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IT Dansa à Vaison-la-Romaine

Rare dans nos grandes salles, les barcelonais d’IT Dansa passaient par le festival de Vaison-la-Romaine, décidément en pleine renaissance. Un programme plein de jeunesse, à tous les sens du terme car les jeunes turcs de la danse contemporaine européenne trouvent dans ces interprètes au seuil de leur carrière une coloration originale.

Ni junior ballet (tel que le CNSMD en avait développé), ni compagnie d’apprentis ou sas d’entrée pour une grande compagnie (comme le NDT2 ou la compagnie junior de la Batsheva), IT Dansa émane de l'Institut del Teatre de Barcelone, non pas comme une étape de formation, mais comme une compagnie à part entière. Une audition sélectionne ceux des danseurs de l’Institut qui pourront intégrer la compagnie, à concurrence de six à huit postes, pour un emploi de deux ans, remplacé par moitié tous les ans. Ce qui signifie que la moitié (un peu plus cette année) des danseurs présents à Vaison finissait leur parcours au sein d’IT Dansa et entrent, en début de saison prochaine, dans de grandes compagnies européennes. Dirigée depuis sa création en 1997 par Catherine Allard, une ancienne du NDT, la compagnie passe commande à des chorégraphes extérieurs les pièces que les jeunes danseurs interprètent.

Whim d'Alexandre Ekman. Galerie photo Laurent Philippe

Le programme comportait quatre œuvres de facture très différente : The Prom de Lorena Nogal, Kaash d’Akram Khan, In Memoriam de Sidi Larbi Cherkaoui et Whim d’Alexander Ekman.

On connaît Lorena Nogal pour son travail avec Marcos Morau au sein de la compagnie La Veronal. Elle y compose la danse en assistant le chorégraphe. Pour cette pièce, elle nous plonge dans un lendemain de fête à travers les errances d’un de ces « techniciens de surface » nettoyant les reliefs de la soirée et dont on ne sait jamais s’il est interrompu par quelques fêtards attardés ou par les fantasmes de ceux-ci.

The Prom de Lorena Nogal - Galerie photo Laurent Philippe

La matière gestuelle tire remarquablement profit de la maîtrise de ces jeunes interprètes, de leur engagement dans une situation qui appartient à quelque chose de leur quotidien. Mais, défaut de jeunesse, la construction de l’ensemble s’apparente à une succession de saynètes de genre, pas toujours du meilleur, et manque de tenue sur la durée. Comme l’œuvre est assez courte et enjouée, cela passe, il n’en aurait pas fallu plus.

Akram Khan n’encoure pas ces reproches, d’autant que Kaash est une œuvre éprouvée. Première grande pièce du chorégraphe pour sa compagnie, composée en 2002 et reprise en 2014, elle est adaptée en 2018 pour sept danseurs d’IT Dansa (originellement c’est une pièce pour cinq), et raccourcie, sans perdre de son énergie.

Kaash d'Akram Khan - Galerie photo Laurent Philippe

Scénographie et costumes respectés, gestuelle toute de rupture et sur des tempi particulièrement intenses et sans rémission : la pièce garde toute sa puissance. On peut trouver la gestuelle moins tranchante que dans la version originale, mais l’engagement et la fougue compensent largement pour une reprise très convaincante.

Kaash d'Akram Khan - Galerie photo Laurent Philippe

Sidi Larbi Cherkaoui a fait un choix très différent et s’il a gardé le titre In Memoriam, ce double duo en trio n’a plus guère de la pièce initiale, créée en 2004 pour les Ballets de Monte-Carlo. Il s’agit ici d’un premier duo, assez dérangeant dans son expression de la violence qu’une manière de gourou fait subir à une femme particulièrement résignée. Les choses se renversent au cours du second duo (même danseuse, mais danseur différent), et se résolvent par une manière de révolte en forme de KO… Ce n’est ni le sens ni la facture de la pièce d’origine et cela mériterait un titre différent. La fraîcheur de l’interprétation désarme heureusement ce que le propos peut avoir d’ambigu.

In Mémoriam de Sidi Larbi Cherkaoui. Galerie photo Laurent Philippe

Enfin, Alexander Ekman, avec Whim, offre aux jeunes danseurs un terrain de jeu à la mesure de leur fantaisie. Créée en 2006 pour cette compagnie, la pièce fait partie d’une manière de répertoire et possède un humour et une verve qui, pour être caractéristique du jeune suédois, trouve dans ces encore plus jeunes interprètes des ouailles mieux que convaincues !

Tout commence par un amas de chaises et d’humains, à jardin, réveillé par un soliste qui interroge, à cour, « Whim… Whim… » soit « Caprice » ou « fantaisie ». En découle une suite de séquences où, du groupe constitué et un peu écrasant, l’individu cherche à faire reconnaître sa présence singulière.

Whim d'Alexandre Ekman. Galerie photo Laurent Philippe

Ainsi cette séquence en ligne, comme un salut, où chacun se présente d’une signature gestuelle propre, laquelle, samplée et combinée, devient la source d’une nouvelle danse du groupe. Caractéristique du style Ekman (humour, prolifération d’objets, goût du dérisoire) Whim correspond bien à ces jeunes danseurs, en recherche d’une singularité dans un milieu qui uniformise. L’œuvre introduit parfaitement à l’univers de ce troublions de la chorégraphie d’aujourd’hui.

Philippe Verrièle
Le 20 juillet 2019 au Festival de Vaison-La-Romaine

En tournée :
26 Janvier 2020  Opéra Théâtre, Avignon.
28 Janvier 2020   L’Arc, Le Creusot
30 Janvier 2020  Scène Nationale, Dieppe
20 mars 2020 Théâtre Jean Vilar, Suresnes
02 avril 2020  Le Manège de Maubeuge
04 avril 2020 /Grand Théâtre, Provins
07 avril 2002  Espace Jean Legendre, Compiègne
 

 

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