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« Dans ce Monde » de Thomas Lebrun
Par un tour du monde en quelques danses, Thomas Lebrun libère un imaginaire jubilatoire.
Dans ce monde, existe-t-il une danse-monde ? Et si oui, serait-elle - probablement - « contemporaine » ? En créant Dans ce Monde, Thomas Lebrun s’est engagé sur une voie qui ne va pas de soi : Evoquer, avec une pièce tous publics, nos images d’Epinal des cultures de ce monde sans passer pour un populiste. Mais il démontre ici que cela est possible grâce à des images certes « carte postale », mais dessinées avec humour, distanciation et poésie. Les Russes ont leurs chapkas, les Bulgares le mystère de leurs voix, les Brésiliens leurs machos et les Vietnamiens leurs chapeaux qu’ils portent dans les rizières, mais tous ont en eux une part de nous-mêmes.
Un tour du monde
Le tour du monde en quelques danses ? Oui, mais pas dans le sens d’un récit. Lebrun ne joue pas au Jules Verne. En même temps, son voyage ne ressemble pas non plus à celui de la génération Youtube, où toute géographie devient virtuelle. Lebrun a une méthode: Faire plaisir à l’imaginaire, emprunter des chemins libres mais non improbables. Aller voir chez les voisins avant de changer de continent. Franchir l’océan au bon moment et changer de costume en fonction. Et aussi: Ne pas toujours atterrir là où on l’attend.
La Mongolie donc, plutôt que la Chine. Le Pakistan, au lieu de l’Inde. Aussi danse-t-on sur les airs du Mongol Band ou de Nusrat Fateh Ali Khan, icône immortelle et pop-star de la musique Quawwali, par ailleurs pas forcément étrangère au flamenco.
La preuve :
Fait de danses faussement folkloriques, son tour du monde va à toute allure. Les inspirations, dit Lebrun, viennent de paysages et de sensations. Chaque séquence ne dure que quelques minutes, obligeant les danseurs à changer subitement de registre. Au Vietnam, ils se tiennent par la main en marchant dans une rizière imaginaire, pour se transformer aussitôt en Cariocas débridés. En Algérie, une vieille rengaine de Lilli Boniche est accompagnée de mouvements survoltés qui font place à un glissando d’ondulations lancinantes, dès que le couple débarque au Mali, bercé des rythmes de Boubacar Traoré.
Galerie photo © François Berthon
Philtre chorégraphique
Festive, méditative, joyeuse ou facétieuse, touchant tantôt à la transe, tantôt à la séduction, la danse se décline aussi dans un bel éventail des émotions et des intentions. Le lien entre tous ces imaginaires se fait grâce à la danse originelle de Thomas Lebrun, qui possède sa propre musicalité. Si le directeur du CCN de Tours devient ici tour-opérateur chorégraphique, c’est pour démontrer que les traditions imaginaires de ce monde sont solubles dans sa propre danse contemporaine, véritable philtre chorégraphique. Devenant ainsi une sorte de magicien pour le public composé en grande partie d’enfants, Lebrun n’invente pourtant rien. Il reprend simplement le fil de Casse-Noisette et du Sacre du Printemps, la narration en moins. Mais l’acte de coloriage est comparable.
Coloriage
Tout part d’un tableau blanc et de costumes blancs, tel une feuille de papier sur laquelle se dessinent les couleurs du monde. Cette épure, où chaque geste capte l’attention, même celle des plus petits spectateurs, permet d’ouvrir un espace mental sans confins, dans une épure qui ne se dément jamais. Au tableau final cependant, les interprètes se drapent de tous leurs accoutrements, amassés au cours de leur périple. Les chapeaux vietnamiens sont par ailleurs d’authentiques souvenirs de voyage de Thomas Lebrun.
II les confie ici à Léa Scher et/ou Lucie Gemon ainsi qu’à Anthony Cazaux et/ou Maxime Aubert. Car Dans ce Monde se décline en trois formats de durées différentes, pour s’adapter aux publics jeune, très jeune ou mixte, la version tous publics de soixante minutes étant dansée par un quatuor alors que les formats de vingt et de quarante minutes sont interprétés par un duo. A Tours, les représentations - Lebrun les appelle « voyages » - ont donné lieu à soixante-quinze interventions dans les classes des écoles, touchant sept cents élèves.
Thomas Hahn
Spectacle vu au CCN de Tours, dans sa version de 40 minutes, avec Léa Scher et Anthony Cazaux, le 13 novembre 2018
Dans ce Monde en tournée :
18 - 19/11, Les 3-T, scène conventionnée, Châtellerault
23 - 26/11, FestivAnges 2018, KLAP, Maison pour la danse, Marseille
9 -11/12, Festival Les Petits Pas, Le Gymnase, CDCN Roubaix Hauts-de-France
13 - 15/12, Le Grand Bleu, Lille
12 - 16/02, MA Scène nationale, Pays de Montbéliard
19/03, Maison des Arts et Loisirs, Laon
2 - 3/04, Centre de Beaulieu, Poitiers
21 - 22/05, La Rampe-La Ponatière, Scène conventionnée d’Échirolles
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