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Hommage à Merce Cunningham au festival Trajectoires

Au théâtre Graslin de Nantes, le CNDC d’Angers présentait deux pièces majeures de Merce Cunningham, Beach Birds (1991) et Biped (1999) dans le cadre du festival Trajectoires.

Revêtus de justaucorps blancs dont le haut, les bras et les mains sont noirs, les onze danseurs ressemblent à de gracieux pingouins. Sur la musique de John Cage (jouée en direct) qui définit le froid et le vent glacial, ils évoluent par petites touches successives entre sautillements, rapprochements, éloignements et isolement.

Lors de la création de Beach Birds en 1991, Cunningham écrivait : « J’avais trois idées en tête : les oiseaux ou d’autres animaux et quelque chose que j’aime au bord de la mer : observer un rocher, le contourner et constater qu’il change sans cesse, comme s’il était vivant. » Tout ceci est effectivement très lisible dans cette méticuleuse chorégraphie qui met en scène l’individualisme de chaque animal face à une nature hostile.

C’est la peintre Marsha Skinner qui a signé les costumes et le décor composé d’une toile de fond où la lumière varie en intensité. Ainsi, on imagine un coucher de soleil ou bien l’aube et une nouvelle journée qui s’éveille après une longue nuit où les oiseaux ont grelotté de froid.

Ensuite, place à l’un des chefs-d’œuvre emblématique de Cunningham, Biped, la première pièce en 1999 à mêler sur scène danseurs réels et virtuels. A l’époque, ce fut un choc tant cette corrélation entre la vidéo et les artistes était novatrice et totalement réussie. 

En 1989, Merce Cunningham a collaboré avec des chercheurs en informatique de l'Université Simon Fraser aux États-Unis pour la création d'un logiciel, nommé « Life Forms », permettant d'écrire des mouvements chorégraphiques. Ce logiciel possédait trois rôles. Le premier, de pouvoir enregistrer des exercices ou des enchaînements à partir de cellules chorégraphiques informatisées. Le deuxième, de générer à partir de ces données une chorégraphie originale et aléatoire, ce qui constituait la base du travail historique de Cunningham. Enfin le troisième, de créer des images à partir de capteurs de mouvements posés sur les danseurs et traités par l'informatique. L’utilisation de ce logiciel a donné naissance en 1999 à Biped.

Pour avoir été subjuguée à l’époque par cette pièce si novatrice dans le monde de la danse contemporaine, j’en gardais un souvenir émouvant et espérais retrouver ce bouleversement si intense. Il est évident que cet ouvrage n’a absolument pas vieilli car les mouvements des dessins dansants projetés sur le voile placé devant les interprètes sont d’un tel raffinement et d’une telle grâce, qu’ils reflètent à merveille le style de Cunningham.

Mais on peut regretter le manque de présence des danseurs qui exécutent la chorégraphie sans âme et sans pousser le corps au plus loin de ses possibilités. Car on le sait, le chorégraphe tenait tant au rapport à l’intelligence de l’artiste et à ce que chacun soit le centre de la scène qu’il est évident que ses intentions n’existent absolument pas dans cette reconstruction de Robert Swinston. En résumé, le spectateur est totalement captivé par les images virtuelles et bien trop rarement par la danse qui se déroule sur le plateau.

Il est pour autant évident que ceux qui n’ont jamais eu la chance de découvrir cette œuvre auparavant ont apprécié cette soirée en hommage aux cent ans de Merce Cunningham.

Sophie Lesort

Spectacle vu le 21 janvier 2019 à Nantes dans la cadre du festival Trajectoires.

Beach Birds : Chorégraphie Merce Cunningham, reconstruction Robert Swinston – CNDC d’Angers

Musique : John Cage

Costumes et lumières : Marsha Skinner

Interprétation : Marion Baudinaud, Antonin Chediny, Matthieu Chayrigues, Anna Chirescu, Pierre Guilbault, Gianni Joseph, Haruka Miyamoto, Catarina Pernao, Flora Rogeboz, Carlo Schiavo, Claire Seigle-Goujon

Interprétation musique : Gavin Bryars, Audrey Riley, Kathryn Wilkinson, James Woodrow

Biped : Chorégraphie Merce Cunningham, reconstruction Robert Swinston

Musique : Gavin Bryars

Interprétation : Guyonn Auriau, Marion Baudinaud, Antonin Chediny, Matthieu Chayrigues, Anna Chirescu, Xavier Gocel, Pierre Guibault, Gianni Joseph, Adélie Marck, Haruka Miyamoto, Catarina Pernao, Flora Rogeboz, Carlo Schiavo, Claire Seigle-Goujon

Interprétation musique : Gavin Bryars, Audrey Riley, Kathryn Wilkinson, James Woodrow

En tournée : 12 mars : Le Volcan - Le Havre ; 
14 Mars : La Barcarolle – Arques ;
21 Mars  : Le Bateau feu - Dunkerque

 

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