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Spécial Lausanne : Ted Bransen et Nina Ananiashvili

Le premier est directeur artistique du Het National Ballet et président du jury du Prix de Lausanne 2018. La seconde, directrice artistique du State Ballet of Georgia, est sa vice-présidente. Conversation croisée.

Accepter de présider le Prix de Lausanne 2018

Nina Ananiashvili : Parce que c’est une compétition très particulière. Les candidats qui se présentent ne viennent pas seulement pour gagner, ils viennent parce qu’ils veulent continuer à apprendre, recevoir un enseignement de qualité. Et le Prix de Lausanne les y aide. Il donne à ces jeunes venus de tous les coins du monde la chance de pouvoir choisir l’école où ils continueront leurs études. Alors, quand j’ai reçu la proposition de faire partie du jury, malgré mes occupations et mon emploi du temps chargé, j’ai dit oui. Car c’est quelque chose que nous nous devons de faire, pour notre métier.

Ted Bransen : Je dirai la même chose ! C’est ma troisième participation au Prix de Lausanne en tant que membre du jury et ma première en tant que président, ce dont je suis très honoré. Chaque fois que je suis venu ici, j’ai été très impressionné par la qualité des personnalités présentes. Certains des plus importants représentants des plus importantes compagnies au monde sont ici. Quant aux candidats, ils apportent ici le meilleur d’eux-mêmes, de leur travail et de leur danse. C’est une compétition, mais qui ne se résume pas à deux minutes sur scène ; au contraire, c’est un processus sur la durée où vous observez les candidats en répétition, en cours, en coaching. Vous voyez comment ils apprennent, progressent, vous les découvrez sous des angles différents. Il ne s’agit pas seulement pour eux de remporter un prix que l’on rapporte chez soi, mais de franchir une étape dans la construction de leur vie professionnelle. C’est ce qui rend cette compétition unique ! Le soin avec lequel le staff organise les présélections et le déroulement du concours est exceptionnel. C’est une opportunité fantastique, pour eux, d’être l’objet de toute cette attention et de pouvoir être évalué par des professionnels venus du monde entier. Je suis donc très heureux d’y participer.

La mission d’un président de jury

Ted Bransen : Mon rôle est de m’assurer que les règles de fonctionnement sont bien suivies, que le jury travaille en toute indépendance et en bonne intelligence. Car certes, nous mettons des notes, mais nous parlons aussi beaucoup entre nous, nous sommes tous impliqués et prenons notre tâche très au sérieux. Venant d’horizons et de métiers spécifiques, même si c’est dans le même domaine, nous avons chacun un point de vue différent, ce qui rend les discussions passionnantes.
Nina Ananiashvili : Les candidats étant très jeunes, nous sommes surtout très attentifs à ce qu’ils sont susceptibles de devenir plus tard, à leur potentiel. C’est pour eux une épreuve très stressante, je sais moi-même pour l’avoir vécu ce que signifie participer à un concours. Cette année, ils sont dans l’ensemble vraiment bons et il est parfois extrêmement difficile de les départager ! D’une manière générale, le niveau moyen a beaucoup progressé depuis quelques années. Notre mission, parmi ces bons danseurs, est de trouver les meilleurs !

La nouvelle génération de danseurs

Ted Bransen : Il y a aujourd’hui beaucoup de jeunes très talentueux issus de pays où le ballet classique est un phénomène relativement récent, comme la Corée, le Japon, la Chine, le Brésil. Dans l’ensemble, le niveau technique est beaucoup plus élevé qu’il y a trente ou quarante ans. Il y a toujours eu des danseurs exceptionnels, mais maintenant, c’est la majorité qui a progressé.
Nina Ananiashvili  : Les nouvelles générations sont plus impatientes qu’autrefois, elles sont plus pressées. Elles ont aussi la chance devant elles un monde ouvert. Elles peuvent se rendre facilement dans n’importe quelle compagnie où elles sont invitées. En même temps, ce mouvement d’ouverture fait que toutes les compagnies aujourd’hui sont un mélange, et que leur identité se perd un peu…
Ted Bransen : C’est vrai, et pourtant, on retrouve toujours quand même une ligne particulière : celle du Royal Ballet n’est pas la même que celle du Bolchoï… En revanche, cette envie d’aller très vite qui caractérise la jeune génération est aussi à rebours de la façon dont se forme un danseur. Ça prend du temps, et plus encore pour devenir un véritable artiste ! Leur faire prendre conscience de cela fait aussi partie de nos missions.

Les qualités d’un bon candidat 

Ted Bransen : Un bon physique, un bon entraînement, de la musicalité, une certaine façon de bouger. Avoir quelque chose à dire, et vouloir le dire. Certains, même très jeunes, l’ont déjà, cela fait partie du mystère de l’artiste…
Nina Ananiashvili : Ne pas être stressé, sinon cela se communique à celui qui vous regarde. Si l’on est tendu, on ne partage aucune émotion. Il faut que le corps et l’esprit aillent de pair, c’est un tout.

La santé des danseurs, un thème primordial

Ted Bransen : En tant que directeur de compagnie, je suis très concerné par ce sujet. Nous avons équipé nos sols de scène et nos studios de planchers et tapis Harlequin, afin de minimiser les risques de blessures, et que les danseurs aient partout les mêmes sensations. Nous les emmenons même en tournée ! Nous mettons aussi à leur disposition des kinés, ostéos, des cours de Pilates. Toutes les compagnies n’ont pas la chance d’avoir autant de moyens. Leur bon équilibre moral aussi est très important, et cela fait partie du job d’un directeur de compagnie que d’y veiller. Nous avons en charge la carrière de soixante-dix ou quatre-vingts personnes, c’est une vraie responsabilité.
Nina Ananiashvili : C’est effectivement le plus difficile et le plus compliqué : résoudre les problèmes, sans décevoir personne ! Concernant la santé physique, lorsque je vivais en Russie, nous dansions sur des sols très durs et étions souvent blessés. Lorsqu’en tournée, j’ai découvert qu’il existait des planchers spécifiquement conçus pour la danse, ce fut une révélation. Aujourd’hui, au State Ballet of Georgia, nous avons nous aussi des planchers et tapis Harlequin et ça fait une différence énorme. Disposer de sols de qualité devrait faire partie de l’équipement minimum de n’importe quelle salle accueillant des danseurs.

Un dernier conseil pour les candidats

Ted Bransen : Travailler dur, rester concentré, être généreux sur scène. Regarder les autres candidats, pour apprendre d’eux et apprécier ce qu’ils font. Etre dans l’instant. Saisir l’occasion. Nina Ananiashvili : Apprendre le maximum de cette expérience, car chacun, qu’il ait ou non un prix, aura grandi à l’issue de ce concours. Certains pourront même décider d’arrêter la danse, ce sera en ce cas leur décision, leur chemin. Profiter de ce moment. Et comme le disait ma professeure russe, danser du mieux que l’on peut !

Isabelle Calabre pour le Blog Harlequin Floors

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