées. 

Il y a, quoi que Ramalingom en dise, du post-confinement dans cette œuvre où chacun partage un même espace mais sans se toucher ni vraiment « faire corps » avec les autres, sauf dans un simulacre de manifestation ou de rave-party, jusqu’à ce que tout ça dérape, s’empoigne, férocement et décélère, grâce à Jean Rochereau, danseur mythique de Bagouet aujourd’hui âgé de 69 ans qui clôt en douceur cette heure de folie, soutenue par la musique tout aussi accumulative de Pierre Yves Macé.

Galerie photo © Laurent Philippe 

Le tout laisse une impression de fin du monde, logique, après avoir été asphyxiés par cette débauche d’objets et de gestes, où les interprètes, professionnels comme amateurs, se livrent corps et âmes. 

Agnès Izrine

24 juin 2021, Festival Montpellier Danse, Théâtre de la Vignette

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