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« Mozart à 2 », « Beethoven 6 » de Thierry Malandain

Programmées suite à l’annulation de compagnies étrangères en raison de la crise sanitaire, les deux représentations données par le Malandain Ballet Biarritz en ouverture du Temps d’Aimer la Danse à Biarritz ont été l’une des belles surprises du festival. 

Surprise oui, car même si Mozart à 2 et Beethoven 6 n’étaient pas des créations, les voir ou revoir dans de nouvelles configurations scéniques (un pas de deux en plus pour la première, un prologue en moins pour la seconde) a permis d’apprécier plus encore leur exemplaire musicalité. Toutes deux emblématiques de la conversation intime entretenue depuis toujours par Thierry Malandain avec certains compositeurs, les deux pièces ont aussi mis en lumière la bonne forme ‘post-confinement’ des danseurs du Malandain Ballet Biarritz, qui dans ce répertoire, se sont montrés particulièrement déliés et expressifs.

C’est à Saint-Etienne, où sa compagnie Le Temps Présent était alors en résidence, que Thierry Malandain avait en 1997 créé la suite de duos de Mozart à 2, avant de prendre un an plus tard la direction du CCN de Biarritz et de faire entrer dès sa première saison la pièce au répertoire. Les concertos pour piano de Mozart lui avaient inspiré l’idée d’un Bal Solitude, depuis enrichi d’une dernière séquence et entré au répertoire du Leipzig Ballet et du Wiener Staatsballett.

De la séduction de la première rencontre à la profondeur de l’amour, chaque pas de deux faisait montre d’un raffiné entrelacs de mouvement et de sentiments. On arpentait les délicats chemins de la Carte du Tendre, porté par de formidables interprètes et par l’élégance d’une chorégraphie où la grammaire classique des portés et autres arabesques se conjuguait à la force terrienne de la danse contemporaine. L’acmé de cette exploration sensible était le duo écrit sur le fameux Adagio du Concerto pour piano et orchestre n.23, dont la tendre puissance se hissait légitimement au niveau d’autres lectures célèbres. 

 

Galerie photo © Olivier Houeix et Stephane Bellocq

Après cette jubilatoire traversée des sentiments, Beethoven 6, sur la 6Symphonie de Beethoven, offrait une perspective différente tant de l’art du chorégraphe que de celui de ses danseurs. En reprenant sa Pastorale commandée par l’Opéra de Bonn pour célébrer en 2019 les 250 ans de la naissance du compositeur, Thierry Malandain a en effet supprimé son prélude avec soliste sur Les Ruines d’Athènes pour ne garder que la partie centrale, sur la symphonie proprement dite, qui mobilise l’ensemble de la troupe. La parfaite ordonnance des lignes dessinées et redessinées sans cesse par la chorégraphie, de la parallèle au cercle, en devenait plus évidente encore, faisant de cette « Ode à la nature » un éclatant hommage à la sérénité bucolique de l’Antiquité.

Galerie photo © Stephane Bellocq

L’un derrière l’autre dans de grandes traversées de plateaux ou à l’unisson dans des rondes rituelles, chaque danseur semblait, en cette rentrée pas comme les autres, lever une à une d’un pas léger les menaces pesant sur les cœurs.

Et même si la dernière scène, reprenant le final de La Pastorale, introduisait une ultime note pessimiste, on restait tout de même sur la réconfortante impression d’une beauté et d’une harmonie partagées. Les applaudissements enthousiastes du public au moment des saluts, confirmant ce sentiment, disaient combien ce bonheur-là leur avait manqué.

Isabelle Calabre

Vu à la Gare du Midi à Biarritz lundi 14 septembre 2020 au festival Le Temps d’Aimer la Danse.

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