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Frederick Gravel : « Some Hope for Bastards »

Une fête électrisante en forme de concert chorégraphique de Frédérick Gravel et sa bande à Chaillot.

C’est un titre qui porte l’espoir avec un air de défaite, au diapason de la chorégraphie de Frédérick Gravel qui nous annonce, micro à la main, d’une manière un peu déceptive qu’il faut « fêter la fin du monde, ou son début ».

Soit. Et après un premier début titubant et trébuchant, où les neuf danseurs migrent de chaise en chaise, sur une pulsation battue par le compositeur Philippe Brault, José Major et Gravel en personne, ce dernier nous annonce un deuxième début. Un début par défaut, en quelque sorte, qui accorde un groove forcené et ancré dans les bassins des danseurs au chœur du début de la Passion selon Saint-Jean de Bach.

Galerie photo © Laurent Philippe

Ces bâtards à qui il faut redonner espoir ce sont « les larbins, les participants d’un ordre des choses que pourtant nous détestons… ce moment où j’ai estimé que je ne servais à rien d’autre qu’à donner un peu d’espoir à des trous du cul parmi lesquels je m’inclus ».

Sur le plateau, le petit monde de Frédérick, par quelque torsion inattendue, quelque frémissement de la nuque, ou un fléchissement dans les genoux, parle de notre monde et de nos peurs en ces temps où tout doit disparaître, avalés que nous sommes par toutes sortes d’urgences et menacés par l’apathie la plus totale, le tout avant de retourner au boulot comme tout ces gens bien mis qui se trémoussent, impuissants à endiguer les catastrophes annoncées.

Galerie phto © Laurent Philippe

D’où le deuxième début, peut-être, qui nous annonce un « sauveur » ? Rien n’est moins sûr.

Sur fond de fête sombre et un peu mélancolique, ces glorious bastards, ne lâchent pourtant rien, agis par un rythme obstiné, une pulsation entêtante, impérieuse à souhait. A Bach succède bientôt la musique live, qui s’accentue dans les corps, évoquant au passage le groupe Joy Division, tandis que les lumières ont des relents de boîte de nuit alliée à la pourpre cardinalice.

Finalement, tandis que l’énergie, la dynamique de la chorégraphie gagne en puissance, exténuant les danseurs, exhaussant le mouvement, on distingue une phrase chorégraphique complexe, présente depuis de début avec ses heurts et ses saccades qui soudain prend forme sous nos yeux, s’étire et se déploie en gestuelle inattendue, déséquilibrée, troublée par quelques corps à corps de couples fragiles et désynchronisés. Les corps exultent et s’abandonnent, comme échoués de fatigue ou d’illusions perdues, en tout cas rincés jusqu’à l’os, laissant le spectateur comme abasourdi mais certainement conquis.

Agnès Izrine

Le 11 avril à Chaillot Théâtre national de la Danse

Distribution
Chorégraphie Frédérick Gravel en collaboration avec les danseurs à la création
Musique Philippe Brault en collaboration avec Frédérick Gravel et José Major
direction musicale Philippe Brault
Son Louis Carpentier
Lumières Alexandre Pilon-Guay
Costumes Catherine Théroux
collaboration artistique Lucie Vigneault, Hanako Hoshimi-Caines
Direction des répétitions Lucie Vigneault
Danseurs :  David Albert-Toth, Kimberley de Jong, Dany Desjardins, Noémie Dufour-Campeau, Alanna Kraaijeveld, Alexia Martel, Jean-Benoît Labrecque, Simon Xavier Lefebvre, Frédéric Tavernini, Jamie Wright

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