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Pierre Rigal à propos de « Scandale » à Suresnes

Le chorégraphe commente ici sa troisième création avec des danseurs hip hop au festival Suresnes Cités Danse.

Danser Canal Historique : De quoi ce Scandale est-il le nom?

Pierre Rigal : Il s’agit d’une pièce sur la possession et la manipulation, avec une ambiguïté intentionnelle entre le consentement à cette manipulation et son refus. Et puis, est-ce que le groupe e créatures est solidaire face à son manipulateur ou pas? Mais il s’agit d’une pièce d’émotion et pas d’une élaboration théorique. Les danseurs arrivent sur scène en tant que créatures capturées par un chamane qui les manipule et les oblige à danser pour lui. Cela me permet d’élargir la palette chorégraphique par des mouvements très simples. Mais je vais bien sûr utiliser leur virtuosité et ils dansent aussi des figures très complexes et des gestes chorégraphiques très subtiles.

DCH : Scandale est votre troisième création pour Suresnes Cités Danse. D’où viennent les danseurs de cette production?

Pierre Rigal : J’avais déjà travaillé avec presque tous ces danseurs, dont certains depuis Asphalte, ma première création à Suresnes, mais aussi de Standards, ma pièce précédente. Et je connaissais aussi déjà Gwenaël Drapeau, le musicien qui joue le rôle du chamane. La musique est un moyen de mobilisation des corps qui est vieux comme le monde, mais c’est toujours aussi efficace. Ici aussi, elle donne envie de bouger. Et j’aimerais bien un jour proposer ce spectacle dans une salle de concert, où le public est entièrement debout.

DCH : Les garçons sont tous très grands, ce qui n’est pas, a priori, un atout pour la breakdance.

Pierre Rigal : Il est vrai qu’ils ont des corps surprenants et ne correspondent pas à l’image-type du breaker et que ce décalage crée la surprise. D’autre part, leur énergie collective est extraordinaire. Le fait qu’ils se connaissent depuis un certain temps joue beaucoup. Ils s’apprécient mutuellement, alors qu’ils n’ont pas les mêmes spécialisations en danse, ni les mêmes réalités chorégraphiques. Ensuite, mon travail dans cette pièce est de la amener à ne plus se considérer, sur le plateau, comme des danseurs mais comme des créatures qui dansent, pour rentrer dans ces esprits possédés et dans la dramaturgie. Il me faut éviter qu’on voie le solo hip hop de tel danseur à tel moment… Mais bien sûr, tout ceci sans tuer le plaisir de danser ou la virtuosité. Entre les deux objectifs, la frontière est subtile et la recherche n’est à mon avis pas encore complètement aboutie, puisque le spectacle est encore tout jeune, la première ayant eu lieu le 14 janvier. Avec le temps, les danseurs seront de plus en plus habités par cet univers.

DCH : On les voit dans des figures extraordinaires, mais en tant que silhouette, en contre-jour, et il est donc difficile de les identifier. Ca ne leur demande pas une belle part d’abnégation?  Etait-ce difficile à mettre en place?

Pierre Rigal : Ce n’est pas forcément difficile, mais ça prend un certain temps. En plus, ils ne sont pas seulement en silhouette, mais souvent aussi de dos, justement au moment où ils dansent le plus. Mais le public les apprécie et les admire d’autant plus qu’ils ne sont pas mis en avant de façon ostentatoire. Le fait d’aller devant le public et de recevoir des retours positifs de leurs amis et des spectateurs les a confortés et leur permet d’aller de l’avant. Au début ils étaient dubitatifs quand je leur ai demandé, dans la scène du retour du shaman, de ne danser qu’avec leurs hanches. Ca leur paraissait trop simple, voire ennuyeux. Mais grâce aux retours du public ils ont compris qu’ils ne sont pas du tout ridicules dans cette scène. De ça aussi, ils avaient peur. 

De toute façon une telle scène est inhérente à la thématique du spectacle, en lien avec le chamanisme et la transe, de la possession du corps. Et la danse hip hop a un lien, du moins lointain, avec la danse africaine et la transe, notamment quand ils disputent une battle et se mettent dans un état d’esprit qui n’est pas si éloigné de la perte de conscience.

DCH : A propos de possession, j’ai souvent pensé au krump.

Pierre Rigal : En effet! Au début je me disais qu’il serait bien d’avoir un ou deux krumpeurs dans l’équipe. Mais finalement je suis content de travailler avec des danseurs hip hop. Ils savent par ailleurs très bien approcher le krump parce qu’ils sont très doués. Avec des krumpeurs, les choses airant été trop évidentes. Quand on parle de transe à un krumpeur, il va comprendre tout de suite, alors que les danseurs du spectacle ont du faire un chemin, et ce chemin a été enrichissant pour eux et pour le spectacle.

Propos recueillis par Thomas Hahn

 

Scandale

Conception, chorégraphie, scénographie Pierre Rigal

Avec Steve Kamseu, Antonio Mvuani, Camille Regneault, Julien Saint-Maximin, Joël Tshiamala, Emilie Schram

Musique originale live : Julien Lepreux et Gwenaël Drapeau

Du 14 au 17 janvier

http://www.suresnes-cites-danse.com/2016-scandalehttp://www.suresnes-cites-danse.com/2016-scandale

 

 

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