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« Vice Versa », nouveau duo de Nicole Mossoux
La dernière création de la compagnie Mossoux-Bonté a fait escale, en première française, au festival Bien Faits! à Micadanses.
Vice Versa ouvre un nouveau chapitre dans la vie de la compagnie bruxelloise Mossoux-Bonté, une série de formes courtes dont la première, seule à avoir été réalisée à ce jour, est un duo féminin, plutôt bref et pourtant loin d’être une miniature. Un condensé, aérien et aéré. Et en même temps tragique, ça va de soi.
Voilà deux âmes-sœur, ou bien le dédoublement d’une même âme. Troublant motif que cette fêlure qui ne cesse de traverser l’œuvre de Mossoux-Bonté, à commencer par le célèbre Twin Houses et poursuivi, entre autres, dans Kefar Nahum et Les Buveuses de Café.
Mais là où habituellement, le face à face entre deux parties d’une conscience permet de regarder en direction des abîmes qu’il nous plaît de cacher, il ne s’agit ici pas de clivage mais de fusion. L’abîme est déjà là, dans le texte.
Au bout des trois jours et trois nuits,
Sur son cheval il remontit.
N’alloit pas comme homme de sens
Il allait comme poudre et vent.
La chorégraphie de Nicole Mossoux a quelque chose d’hypnotisant. Répétitive comme le rythme de la ballade, fusion de la douleur et de sa consolation, elle inclut la poésie autant que la folie déclenchée par la violence des hommes. Elle incarne le bercement de l’enfant comme le galop du cheval.
« O, Dieu te gart ! franc chevalier ;
Quels nouvelles m’as apporté ? »
― « Ta femme est accouché’ d’un fils,
De moi el a fait son ami. »
A cheval, on s’envole. Le galop est l’équivalent champêtre de la légèreté scénique et romantique de la ballerine. Mais le galop de Renaud, convaincu d’avoir été trompé par Marianson, est une chevauchée vers l’enfer, tout comme la sanglante trainée de la femme, injustement soupçonnée, puis accrochée à la queue du cheval.
Il prent l’enfant par le maillot,
Le jette contre le careau.
Prent sa femme par les cheveus,
À la queu’ du cheval la neu’.
Galerie photo © Mikha Wajnrych
A ces images telluriques et mortifères, Nicole Mossoux et Patrick Bonté opposent la complicité de Frauke Mariën et Shantala Pèpe dans leur unisson lancinant, l’innocence de Marianson, son envol après la mort, son désir d’harmonie et de bonheur.
Grace au dédoublement de Marianson, Vice Versa propose un point de vue féminin qui dépasse celui de la seule intéressée. A dos de cheval imaginaire, l’envol fusionnel de la double Marianson incarne l’inverse des énergies destructrices chez Renaud et son sinistre rival, duo absent de la scène (heureusement) et pourtant si présent.
Ni accusation, ni victimisation. La complainte se suffit à elle seule, et le pas de deux résume la réaction de Marianson : « Oui, ma mort lui est pardonné’ / Mais non celle du nouveau-né ! » Vice Versa danse le désir d’un amour sans violences, l’espérance d’une autre manière d’habiter le monde, la revendication du droit à l’abandon et à l’intimité, à la sensualité et la fragilité, le droit de rêver sans faire de cauchemars.
Thomas Hahn
Vu le 19 septembre 2016 à Micadanses, festival Bien Faits !
Concept et chorégraphie Nicole Mossoux
Interprétation et collaboration à la chorégraphie Frauke Mariën, Shantala Pèpe Mise en scène Patrick Bonté, Nicole Mossoux
Musique Les anneaux de Marianson, interpretation Michel Faubert - orchestration Jérôme Minière Montage son Thomas Turine
Lumière Patrick Bonté
Prochaines dates : 21 mars 2017 Théâtre de Choisy le Roi, Biennale Nationale de Danse du Val de Marne Choisy-le-Roi 23 mars 2017 Festival Planète Mars - L'Avant Scène Cognac
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