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« Palimpseste Duo » de Michèle Noiret
En 1997, la chorégraphe Michèle Noiret crée Solo Stockhausen, en hommage rendu au compositeur allemand rencontré trente années plus tôt, alors qu’elle était encore jeune élève à l’école Mudra de Maurice Béjart, à Bruxelles. En 2004, elle modifie légèrement la pièce en l’interprétant pour le film Solo devant la caméra du cinéaste Thierry Knauff. Et décide de la reprendre, dix ans plus tard, sous le titre de Palimpseste. Dans le même temps, naît le désir de transmettre cette ‘création très personnelle à quelqu’un qui ait un intérêt véritable pour sa chorégraphie’, selon ses propres termes. Ce sera le danseur et chorégraphe David Drouard, auteur du troublant (H)ubris, créé en janvier 2015 pour Suresnes cités danse.
C’est donc ce Palimpseste #1Duo, scénographié et éclairé par Xavier Lauwers, qui est présenté jusqu’au 8 octobre au Théâtre national de la Danse (nouveau nom du Théâtre de Chaillot), après une première étape de travail dans le Off d’Avignon durant l’été 2015. Michèle Noiret dit avoir travaillé à partir de la partition du compositeur baptisée Tierkreis, mot qui désigne le cercle du Zodiaque, chacune des douze très courtes mélodies étant en effet inspirée par un signe astrologique. Michèle Noiret les utilise en deux temps - les six premières du Capricorne au Gémeau pour le solo, les six dernières du Cancer au Sagittaire pour le duo -, et en deux versions : l’une pour boîte à musique, volontairement à peine audible, et l’autre pour clarinette et piano, musicalement plus ample.
Sur ces thèmes répétés et entremêlés, la danseuse tisse une danse profondément originale, alternant de drôles de petits pas pressés et une palette de mouvements déployés qui entrent en connexion directe avec l’espace. Chacun de ses gestes inspirés semble animé d’une vie propre, en pleine interaction avec le son. Comme habitée, Michelle Noiret poursuit un fascinant dialogue intime avec les phrases musicales, dont l’intensité subjugue même si le sens en demeure mystérieux.
Difficile, en effet, de saisir les résonances précises entre sa gestuelle et la symbolique zodiacale. Même si le souffle de l’air, de l’eau, de la terre et du feu, les quatre éléments accompagnant les douze signes, traversent indéniablement cette chorégraphie fluide et organique, on abandonne assez vite le jeu des correspondances pour se laisser captiver par la danse, capable dans son minimalisme de recréer tout un monde.
L’effet est encore plus saisissant dans la deuxième partie, au moment où entre en scène David Drouard. Le pas de deux attendu se transforme en un étrange face à face où seule compte la transmission du geste. Qui ne va pas sans ajustements progressifs. Les deux danseurs se suivent, se frôlent, s’imitent, dans un jeu piquant de chat et de souris qui sied au corps faunesque de l’un et à la silhouette incandescente de l’autre. Ils finissent enfin par danser ensemble, en cercle, et c’est très beau.
Isabelle Calabre
Du 27 septembre au 8 octobre - Chaillot-Théâtre national de la Danse
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