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« One Shot » d' Ousmane Sy
En présentant dimanche 9 janvier, salle Jean Vilar, le spectacle de son ami Baba retransmis en direct sur le site de France Télévisions, le directeur du théâtre de Suresnes Olivier Meyer a évoqué un homme généreux, un esprit libre et un artiste singulier. Toutes ces qualités étaient à l’œuvre dans sa pièce One Shot, donnée en ouverture d’un festival Suresnes cités danse 2021 hélas annulé, en hommage au chorégraphe trop tôt disparu.
Dans la lignée de son précédent opus Queen Blood, qui mettait déjà à l’honneur les ‘femmes puissantes’ de sa compagnie Paradox-sal, Ousmane Sy confrontait huit d’entre elles - rejointes sur la fin par cinq autres danseuses - à la musique afro-house savamment élaborée par son complice de longue date DJ Sam One. Célébration vibrante, énergisante mais aussi subtile de la danse au féminin, One Shot s’ouvrait sur un plateau vide bordée de banquettes basses, sur lesquelles on distinguait peu à peu les silhouettes de huit danseuses, marquant du pied un rythme souple et cadencé. Tandis que les suggestives lumières de Xavier Lescat, bleutées puis rouges, habillaient progressivement l’espace, les interprètes se retrouvaient ensuite au centre de la scène pour une série d’ensembles très réussis où l’on retrouvait la verve chorégraphique et l’énergie créatrice de Baba. Guerrières alignées face au public, amazones chevauchant d’invisibles coursiers ou déesses se livrant à des rondes rituelles, elles martelaient le sol d’un jeu de jambes délié et véloce digne de celui de leur maître d’œuvre.
Galerie photos © Dan Aucante
A cette ouverture spectaculaire succédaient plusieurs solos où chacune d’elles affirmait son identité chorégraphique, côté jardin face au DJ ou au milieu du cercle, emblème des danses urbaines. Toutes excellentes, les danseuses - dont Johanna Faye et Linda Hayford, membres du collectif FAIR(E) et co-directrices comme l’était Ousmane du Centre chorégraphique national de Rennes - passaient du locking au break, à la house, au néo-flamenco ou au krump. Elles incarnaient haut et fort cette nécessité vitale de danser que Baba voulait, par-dessus tout, mettre en avant au travers de cette création.
En cela, mais aussi dans sa façon inventive de mixer les styles et les musiques, son féminisme affirmé, son sens indéniable de l’équilibre - celui des corps comme celui du spectacle lui-même -, cette pièce dont il n’aura pas eu le temps de finir les transitions lui ressemble, et c’est exactement ce qu’il voulait. Quant au public de professionnels, parmi lesquels se trouvait la ministre de la Culture Roseline Bachelot, il a applaudi longuement, heureux et ému, ces retrouvailles avec un art vivant, jubilatoire et enthousiasmant.
Isabelle Calabre
Vu au Théâtre Jean Vilar de Suresnes le dimanche 10 janvier 2021
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